28 août 2009

Deux fils entrelacés

Le temps d’un stage, deux fils entrelacés – celui d’un espace de lumière et de paix, celui d’une douleur déchirante…

Des retrouvailles avec la part spirituelle en moi – fil d’or qui se dérobe parfois, refait surface, disparaît à nouveau, mais ne s’est jamais perdu tout à fait.

La nécessité de tolérer l’ambiguïté, les moments où l’on est ou bien se croit perdu – de la nécessité de la crise pour toute croissance.

« Nous sommes des bêtes de norme. »

Trop en trop peu de temps. Trop tôt. Trop vite. Trop tôt même pour savoir où exactement je suis atteinte.

Une demande, dans toute l’ambiguïté là aussi du terme : je souhaite que tu honores la femme en moi.

Comme un accouchement : entre la violence des contractions, des espaces de joie profonde, inespérée.

Si le couple se fonde dans l’amour, le projet, la sexualité – que nous reste-t-il, qui ne soit pas blessé ?

Laisse Marine être Marine - laisse l’instant présent être l’inconnu.

L’amour ce n’est pas, ne peut pas être dans l’effort, qui sépare de l’amour au contraire… ce n’est pas non plus la « récompense » de nos stratégies pour être aimé.

Retrouver la première enfance : celle qui est pur cœur, accueille ce qui est, sans projections ni anticipations – celle qui est traversée toute entière par les larmes ou la colère, et l’instant d’après jubile.

L’autre n’est jamais le responsable de ma souffrance – c’est toujours MA prison – l’autre est juste une chance éventuelle de m’en sortir enfin, de m’en sortir moi-même…

Générer cet amour en moi et l’agrandir – ce qui ouvre l’amour en l’autre – et l’accueillir – car pour recevoir aussi il faut une terre fertile..

Méditation : l’amour est en moi (inspir) / je suis dans l’amour (expir). Quelques secondes – le temps d’un sourire, plus de distinction, plus de limites, une unité… Le sourire vient quand c’est juste – la joie comme guide.

La vigilance à nos interprétations – cf. Ne fais pas de suppositions… Autant que possible, ne rester qu’avec ma roue.

Une goutte d’eau qui se croirait séparée de l’océan…

Une question (et une seule) au seuil de la mort : est-ce que j’ai aimé ?

Rien à faire. Rien à forcer. Rien vouloir. Et tout se fait tout seul.

Sortir de la plainte, pour s’orienter vers l’action juste ou la demande.

Donner toujours un petit peu plus que ce que tu reçois.

Nos mots nous créent. Passer déjà de, je suis comme cela à, je suis souvent comme cela à, je suis de moins en moins comme cela. And so on.

L’amour est entre nous ce qui grandit et nous grandit (Yvan Amar). Si différent de la satisfaction de mes ou de tes besoins… Accéder à cet espace d’amour est toujours un chemin de solitude – un chemin exigeant : il s’agit de trouver cet amour en MOI – ce choix est toujours possible.

...vous êtes cette personne qui s'est toujours relevée - a continué d'avancer...

Exercice : laisser être la tristesse, l'accueillir - sans s'y noyer. Discipline... Respirer. Accueillir. Traverser.

Une voie possible : honorer chaque lien d'amour. Une prière : puissé-je demeurer dans cette énergie d'amour.

Pas forcer pas anticiper pas vouloir... Demeurer à la fois dans l'incertitude absolue et dans la paix. Putain d'exercice !

"Tu montes la plus haute marche de ta vie, tu te sépares du cocon pour aller vers l'expansion de l'existence".

Nous sommes des "manquovores"... Il n'y a plus de manque ? Vite un manque ! A remplir par un geste compulsif, un semblant de satisfaction éphémère... trop obnubilés par le manque, nous passons à côté des bénédictions dans notre vie. S'exercer à la gratitude, à la re-connaissance (voir l'histoire des traces de pas).

A reconnaître que la vie veille - et ce stage-là, dans ce moment-là, en est l'évidence : au moment de la plus grande douleur, un espace de présence et de compassion.

Gratitudes : découvrir la puissance de la méditation, et sa vérité : il n'y a qu'à laisser être : let it be. Les émotions traversantes, les pensées parasites, les instants de paix profonde, et les élans de joie : let it be. La confiance : si je peux trouver des instants de grâce dans un moment pareil, alors c'est que faire le choix de l'ouverture du coeur est toujours possible. Et quand je n'y arrive pas, ne pas me juger pour cela, mais persévérer : un coeur faillible mais patient.

21 août 2009

Pious holidays

En direct des mails-addicts grands-mères :

"Elsa est calme, sait s'amuser dans la cour, s'occuper des fleurs, faire de longues promenades à vélo. (Jusqu'au Château de la Ville au Bois !). Des amis sont venus avec leurs petits-enfants et tous les trois ont été sages et intéressants pendant toute la soirée. Un autre soir, Elsa aime que l'on fasse du barbecue, et ensuite danse, un très bon moment ! Elle a fait six tours de manège, un manège ancien installé à Reims.

