Ça fait un petit moment que je l'apprivoise, cet étudiant pakistanais avec qui nous communiquons en anglais, hypersensible, probablement HPI, traumatisé par des années de harcèlement au pensionnat dans l'enfance, cinquième d'une fratrie de six où semble-t-il, seul le premier et le dernier-nés ont trouvé grâce aux yeux d'une mère mariée bien trop tôt. Venu parce qu'il contrôle mal ses accès de rage, sa frustration, sa dépression qui prend parfois des accents mélancoliques, il peut aussi se montrer drôle, percutant, éminemment touchant.
La pension, il y est allé seul, parce qu'il était le plus prometteur, porteur des espoirs de la famille ; et de France, sur son maigre salaire de job d'étudiant, il envoie de l'argent à toute la famille, bien sûr. Pression financière immédiate ET obligation de réussite dans un environnement exigeant, parfois hostile : la norme, pour beaucoup des étudiants étrangers.
La semaine dernière, il m'avait émue en me restituant, à ma demande, ce qu'il avait retenu du chemin parcouru depuis quelques mois (quasiment tout, avec un degré de finesse et de précision inespéré). J'ai mesuré l'importance de nos rendez-vous, le repère qu'ils sont devenus dans une vie où tout ces derniers temps semble lui échapper - et l'ampleur de sa solitude, et par conséquent ce qui dans le lien est déjà soin - du simple fait d'être accueilli là, autrement.
Et cette semaine, je l'ai découvert "écriveur" - des pages et des pages d'un blog non publié, littéraire (le blog est truffé de citations), et, alors qu'il termine une licence d'informatique, capable de citer de mémoire le cours optionnel de littérature française à son arrivée en France - les Calligrammes d'Apollinaire, la scène de la cassette dans l'Avare - et parmi les citations du blog, j'ai retrouvé un poème d'Eluard, et... le refrain d'A la Claire Fontaine. "But, did you know that is a sad love song, and not only a nursery rhyme ?" - oui, il savait. Il était même capable de le fredonner. Incroyable petit moment de grâce.
La pension, il y est allé seul, parce qu'il était le plus prometteur, porteur des espoirs de la famille ; et de France, sur son maigre salaire de job d'étudiant, il envoie de l'argent à toute la famille, bien sûr. Pression financière immédiate ET obligation de réussite dans un environnement exigeant, parfois hostile : la norme, pour beaucoup des étudiants étrangers.
La semaine dernière, il m'avait émue en me restituant, à ma demande, ce qu'il avait retenu du chemin parcouru depuis quelques mois (quasiment tout, avec un degré de finesse et de précision inespéré). J'ai mesuré l'importance de nos rendez-vous, le repère qu'ils sont devenus dans une vie où tout ces derniers temps semble lui échapper - et l'ampleur de sa solitude, et par conséquent ce qui dans le lien est déjà soin - du simple fait d'être accueilli là, autrement.
Et cette semaine, je l'ai découvert "écriveur" - des pages et des pages d'un blog non publié, littéraire (le blog est truffé de citations), et, alors qu'il termine une licence d'informatique, capable de citer de mémoire le cours optionnel de littérature française à son arrivée en France - les Calligrammes d'Apollinaire, la scène de la cassette dans l'Avare - et parmi les citations du blog, j'ai retrouvé un poème d'Eluard, et... le refrain d'A la Claire Fontaine. "But, did you know that is a sad love song, and not only a nursery rhyme ?" - oui, il savait. Il était même capable de le fredonner. Incroyable petit moment de grâce.