30 décembre 2017

Les yeux ouverts

- Pourquoi je vous parle de regard Ariane Ascaride ? Parce que pour moi c'est central dans ce cinéma, les regards échangés, les regards à la dérobée, qu'est-ce qu'il y a de plus beau ?
- Mais parce que Robert sur un tournage il parle pas ! Il regarde, il nous regarde, on se regarde, on le regarde.
- Et ça c'est un acte de résistance parce qu'aujourd'hui vous avez remarqué, on ne se regarde plus ? 
- Moi vous savez je finirai sur un banc quand je serai très vieille, je regarderai passer les gens. Parce qu'il n'y a que ça qui m'intéresse dans la vie, c'est regarder les gens.

Ariane Ascaride interviewée par Augustin Trapenard

Attrapé au vol dans les podcasts de Boomerang, un petit moment de douceur qui me va droit au coeur. Parce que je crois bien que moi, aussi, il n'y a que ça qui m'intéresse. J'irais bien rejoindre Ariane sur son banc.

29 décembre 2017

28 décembre 2017

Singin' in the Grand Palais



Alors cette année, il y a un tiercé gagnant Zingaro - Slava's Snow Show - Singin' in the rain. Qui met la barre très, très haut pour les années à venir ! Transplanter la troupe du Châtelet au Grand Palais, il fallait oser la démesure, prétendre à la perfection... défi relevé haut la main. Show millimétré, costumes somptueux - entre Chanel et Folies Bergères - artistes complets, décors incroyables, fluidité totale : les créateurs n'ont eu peur de rien, de la soirée Années folles aux claquettes et paillettes de Broadway - et tout était juste fabuleux. Un spectacle comme une bulle de champagne, dans un lieu d'exception - et partagé, c'est encore meilleur...



25 décembre 2017

Un Noël breton


Beau comme un livre d'images, avec des enfants presque sages, une grande cheminée, un beau sapin (roi des forêts), une messe de Noël, de bonnes choses à manger, des petites attentions pour chacun. Une halte un peu courte après une fin d'année bien chargée, mais quel plaisir de dormir si profondément - parce qu'enfin dans un espace où aucune responsabilité ne pèse, où il n'y a rien d'urgent à faire - juste être là, dans une atmosphère familiale et détendue.

Un des enfants me sert une coupe de champagne : les invités d'abord ! "Il n'y a pas d'invités ici, le reprend Tad, Lucile est chez elle". Touchée !

24 décembre 2017

Une si jolie demande


Et une délicieuse réponse. J'adore.
Avoir des amis heureux, amoureux et créatifs.
Et l'idée qu'ils se marient. Oui !

21 décembre 2017

Une tempête de bonheur

Ca faisait tout juste 6 ans... et bien des tempêtes ont soufflé depuis. Assez pour apprécier ce beau cadeau à sa juste valeur, un moment de (grande) famille sous le signe de la poésie et des rires, de la surprise et du retour à l'enfance. Quelle joie de voir Elsa rire (et faire le clown avec Léo dans les couloirs ensuite), et l'émerveillement des grands-parents, et nous tous réunis en incluant Ronan, et de retrouver des flocons de papier dans les sacs et les vêtements le lendemain...

Je ne sais plus où j'ai lu que le Snow Show est au clown ce que le Cirque du Soleil est au cirque. Je trouve la comparaison très juste - l'exception, le moment de magie absolue, un spectacle qui n'en n'est plus un tant il nous élève au-dessus du sol, nous entraîne dans la féerie.

Et puis... la conscience de la fragilité actuelle des uns et des autres, cet équilibre délicat ce soir-là comme les bulles de savon du grand Slava, ajoutait encore à la douceur de l'instant - car ce qui fait toute la poésie du clown, c'est qu'il est souvent un rire au bord des larmes, un miroir pour nos maladresses, nos failles, nos contradictions si humaines.

18 décembre 2017

GEEV

Geev, c'est une appli rigolote pour donner tout ce qui ne te sert plus mais qui peut être utile ou faire plaisir à quelqu'un que tu ne connais pas encore. Le Bon Coin c'est bien, très bien même, mais il est trop souvent illusoire de penser tirer quelques euros de ce dont tu ne veux plus (ou alors du gros, quasi neuf, et bradé).

Geev c'est une brocante invraisemblable qui tisse du lien humain, comme CouchSurfing, Trocmaison ou BlaBlaCar, une foire à tout qui ce soir aura fait naître plusieurs rencontres. Une maman martiniquaise qui va faire des frites à sa fille étudiante dans ma vieille friteuse, qui ressemble à celle de sa mère. Fille qui se plaint de ne pas avoir eu de frites maison depuis... ses 8 ans ! Et la maman raconte qu'elle a fait la journée d'une personne âgée en lui offrant une cafetière qu'elle n'utilisait pas. Une très jeune femme qui récupère une montre neuve pour l'offrir à Noël à sa petite soeur (montre jamais portée car probablement bien plus du goût d'une petite soeur que du mien). Une gourmande qui prend les livres de cuisine... pour que son copain lui fasse de nouveaux desserts. Mon histoire préférée ? Mon canapé blanc parti pour la salle de répétition d'une troupe de théâtre. 