Pendant qu'il faisait très chaud, il a bien fallu que je me mette aux jeux de société dont Elsa est la grande spécialiste !

Une superbe perle de Elsa : "Monter sur un vélo, c'est pareil que monter sur un cheval, sauf qu'il n'a pas de pédales !!

Une autre : "Papi, gonfle mes pneus car ils sont moelleux" !!

Et une autre : "Ici, partout, ça sent l'air des vaches" !
Je me souviens d'une conversation avec Elsa :
Je lui demande : Comment fais-tu pour avoir autant d'idées et de les créer ?
Elsa me répond : "Déjà, tu réfléchis, et après, c'est comme si, il y avait, un mode d'emploi dans ma tête !!!

Un autre moment percutant :

C'est la fête à Artonges et Elsa me demande une "barbe à papa" que j'achète avec plaisir.
Sur la place du village, il y a là, une superbe "mare aux canards" ! Elsa me demande : "Mamie, une seule partie ? OK, Elsa.
Le jeune homme de service lui tend une ligne et me dit : 5 euros SVP !
Je dis doucement à Elsa : c'est cher pour une partie ! Et Elsa me répond sur un petit ton sec et pointu : "Oh ! 5 euros, ce n'est quand même pas du délire !!!"

"C'était VRAIMENT très beau à toutes heures ... Et Léo s'est régalé de tout, il n'y a que ses cours de tennis que je n'ai pu photographier, étant moi-même occupée dans ce créneau. Il a adoré l'équitation dans ce cadre superbe, l'accrobranches au-dessus du torrent ; n'a pas rechigné aux petites randos avec cueillettes. Et a trouvé le temps de faire le cahier de devoirs de français CM1 !

A la montagne , on bronze encore mieux qu'à la mer : Léo a un corps musclé, tout doré ! Mais les oreilles ont, un peu, cramé !!!"

15 août 2009

Mettre les voiles

Une succession ininterrompue de premières fois.
Le premier souvenir, peut-être le plus fort, c'est la traversée... Quand le jour tombe, quand les côtes disparaissent, quand les phares peu à peu s'éteignent... Je ne suis jamais allée dans le désert ; mais je crois que c'est à cela que ça doit ressembler : être un tout petit point perdu entre deux immensités, une voûte étoilée vierge de toute nuisance lumineuse humaine, et la mer immense, à perte de vue... Un tout petit point qui suit une invisible route - et la nécessité corrélative de faire confiance. Un petit point dérisoire et si vivant, un petit point qui traverse l'angoisse de la nuit et de l'inconnu et découvre le bonheur d'être seul à la barre, à guetter le premier rayon du soleil. Ce qui vient alors, est un chant ; et quelque chant que ce soit, c'est un Magnificat.

(mais aussi, la parole pleine engendrée par ce temps suspendu...)

Un autre souvenir ce sont les animaux - un invraisemblable banc de cachalots, des dauphins prudents mais curieux, un phoque esseulé, une libellule qui restera à bord jusqu'au retour... un instant unique de jeu, je ne vois pas d'autre mot, avec une petite raie volant sur un fond de sable blanc.

(et puis, dormir bercée par la houle, nager en haute mer, faire un feu de bois flottés sur les galets, planer à l'avant du bateau, les yeux dans les voiles...)

Un autre encore, c'est la communion avec la nature - la prise de conscience d'être dans un environnement limité en eau douce, en énergies diverses - le respect naturellement inspiré par la beauté de l'environnement, la présence des quatre éléments : le geste écologique devient alors une évidence, le constat de l'absence de désir de consommation aussi, et l'envie grandissante de fuir l'agitation des ports... La tombée des enveloppes sociales - s'habiller, se coiffer, se maquiller, pour quoi ? Un autre rapport à l'ordre aussi - quand la mer s'agite, et elle ne prévient pas nécessairement, le verre qui casse, la bouteille mal refermée, les objets qui valsent ne deviennent pas seulement un inconfort, mais un danger... là comme ailleurs, l'exigence d'une qualité de vigilance.

Un autre encore, l'acquisition d'un autre vocabulaire - bouts et drisses, aussières, taquets - grand et petit foc, gênois, trinquette... d'autres repères - cet autre bateau encore si loin dans la nuit, vient-il vers nous ou passera-t-il son chemin sans nous croiser ? L'idée si belle qu'au-delà des instruments modernes de navigation, rassurants mais toujours faillibles, il suffit d'une carte, d'une règle et d'un compas pour tracer sa route. Penser un instant à la folie des grands navigateurs, partis non seulement sans GPS mais aussi sans carte, à la rencontre de mondes improbables.

13 août 2009

Résonances

Il est vrai que j'ai reçu un sacré don avec la naissance : celui de tout magnifier. Il ne m'a jamais tout à fait quittée et je le retrouve dans cette allégresse profonde qui, magré tout, m'habite. (...) Notre devoir le plus impérieux est peut-être de ne jamais lâcher le fil de la Merveille. Grâce à lui, je sortirai vivante du plus sombre des labyrinthes. (...)

