28 mars 2020

Et encore de la poésie

De tout, il resta trois choses : la certitude que tout était en train de commencer, la certitude qu'il fallait continuer, la certitude que cela serait interrompu, avant d'être terminé. Faire de l'interruption, un nouveau chemin, faire de la chute, un pas de danse, faire de la peur, un escalier, du rêve, un pont, et de la recherche... une rencontre.

Fernando Pessoa

25 mars 2020

Retrouver le goût...

...de la poésie.

Nous devrions cesser de croire que la bienveillance est une vertu infaillible.
Que la douceur est solide. 
Que l'oreille qui écoute jamais ne tombe malade.
Toute personne qui apporte de la légèreté échange sa chaleur contre un morceau de vos abysses.
Et nous en redemandons, encore et encore, sans chercher à savoir où s'entassent ces mauvais moments dans la vie de ces autres qui nous prêtent leurs nuances quand nous manquons de couleur.

Cécile Coulon, Abîmer la douceur

La prison

Mon adresse a changé.
L’heure de mes repas,
Ma ration de tabac, ont changé,
Et la couleur de mes vêtements, et mon visage et ma silhouette.
La lune,
Si chère à mon cœur ici,
Est plus belle et plus grande désormais.
Et l’odeur de la terre : parfums.
Et le goût de la nature : douceurs.
Comme si je me tenais sur le toit de ma vieille maison,
Une étoile nouvelle,
Dans mes yeux, incrustée.

Mahmoud Dawish

19 mars 2020

Nous ne sommes pas en guerre

NOUS NE SOMMES PAS EN GUERRE et n'avons pas à l'être...
Il est intéressant de constater combien nous ne savons envisager chaque événement qu’à travers un prisme de défense et de domination.
Les mesures décrétées hier soir par notre gouvernement sont, depuis ma sensibilité de médecin, tout à fait adaptées. En revanche, l’effet d’annonce qui l’a accompagné l’est beaucoup moins.
Nous ne sommes pas en guerre et n’avons pas à l'être.
Il n'y a pas besoin d’une idée systématique de lutte pour être performant.
L’ambition ferme d’un service à la vie suffit.
Il n’y a pas d’ennemi.
Il y a un autre organisme vivant en plein flux migratoire et nous devons nous arrêter afin que nos courants respectifs ne s'entrechoquent pas trop.
Nous sommes au passage piéton et le feu est rouge pour nous.
Bien sûr il y aura, à l’échelle de nos milliards d’humains, des traversées en dehors des clous et des accidents qui seront douloureux.
Ils le sont toujours.
Il faut s’y préparer.
Mais il n’y a pas de guerre.
Les formes de vie qui ne servent pas nos intérêts (et qui peut le dire ?) ne sont pas nos ennemis.
Il s’agit d’une énième occasion de réaliser que l’humain n’est pas la seule force de cette planète et qu’il doit - ô combien- parfois faire de la place aux autres.
Il n’y a aucun intérêt à le vivre sur un mode conflictuel ou concurrentiel.
Notre corps et notre immunité aiment la vérité et la PAIX.
Nous ne sommes pas en guerre et nous n’avons pas à l’être pour être efficaces.
Nous ne sommes pas mobilisés par les armes mais par l'Intelligence du vivant qui nous contraint à la pause.
Exceptionnellement nous sommes obligés de nous pousser de coté, de laisser la place.
Ce n’est pas une guerre, c’est une éducation, celle de l’humilité, de l’interrelation et de la solidarité."

Sophie Mainguy, médecin urgentiste

17 mars 2020

Liens thérapeutiques

Bonjour,
Cela fait des mois maintenant que je suis censée vous donner des nouvelles. Mais comme vous le savez, je ne suis pas très douée pour ce genre de choses... 
Les circonstances actuelles me poussent cependant à cesser de procrastiner. Je ne suis pas mise en danger par le virus mais la panique ambiante m'a fait reconsidérer mes appréhensions.
Je ne vous écris donc pas pour vous dire ce que je deviens mais plutôt pour m'assurer que vous, (...), vos proches et toute l'équipe (...) alliez bien.
C'est un peu étrange, je l'admets... Mais j'espère sincèrement que tout se passe bien de votre côté et vous souhaite le meilleur en dépit de la situation actuelle.

Prenez soin de vous

On nous a demandé de fermer nos portes, et de mettre nos pas en sommeil.

Ça ne veut pas dire que nous devons hiberner. Ce confinement ne nous rend pas moins beaux, moins drôles ou moins doués. Alors montrons-le.

Si tu n'as jamais eu le temps de te mettre à écrire ce roman fantastique, à reprendre ta guitare, à créer cette chaîne de tutos beautés, à te remettre au chant lyrique, fais-le. Et montre-le, que tu t'estimes doué ou pas.

Les obligations professionnelles seront sans doute toujours aussi fortes, l'angoisse peut-être aussi, mais prends du temps pour faire quelque chose qui te plait. Et partage-le. Qu'on fasse du bruit et de la lumière. Qu'on montre qu'on est tous là. Que ce moment n'est qu'un déplorable épisode, et qu'à notre façon, on essaye de le rendre moins pénible.

Pour ceux qui s'inquiètent, pour ceux qui sont en train de se battre contre la maladie, pour les guerriers qui les assistent de toutes leurs forces, et pour nous, tout simplement. On peut faire un petit peu de beau. Tous on a ce pouvoir. Alors faisons-le. Chantons, écrivons, faisons des blagues nulles, dessinons et animons.

Faisons de petites étincelles.

Prenez soin de vous.

Hugo

06 mars 2020

Revenir à soi




01 mars 2020

Transmission

C'est très étrange, ce qui se grave ou pas dans la mémoire des enfants, c'est incompréhensible. Ils prennent ce qu'ils doivent prendre, mais on ne saura jamais ce que ce sera ni l'importance que cela aura. Mais après tout, c'est leur histoire. Ça ne sert à rien de se poser la question de la transmission, elle est insoluble.

Tout cela est très mystérieux et passe bien au-dessus de tous les mots, de toutes les volontés. Je ne crois pas au passage de relais, même avec ses propres enfants. La seule transmission qui vaille, c'est une vraie générosité, sans espoir de retour. Une confiance qui s'entête, même si elle peut être déçue. 

Accepter de donner et de recevoir, de recevoir et de donner. Du bon ou du mauvais, peu importe puisque de toute façon on ne sait pas ce qui va infuser ni comment.  

Il n'y a que des relais d'amour.
La volonté n'a rien à voir là-dedans.

Gérard Depardieu, Monstre