Léo joue aussi, et on fait la course pour savoir qui aura le plus de bananes  : l'icône de l'appli est un petit singe malin, et les bananes comptabilisent les dons ou les adoptions d'objets, puisque l'idée est de donner une seconde vie à ceux-ci - adopter compte donc tout autant que donner !

Demain, je laisse partir la poussette-landau-cosi des enfants, pour une future maman ravie ; elle n'est pas à la dernière mode, mais elle est increvable et sera bien utile. Des bouquins pour une khâgneuse sans le sou. J'adore l'idée : sympathique, écologique, économique - hors des circuits marchands habituels. Créatrice de sourires entre des inconnus. Que demander de plus ?

08 décembre 2017

En silence

Je sais que je pourrais. Appeler. Mais je préfère ne pas. Vraiment, je préfère me rouler en boule, me faire couler un bain, me concentrer sur des tâches pratiques, reprendre une tartine de Nutella, tant pis, trouver un peu de beauté ici ou là, écrire ici ou ailleurs, parfois. Parce qu'il n'y a rien de rassurant à partager, pas de bonnes nouvelles, pas de plan B, pas de direction à ce jour vers laquelle aller.

J'en arrive à craindre le moment de donner des nouvelles, à éluder les questions, à détourner l'attention - ni vu ni connu, hop, un tour de passe-passe - les plus subtils, les plus aimants me laisseront faire, pas dupes. Je n'appelle personne, en ce moment, et ne réponds pas toujours.

Parce qu'il n'y a pas d'explication simple, de causalité linéaire, de solutions applicables immédiatement, de réponses toutes faites. Parce qu'il n'y a pas d'explication du tout, et que je ne veux pas qu'on m'en donne d'absurdes faute de mieux, ou parce qu'il y en a trop, dont certaines soulèvent une culpabilité aussi démesurée qu'irrationnelle, ou encore une terreur sans nom. Parce qu'aucun bon sens, aucun conseil bien intentionné, aucune consolation ne tiennent ici.

Il est d'ailleurs inexact que cette terreur est sans nom. Elle en a plusieurs, qui tous ramènent à la mort. Il n'y a pas de conseils lorsque l'on fait face à son enfant et qu'il se déclare inapte à la vie. Je ne veux pas être consolée : cette peine-là est inconsolable.

Il n'y a pas de mots pour dire ce qui circule, se dépose, dans cette intimité entre parent et enfant, des angoisses de mort, de l'abandon de soi, de la vie qui s'épuise, de l'impuissance réciproque. Même pas les mots qui pourraient se dire lors d'une maladie du corps, d'une longue ré-éducation, d'un protocole de soins fût-il douloureux.

Je voudrais être rassurée ; mais cette angoisse-là ne peut être apaisée par les chemins habituels : elle s'imprime à même le corps, un nuage noir, un combat silencieux mais constant contre l'appréhension de l’irréversible. Et qui voudrait entendre parler de cela ? Personne, même pas moi.

Passé les premières semaines, les premiers mois maintenant, il n'y a plus l'idée d'un "bientôt", mais la lente acceptation qu'il faudra du temps, et que ce temps n'est pas quantifiable encore. Une course de fond dont l'arrivée n'en finit plus de s'éloigner.

Il n'y a pas de mots non plus pour la colère, pour la révolte - non je ne m'habitue pas, non je n'accepte pas, je me refuse, je nous refuse à la résignation, à la fatalité, à la chronicité. Oui, malgré mon infini respect pour le travail accompli par l'hôpital, je m'interroge sur les limites, les points aveugles, les dangers collatéraux de notre système de soins. Qui sont loin de n'être qu'imaginaires : la confrontation dans la durée à la souffrance des autres, l'accès à des toxiques divers (y compris à la toxicité légale des traitements), les étayages réciproques entre grands blessés de l'âme - avec quelles conséquences ?

Je sais que je tiens relativement bien la barre (et aussi le vent...). Je m'accorde ce crédit-là. Je me fais même confiance pour continuer à le faire. Parce que je n'envisage pas de faire autrement, de ne pas tout tenter ; et parce que je suis portée aussi par ce projet simultané de construction réelle et symbolique, par la possibilité de nous imaginer un avenir. Mais je sais, je sais qu'il ne me faut pas trop parler...

Et puis, se taire permet de ne pas trop pleurer.

07 décembre 2017

Un toit sur la tête

Ca y est, on a les clés...


