27 juin 2009

Petites victoires

De mon collège de ZEP, je suis partie hier - dernier jour - dans la joie.

Parce qu'un gamin très dur et inquiétant (et qui le reste), pour lequel je me suis battue afin d'éviter une exclusion qui, à deux mois du brevet, aurait probablement entraîné une déscolarisation définitive, est parti la larme à l'oeil, en remerciant son professeur principal pour cette année (et avait, la veille, protégé un plus jeune d'une agression - or, c'est une histoire de ce genre qui lui avait valu la menace d'exclusion).

Parce que si une petite fille (genre Pimousse : petit mais costaud - en réalité ingérable) que j'attendais n'est pas venue, son professeur a pris l'initiative de venir me voir pour me dire, depuis que vous la suivez, Faïza fait des efforts visibles et des progrès en classe, assez pour que je l'aie mentionné sur son bulletin, et s'ouvre petit à petit. Mais après les vacances ? Nous verrons bien.

Parce qu'une jeune fille reçue la semaine dernière, prostrée et le regard fuyant, suite à une agression il y a un mois, est revenue me voir radieuse. Un entretien, peu de chose : replacer ce qui lui est arrivé dans un espace pensable - oui, c'est compréhensible d'être anxieuse, triste, etc., oui, la violence ici fait effraction, aussi parce qu'elle est insensée, imprévisible - dans un contexte familial (l'agression mineure qu'elle a subie ayant fait écho à une autre concernant ses frères, et qui fut autrement plus inquiétante) - dans son corps - la possibilité de se redresser, de respirer.

Pour moi c'est aussi à cela que sert cet espace - qui n'est pas un lieu de thérapie, mais aussi la possibilité d'une rencontre unique qui dédramatise, humanise.

Parce qu'une autre, à qui je demandais, lors de cette dernière rencontre, comment elle voyait ce petit bout de chemin que nous avons fait ensemble, m'a répondu : "C'était trop court". Point de vue que je partage - reste à souhaiter que ce travail puisse se poursuivre l'année à venir... Un petit bloc de colère celle-là aussi, mais une intelligence fine et un humour grinçant mais juste, qui fait partie de ses vraies ressources...

Ce n'est pas magique. Je ne me sens pas Zorro. Je suis bien consciente du poids du contexte social, familial, de ces enfants-là, du caractère transitoire, éminemment fragile, de ces petites victoires. Et qu'elles ne sont possibles que grâce à un travail de réseau avec l'infirmière, les CPE, la principale adjointe qui a porté ce projet atypique - une psychologue entre les murs, qui ne vient évaluer ni sanctionner, mais offrir un espace de parole avant tout à l'enfant. Un espace cadeau pour moi aussi - sur mesure, absolument dans l'esprit de ce que je souhaite faire de mon métier aujourd'hui.

25 juin 2009

En vrac

...c'est un peu comme je suis... Que disait le Tarot d'Osho, début juin ? Ah oui - au coeur l'Intégration, encadrée de la Totalité et du Voyage, parachevée par le Créateur, par la voie de la carte Suivre le courant... mais en première carte - avant ces promesses qui restent à tenir, la Répression.

De ces semaines, qu'est-ce qui émerge ? Un anniversaire lumineux - autant que musical. La réunion pour les futurs CP... Une réponse positive, pour un poste longuement attendu - et là - il y a des promesses à venir - créativité, responsabilité, horizon ouvert. L'attente de la reconduction très espérée du point Ecoute. Fêtes d'école, gala de danse, animations diverses pour les enfants, pique-nique au Parc Floral. Une acceptation de principe pour un D.U. qui m'intéresse, l'idée insistante d'un temps de bénévolat, peut-être . Un livre bouleversant - D'autres vies que la mienne, d'Emmanuel Carrère. Et un autre de Marie de Hennezel, qui reste une balise interne, récurrente, une certaine idée de la rencontre humaine avant que théorique, et de l'envie de ré-ouvrir à une dimension spirituelle... Et encore - une matinée pour installer une boutique, jouer à la marchande - et parler vrai, dans un troquet de Ménilmontant.

Et puis des mots, des mots, des mots, jusque tard dans la nuit, et qui résonnent encore longtemps après, la recherche d'un chemin, le plus juste et le plus vrai possible, le vertige, au bord de lâcher des modes, des mondes, des démons anciens... Alors - Répression, ou Intégration ?

