14 ans, enceinte ; elle ne trouve pas de majeur référent pour l’accompagner pour l’IVG. Vu la grande sœur, mineure aussi, pour la même raison l’année passée… Même légèreté apparente, souriante. Même dés-espoir absolu par rapport au monde des adultes.
13 ans, obèse, vue il y a un an – parce qu’inquiétante, mutique, souvent violente. J’avais évoqué l’idée alors d’un secret qui pourrait peser sur elle, dont elle pourrait parler peut-être, si ce n’était à moi alors à un professeur, ou encore à l’infirmière. Elle n’a pas donné suite. Un an plus tard même tableau : seule évolution, un conseil de discipline qui va entraîner une exclusion, quelques hochements de tête et une phrase : oui, elle sait pourquoi elle est agressive, déconcentrée, incontrôlable parfois. « Pour oublier quelque chose ». De passé. Il y a 3 ans. Et non, ce n’est pas juste qu’elle soit sanctionnée pour une histoire qui la dépasse et l’a infiniment blessée. Quatre mots. D’accord pour revenir. Souhaitons que l’établissement lui en laisse le temps.
11 et 13 ans, arrivées d’Haïti après le tremblement de terre. Hébergées par une tante paternelle qui a usurpé l’identité de leur mère et obtenu des papiers français – un échange de bons procédés, n’est-ce pas… Le père habite ailleurs, vient d’avoir une autre petite fille. La tante n’est finalement pas ravie d’avoir les deux filles à charge, les exploite plus ou moins et a semble-t-il la main leste.
11 ans. Violences, aussi. A osé demander à sa mère si elle l’aimait. Réponse négative. Volée de coups. Je ne suis pas certaine que le rappel à la loi suffira, pour cette mère-là. C'est une amie des petites Haïtiennes, qui voudraient savoir si elles peuvent l'adopter...
13 ans. Le collège appelle le père, alors que la mère a expressément demandé que tous les messages lui arrivent. La gamine est terrorisée, et pour cause : la mère la couvre, mais couvre aussi les violences du père (fratrie de quatre...). Nous n’avons pas réussi à convaincre la mère, venue la chercher, de la mettre à l’abri le soir même dans un établissement pour mineurs. Alors nous avons insisté sur le fait que si le lendemain, la jeune fille avait ne serait-ce qu’un cheveu de travers, nous saisirions immédiatement le Procureur. Pari gagné. Et mère d'accord pour revenir, essayer de faire avancer la situation ensemble. Je suis contente que nous ne l’ayons pas désavouée en plaçant d’office sa fille. Mais je n’en menais pas large ce soir-là.
19 ans, troisième IVG ? Echo ce jour, presque douze semaines ? Comment savoir ce qu’il y a de mort, dans cette morne répétition – comme si elle s’était lâchée elle-même, dans l’indifférence du petit copain comme de la famille (comment peuvent-ils ne pas voir ?) – ce qu’il y a de vie, dans ces grossesses insistantes, qui sont aussi le seul moyen de garder un contact avec des professionnels de santé ?
Pour faire face à tout cela il est des mots précieux : Travail d’équipe. Relais. Réseau. Supervision. Mais quand même – il y a des jours…
13 ans, obèse, vue il y a un an – parce qu’inquiétante, mutique, souvent violente. J’avais évoqué l’idée alors d’un secret qui pourrait peser sur elle, dont elle pourrait parler peut-être, si ce n’était à moi alors à un professeur, ou encore à l’infirmière. Elle n’a pas donné suite. Un an plus tard même tableau : seule évolution, un conseil de discipline qui va entraîner une exclusion, quelques hochements de tête et une phrase : oui, elle sait pourquoi elle est agressive, déconcentrée, incontrôlable parfois. « Pour oublier quelque chose ». De passé. Il y a 3 ans. Et non, ce n’est pas juste qu’elle soit sanctionnée pour une histoire qui la dépasse et l’a infiniment blessée. Quatre mots. D’accord pour revenir. Souhaitons que l’établissement lui en laisse le temps.
11 et 13 ans, arrivées d’Haïti après le tremblement de terre. Hébergées par une tante paternelle qui a usurpé l’identité de leur mère et obtenu des papiers français – un échange de bons procédés, n’est-ce pas… Le père habite ailleurs, vient d’avoir une autre petite fille. La tante n’est finalement pas ravie d’avoir les deux filles à charge, les exploite plus ou moins et a semble-t-il la main leste.
11 ans. Violences, aussi. A osé demander à sa mère si elle l’aimait. Réponse négative. Volée de coups. Je ne suis pas certaine que le rappel à la loi suffira, pour cette mère-là. C'est une amie des petites Haïtiennes, qui voudraient savoir si elles peuvent l'adopter...
13 ans. Le collège appelle le père, alors que la mère a expressément demandé que tous les messages lui arrivent. La gamine est terrorisée, et pour cause : la mère la couvre, mais couvre aussi les violences du père (fratrie de quatre...). Nous n’avons pas réussi à convaincre la mère, venue la chercher, de la mettre à l’abri le soir même dans un établissement pour mineurs. Alors nous avons insisté sur le fait que si le lendemain, la jeune fille avait ne serait-ce qu’un cheveu de travers, nous saisirions immédiatement le Procureur. Pari gagné. Et mère d'accord pour revenir, essayer de faire avancer la situation ensemble. Je suis contente que nous ne l’ayons pas désavouée en plaçant d’office sa fille. Mais je n’en menais pas large ce soir-là.
19 ans, troisième IVG ? Echo ce jour, presque douze semaines ? Comment savoir ce qu’il y a de mort, dans cette morne répétition – comme si elle s’était lâchée elle-même, dans l’indifférence du petit copain comme de la famille (comment peuvent-ils ne pas voir ?) – ce qu’il y a de vie, dans ces grossesses insistantes, qui sont aussi le seul moyen de garder un contact avec des professionnels de santé ?
Pour faire face à tout cela il est des mots précieux : Travail d’équipe. Relais. Réseau. Supervision. Mais quand même – il y a des jours…