Excursion d'été en Tchéquie avec deux fils ! Il en reste comme une poudre d'or sur les doigts ; toute la grâce est là dans le halo d'une après-midi bleutée et dans mon regard noyé de fierté. Ainsi, ce qu'au premier degré nous ne vivons pas, pris que nous sommes au filet des humeurs, se vit dans une profondeur qui ne risque aucune altération. (...) Est sauvé depuis toujours ce que nous avions pourtant vécu avec tant de négligence ! Quelle immense compassion a la vie pour nous !

Christaine Singer, Derniers fragments d'un long voyage

10 août 2009

Estivale

Le même goût des bonheurs présents, sans parasitage passé/futur – revenir dans un lieu d’enfance avant sa vente probable (mais même là, la possibilité de lâcher), et revoir quelques-unes des personnes qui l’habitaient déjà il y a vingt ans, savourer le menu immuable et les vins du château de Jau, inscrire les enfants pour des cours de voile là où j’allais enfant puis adolescente (pas peu fière, de les voir terminer leur stage avec leur petit livret de marin apprenti, force du vent, matériel utilisé, etc.)… arriver par inadvertance aux abords d’une plage nudiste, goûter le soleil sur la peau… emmener les enfants visiter la Réserve Africaine, un labyrinthe de maïs, et même voir – à leur demande expresse ! – un spectacle de taureaux-piscine.

Un peu plus tard en Provence, nous retrouvons avec joie les cousins qui attendent leur deuxième bébé (une petite fille, cette fois) et la maison des vendangeurs, la chaleur écrasante qui oblige à la sieste, les fruits et légumes exubérants des jardins locaux. Leçons de natation pour les petits, visite régressive du musée Haribo et dîner impromptu dans la vieille ville d’Uzès (en deux tables s’il vous plaît : enfants ravis de passer commande comme des grands, parents ravis de pouvoir dîner en tête-à-tête), et, plaisir inédit, un festival de théâtre de rue à Pernes-les-Fontaines – trois jours de spectacles gratuits à travers le village, jongleurs, comédiens, musiciens, clowns…

Au nombre des plus jolis moments, un étrange jardin des poètes plongé dans la nuit mais habité de créatures illuminées (!) par un abat-jour sur la tête assemblant parfois leurs voix pour déclamer poèmes et histoires, bibliothèque à ciel ouvert autour d’un samovar de thé à la menthe, improvisations (existe-t-il des vers sans T ? il y en a un, à la fin des Yeux d’Elsa – dont le « nom de jardin secret » fut : Papillon). Elsa qui lut toute seule la dernière phrase d’un poème brésilien devant les promeneurs attendris : Il y a un fil de lumière entre moi et moi frais débarqué. On y trouvait aussi petites annonces farfelues : Ombre musclée cherche lueur fragile pour la protéger, ou encore Europe cherche constitution humaine, et un écrivain public pour lui confier nos secrets (Secret-Terre).

05 août 2009

Etonnement

Fin de l’année passée (et des précédentes…) : fatigue accumulée, sommeil capricieux, angoisses stériles, agitation consommatrice – d’énergie, d’argent, de disponibilité - irritabilité fréquente autant que vaine. Cet été – à l’organisation pourtant tardive, non exempte de doutes, et avec un petit budget (lieux familiaux, très peu de restaurants, aucun achat compulsif - ce qui est un exploit !) : le luxe d’une vaste étendue de temps, et une étrange tranquillité, bénéfice inespéré d’un passage qui s’est fait sans bruit : celui d’une conjugaison au présent.

Très peu d’hier, et encore moins de demain : ce qui semblait une angoisse majeure, sans doute pas définitivement écartée, s’est diluée dans un être-là, être bien, sans doute fragile mais délicieux. Que sont devenues les ruminations et anticipations dont j’ai pourtant le secret ? Aucune idée. Au début d’Impacts – voir post du même nom – j’avais émis le vœu suivant : avoir moins peur. Eh bien, je ne sais pas par quelle voie cela a bien pu passer, mais pour le moment au moins – je n’ai plus peur.

Un temps qui permet le temps pour soi et pour l’autre, le temps seul et le temps à partager. La certitude tranquille qu’il y aura un temps pour tout permet une qualité de présence incomparable. Une qualité de parole aussi – dans une recherche de vérité qui va croissant et réinvente la relation.

Moins d’écriture, moins de lectures – mais de stimulantes, à laisser décanter sans les recouvrir par d’autres, sur lesquelles revenir : Lucien Israël (voir les posts ci-dessous) s’avère être un compagnon exigeant et bourru, mais qui tombe à point nommé, tant sa pensée vient résonner avec ce qui m’habite.

Léo (qui me voit penchée sur le portable, quoique à l’ombre du mûrier et au chant des cigales) me dit : Il faut que tu t’arrêtes de penser, c’est les vacances.