31 décembre 2006

Tout est bien qui finit bien

Un Noël au coin du feu, 70 bougies soufflées dans une atmosphère familiale paisible. Des enfants couverts de cadeaux (Et toi Elsa, c'est quoi ton cadeau préféré ? Celui que le Père Noël a laissé tomber de son traîneau et qu'on a retrouvé dehors...), et des adultes aux attentions délicates.

Trois jours de vie de château, à naviguer entre la piscine intérieure, le jacuzzi et le hammam, les grands crus et les repas raffinés, et le réveillon trio de cordes, cantatrice ET improbables cotillons. Le 1er janvier 2007 après minuit, où étiez-vous ? Dans une piscine couverte, à regarder à travers la verrière les convives s'agiter sur la piste de danse, sans autre son que celui de l'eau.

24 décembre 2006

Oedipe joyeux

David se lève, Léo saute dans notre lit : - J’te remplace Papa !
David, en descendant l’escalier : - Va te faire foutre Œdipe !
Léo : - Toi aussi !
(plus bas, à sa mère et avec un grand sourire :
- Je sais que je ne devrais pas dire ça…)

Juliette des esprits

"Nous sommes deux... au minimum ! D'un côté, il y a Gréco, la statue, et de l'autre, moi, Juliette, toute petite. J'ai quelque chose d'intact à l'intérieur de moi : l'enfance."
"Je suis profondément femme, avec tout ce que cela comporte de jeu."
"Je ne sais pas ce que veut dire nostalgie. Je n'ai jamais su et je ne pense pas que je vais apprendre. J'espère ne pas en avoir le temps."

Juliette Gréco, qui à presque 80 ans vient de sortir un album de reprises sensuelles et malicieuses, une leçon de féminité et d'intelligence intactes.

23 décembre 2006

Un pas après l'autre

"Mes premières chaussures de tango achetées... la semaine dernière. Enfant, je rêvais beaucoup et j'avais peur de rien. Ado, j'ai découvert que ça allait être beaucoup plus court et beaucoup plus dur que prévu et j'ai lâché beaucoup de rêves. Et puis un jour, adulte (ah ah ah ah... enfin bref) j'ai regardé derrière moi et j'ai vu ces choses si précieuses si loin. J'ai vu comme il était facile de passer à côté de soi-même. Je suis en train de réapprendre à marcher, c'est si bon !!!"

20 décembre 2006

Rats de bibliothèque

Ce matin, nous lisons l'histoire de Ferdinand l'attrapeur d'histoires - dans ce pays, on lit des histoires pour se réveiller, des histoires pour s'endormir, Léo dit, "C'est comme chez nous !". Dans la même fournée de livres de la bibliothèque, l'excellent Château d'Anne Hiversère, et le plaisir de constater que les enfants connaissent une large majorité des personnages de la littérature enfantine représentés dans l'hilarante page des invités.

18 décembre 2006

Petites phrases

"- Maman toi t'es pas vraiment une adulte !
- ???
- Parce que, tu as des parents."
Elsa, psychanalyste en herbe

"- Nous sommes issus de la haute bourgeoisie. Nous excellons dans l'art d'ignorer l'éléphant qui se trouve dans la pièce."
Bree van der Kamp, philosophe du XXIème siècle

16 décembre 2006

Juste une illusion

La nuit, Greenson retrouva un souvenir mêlé d'angoisse. C'était il y a longtemps. Un soir qu'il avait réuni quelques disciples, le maître avait abordé la question de la fin du transfert. Il employait un mot étrange : dissolution et expliquait qu'on ne se détache d'un patient, comme dans la vie on ne se détache d'une personne, qu'en s'attachant ailleurs, à un autre être ou à une partie du même être. "Aussi longtemps qu'on vit et qu'on désire, disait Freud, on ne fait que troquer une prise contre l'autre, changer d'emprise." Et il avait ajouté, pour ôter aux disciples recueillis leurs dernières illusions : "Se dire qu'il s'agit de méprises ne sert qu'à en commettre de nouvelles."
Michel Schneider, Marilyn dernières séances

15 décembre 2006

Variation

Nougaro sauce Elsa : "Ah tu verras tu verras tout recommencera tu verras tu verras La vie c'est fait pour TOI tu verras tu verras..."
Et voilà - c'est tout elle.

13 décembre 2006

Durs et tendres

Ils ont entre 16 et 18 ans, élèves de lycée professionnel - déjà hors des rails scolaires officiels. Ils ont une tête ou deux de plus que moi, et possiblement plus d'expérience - en tous cas un vécu qui m'est étranger. Mais - à la différence des petits garçons ricaneurs des beaux collèges parisiens, ils abandonnent très vite les provocations d'usage dans ces interventions sur la sexualité pour aborder des questions de fond : moi, ce que je voudrais savoir, c'est comment on peut être vraiment sûr qu'on aime quelqu'un... (Ben mon p'tit gars, si t'as la réponse un jour, fais-moi signe...)

