Zéro charge mentale, même pas les repas ou le ménage : être prise en charge plutôt que de prendre en charge, être nourrie – sur différents plans – plutôt que de nourrir : enfin une possibilité de se reposer, voire de régresser.
Régresser : d'autant que les mains dans la terre appellent aussi l'enfant en soi (et plus le parent anxieux et hyper-responsable) : patouiller, barboter, faire des pâtés, le retour au sens du toucher, explorer un monde nouveau avec ses mains. Débrancher le cerveau gauche : organisation, hiérarchisation, analyse – et retrouver le cerveau droit : émotions, créativité, état de flow. Sentir : j'ai pris beaucoup de plaisir à enfoncer mes bras jusqu'aux coudes dans le bac de barbotine !
8 participants, 4 langues, ce qui a contribué plus encore à ce que le cerveau change de mode et de monde, j'ai adoré ça aussi.
Le groupe fait enveloppe, contient, porte, peut permettre alternativement de partager des préoccupations communes ou de parler de choses plus légères, plus individuelles – je pense par exemple au moment où j'ai parlé de mes essais en tango et en lindy hop avec Vilja : c'est un temps pour se retrouver SOI (en ce qui me concerne, retrouver mon goût pour expérimenter souvent des choses nouvelles pour le plaisir, sans aucune attente de résultats).
Pareil pour la visite à Nancy, puis à Metz le lendemain, j'ai retrouvé ce plaisir de la découverte culturelle, qui a réveillé mon envie de voyager seule à nouveau. Bref, ces choses qui me définissent autrement que comme mère aidante d'une jeune femme handicapée.
Les modalités d'animation de Bo aussi sont très porteuses, comme on dit d'un mur qu'il est porteur ; cet équilibre entre un cadre clair et contenant : horaires, règles de fonctionnement, explications techniques, et en même temps une totale liberté d'expérimentation, mais en sécurité, c'est très Montessori !
Tous ces points auront bien apaisé mon système nerveux sur-stimulé et hyper-vigilant depuis des mois, m'auront permis de revenir dans ma fenêtre de tolérance et de la ré-élargir.
La concentration et le silence dans les différentes étapes peuvent aussi rappeler les bienfaits de la méditation – la meilleure définition qu'on m'ait donnée de la médiation c'est « faire une seule chose à la fois ». On pourrait comparer avec les états d'hypnose légère aussi, qui sont en eux-mêmes régénérants pour notre cerveau – le mouvement circulaire du tour s'y prête très bien.
Ce qui me semble profondément thérapeutique aussi, c'est la joie : commencer à voir un peu de progrès dans la pratique, chercher des idées pour l'émaillage, les échanges rieurs à table ou à d'autres moments, et surtout celle devant les réalisations finales : il y a quelque chose de jubilatoire après la dernière cuisson, aussi maladroits que soient les essais ! Et puis, partir avec quelque chose de concret dans la main. La trace d'un moment, et la fierté d'avoir fait quelque chose, de soi, pour soi.