08 juin 2009

Très juste

"Il n'y avait pour elle aucune possibilité de coexistence entre la méchanceté gratuite et l'intelligence." (Françoise Sagan, La Chamade)

Françoise n'est pas gentille, elle est trop lucide pour ça : elle est bienveillante. L'un et l'autre ont l'intelligence absolue, comme on a l'oreille absolue, la clairvoyance suprême qu'on appelle aussi la bonté. Celle qui s'abstient de juger, qui ne perd pas de temps à s'agacer de ce qui ne peut être changé. Un entendement qui prend du recul, plutôt que la perspicacité, qui s'acquiert à force d'épier autrui. (...) La bêtise est un manque d'imagination, la méchanceté, un à priori de sottise. Avec un respect souverain de la liberté d'autrui, Sartre comme Sagan voient l'être humain tel qu'il est, avec sa dignité et ses blessures. Aucun des deux n'est croyant, ils pratiquent pourtant avec authenticité l'amour du prochain. Ils ont le coeur intelligent.

Marie-Dominique Lelièvre, Sagan à toute allure

Intermittente du social

36 ans, multi-diplômée, analysée, supervisée, formée - le tout à mes frais bien entendu - et dans une absurde précarité... A ce jour - je ne sais pas comment je vais travailler l'année prochaine.

Parce que la société dans laquelle nous vivons ne propose aucune reconnaissance ni en termes de statut ni en termes de salaire aux métiers comme le mien. Que je vais de vacations (ni congés, ni maladie, ni chômage) en contrats précaires, dépendants de subventions qui elles-mêmes dépendent non de la qualité du travail effectué mais des fluctuations des orientations politiques locales. Parce que la Mairie de Paris - mais elle n'est pas la seule - ne me propose, à mon niveau de compétence et d'expérience, qu'une rémunération inférieure à celle d'une femme de ménage non déclarée. Parce que j'ai fait le pari de la refuser, dans l'attente d'un projet qui n'en finit plus d'être reporté.

Parce qu'au-delà de l'inquiétude croissante en ce qui me concerne (et restant bien consciente que je ne suis pas la plus à plaindre), je suis en colère de vivre dans un pays qui semble avoir de l'argent pour plus de consommation bling-bling, plus de sauvetage d'entreprises véreuses, plus de flics partout - mais pas pour l'enseignement, le médical, le social. Il n'est pas certain, que mon action dans un collège défavorisé soit reconduite, faute de financement ; mais le contribuable va peut-être payer pour que l'on installe des portiques de détection d'armes à l'entrée de ce type d'établissement... Suis écoeurée.

07 juin 2009

Fête des Mères

Cette année, pas de collier de nouilles, de bougeoir en pâte à sel - pas même un mot le matin, un dessin ou une carte, leur père ayant légèrement zappé la question. Mais un cadeau autrement plus précieux...

Hier soir, au moment du coucher, Léo m'interpelle - à très juste titre - sur le fait que les livres qui parlent de "comment on fait les bébés" n'expliquent en réalité jamais vraiment comment on les fait... Tu veux dire, ce qu'on entend par faire l'amour ? Acquiescement de l'intéressé. S'en est suivie une très jolie discussion sur la sexualité - sur le corps, sur le plaisir, les sentiments - une fois informé des aspects pratiques, Léo ayant naturellement enchaîné sur des questions autour de la relation - commnt dire qu'on est amoureux, pourquoi les humains ont parfois plusieurs relations amoureuses dans leur vie, etc...

Quant à la Zaza - un brin jalouse du long temps que j'avais consacré à son grand frère, elle s'est saisie de la projection de Home vendredi (à voir absolument, même si le constat est accablant) pour lancer des questions autour de l'écologie, du recyclage - avec des mots tout simples, et des remarques pertinentes... Cadeau.

06 juin 2009

Douceur

Quand j'étais petite, je rêvais d'avoir une maison, un piano et un chien. Nous avons un appartement, un piano et... un chat ! Piano qui cette semaine est passé du clavier électronique au vrai piano - cet élégant instrument laqué de noir, qui habite l'espace physique et sonore comme aucun autre. Autour de ce piano, j'ai vu jouer Léo, qui prend des cours depuis peu, entendu ma mère fredonner du Barbara et mon beau-père une chanson d'Aznavour - que demander de plus ?

01 juin 2009

Artistes en herbe

Ce jour au Centre Pompidou, des ateliers en veux-tu en voilà, pour cause de week-end Art en famille. Aussi nous avons joué avec des rétro-projecteurs (opacité et transparence, formes et silhouettes), fabriqué des bonshommes fil de fer à la Calder (et vu l'expo ensuite), participé à une grande fresque collective sur le parvis, visité un labyrinthe habité par des anges de papier de soi(e), et sauté sur des trampolines à l'image des Chinatowns du monde. J'ai rarement vu musée se mettre autant à la portée des enfants, et gratuitement encore...