...c'est tout le bonheur que je nous souhaite !..

03 décembre 2017

En-chant-ées !

Ca fait vingt-cinq ou trente ans qu'on chante ensemble. Pour les fêtes, à la maison, en voiture, en chorale... Alors quand j'ai franchi le pas cette année de prendre enfin des cours de chant individuels, très vite j'ai eu ce fantasme d'un atelier de copines, unique ou à renouveler, de partager ce plaisir.  Check !

Quoi de mieux qu'un dimanche de décembre, avec du thé et un cake au citron maison, pour se lancer ?Ensemble sur le kitschissime (et réjouissant) Mr Sandman, en solo sur Camille, en duo sur Maurane/Fabian, on a tâtonné, rigolé, soufflé, et c'était chouette et joyeux, soutenu par Elsa, ma prof, dont j'adore décidément la pédagogie, la bonne humeur et la capacité d'adaptation. Cerise sur le gâteau, Marco et Emilie, de passage à Paris, nous ont accompagnées sur un tonique Mourir sur scène pour clore notre après-midi - lâchage général :-) !

Je nous rêvais en Puppini Sisters, en Brigitte, en Chordettes, finalement c'est plus difficile que prévu, mais ça n'a aucune espèce d'importance, on s'est régalées, on a envie de poursuivre l'expérience, en solo, en duo ou à plus, et c'est tout ce qui compte. 

01 décembre 2017

Ex Anima

Présenté comme l'ultime spectacle par Bartabas - de fait, quand on est passé du joyeux et foisonnant bordel tzigane des premiers cabarets équestres à ce degré d'épure et de beauté, que peut-on encore ajouter - à part le silence ? Les cavaliers se sont effacés, c'est à peine si on reconnaît le maître des lieux parmi les silhouettes vêtues de noir qui viennent saluer à la fin - ne restent que les animaux, âmes incarnées, ex anima - la vie, la liberté, l'humour, ce sont les chevaux qui les portent - avec une grâce infinie. Un hommage au dieu Cheval, dédramatisé par le burlesque d'une ultime saillie.


Un hymne à l'amour entre les chevaux et les hommes - quelle invraisemblable confiance réciproque pour rendre ces tableaux possibles à partir de si peu - un geste dans l'ombre, un son récurrent, un encouragement discret - et de tant - la complicité avec l’animal qui se tisse jour après jour, un travail  respectueux et infiniment patient qui ne connaît pas de dimanches. Un hymne à l'amour entre les bêtes aussi, joueuses, taquines, amoureuses, féroces parfois, puisque leur liberté permet le coup de sabot, la morsure esquissée.

Bartabas convoque en moi l'émerveillement de l'enfant devant tant de beauté, et le plaisir de l'adulte tant les tableaux qui se succèdent viennent parler directement à une mémoire collective - à peine a-t-on le temps de voir passer l'ombre d'un tableau, l'écho d'une scène de film, le clin d'oeil à un spectacle précédent que déjà il nous emporte ailleurs, propose un autre rêve.

Quelques moments forts : deux chevaux d'écume irréellement blancs au rythme des vagues qui enflent et déferlent - des chevaux devenus vagues, devenus mer...

Un champ de bataille où gisent hommes et chevaux, la sauvagerie des hommes bientôt éclipsée par la nature qui reprend ses droits - devant la salle médusée et les chevaux allongés, impassibles, des loups traversent la piste, dévorent les cadavres, et s'en vont.

Angelo le bien nommé, immense cheval de trait noir qui dessine patiemment un jardin zen, accueille une famille de colombes sur son large dos et plus tard s'envole au sommet du chapiteau de bois, placide et bienveillant.


Bartabas c'est un mythe, le créateur d'un monde-unique-au-monde ; un rugueux, un solitaire, un bourreau de travail, un homme à la culture aussi vaste que non-académique, un jusqu'au-boutiste, un fou. Je ne sais si l'homme ressemble à la légende qu'il s'est forgée. Mais je le crois, j'ai envie de le croire, parce que l'idée que de tels hommes existent éclaire le monde.

Ce serait bien dans sa manière, de tenir parole et de disparaître sur ce mystère... une sortie qui cultiverait une fois encore le paradoxe, humilité et panache, pour galoper vers d'autres horizons.

Mais je ne peux pas me faire à l'idée que ce lieu enchanté disparaisse, et je voulais tellement en garder quelque chose... je me suis laissée tenter par le coffret DVD qui reprend tous les spectacles à l'exception du dernier. Ca ne remplacera jamais le spectacle vivant, la spiritualité, la poésie et le tragique qui émanent de ces rendez-vous depuis trente ans ; mais c'est un caillou de Petit Poucet, à l'instar de cette spectatrice partie avec une poignée du sable noir de la piste.