Est-ce que ça nous fait pareil si c'est une fille qu'on n'aime pas ou un garçon qui nous dit je t'aime ? (Il est rare que le débat sur l'homosexualité soit lancé avec autant de douceur.) Est-ce que (quand je baratine une fille pour coucher avec elle) ma parole m'engage vraiment, et jusqu'où ? Mais de toute façon, on ne sait jamais, jusqu'à quand on va aimer quelqu'un ? Est-ce que c'est grave de sortir avec plein de filles sans jamais tomber amoureux (un beau gosse hâbleur mais sincèrement inquiet) ?

Un autre confie, la blessure laissée par la réflexion désobligeante d'une demoiselle sur son anatomie (il en faut, de la confiance dans le groupe, pour oser aborder cela). Un troisième nous fait éclater de rire avec son couplet bien senti sur le porno : d'abord les hommes c'est pas des hommes, c'est du bétail à concours, les acteurs, c'est pas des humains, c'est des Playmobils - et on dit toujours que le porno, ça rabaisse les femmes, mais c'est aussi humiliant pour les hommes, en fait. Eh bien !

Et dans un groupe comme dans l'autre tout le le temps d'aborder de vraies questions autour du plaisir donné, reçu dans ses composantes physiques ET relationnelles - les deux aspects étant amenés par le groupe, ce qui a donné lieu à des discussions riches et souvent émouvantes...

Alors... alors le couplet prévention classique a été peu abordé, hormis la page non pas sur le préservatif, mais sur les freins réels à son usage. Mais j'ai rarement eu autant l'impression d'être au coeur de ma mission : "N'essayons pas de convaincre, contentons-nous de faire réfléchir" (Georges Braque)

11 décembre 2006

Voix off

Quel jour on est c’est quoi aujourd’hui ah oui préparer les babous lait signer le carnet de correspondance faire le chèque de la cantine débarbouiller les frimousses racheter du dentifrice penser à faire le plein du scooter tout à l’heure y plus rien dans l’frigo emmener le sac de docs pour les interventions en lycée quelqu’un a donné à manger au chat ? finir le compte-rendu de séance et tous ces livres inachevés appeler ma grand-mère qu’est-ce qu’on fait pour Noël j’voudrais aller chez le coiffeur attention la route est glissante j’ai froid fais-moi un thé s'il te plaît accueillir cette femme qui porte un enfant ce couple qui ne sait plus cette adolescente qui ne sait pas encore rédiger le rapport de stage une lettre de motivation un billet pour la Care Box vérifier où sont mes priorités qu’est-ce qu’on fait pour les vacances repartir vers l’hôpital le collège l’association du jour accueillir sans déborder l’individu l’équipe la classe c'est à quelle heure qu'on peut rêver ? travailler sur le divan en groupe en supervision ce n’est pas toujours reposant répondre à un mail caler des agendas organiser un dîner se dire ça fait longtemps que je ne l’ai pas vu(e) s’appeler se promettre bientôt ne pas tenir est-ce que c'est bien cette vie-là que je voulais ? chercher un moment pour soi un moment pour l’autre un temps à deux un autre pour les enfants as-tu fait tes devoirs si on faisait un memory un coloriage un collier de perles je n’ai pas le temps viens prendre ton bain pas maintenant finis ton assiette non j’avais dit une histoire pas deux maintenant c’est le temps des adultes lire quelques pages tomber de sommeil sans le trouver – quel jour on est demain ?

Bande originale

Après Marie Cherrier et Claire Diterzi, dans la famille grandes filles impertinentes, je demande, Adrienne Pauly - pas seulement pour le réjouissant et médiatique J'veux un mec, mais aussi pour le grinçant Méchant cafard, le nostalgique L'herbe tendre. Et puis le toujours lyrique, poétique, magnifique, Higelin d'Amor doloroso, avec mention spéciale à J't'aime tel et Se revoir et s'émouvoir, encore que le choix soit difficile aussi entre Prise de Bec, Queue de paon et Crocodaïl - bon, tout l'album en fait, aussi réjouissant et voyageur que Tombé du ciel ou Illicite.

05 décembre 2006

Jardinage

"Si on veut avoir de jolies roses, il faut tailler le rosier ; sélectionner les meilleures branches, se séparer des autres. Faire un choix, exercer sa liberté ... Renoncer c'est grandir. S'il n'y a pas la liberté, on ne renonce pas, on arrache. C'est différent et très douloureux.

Le travail sur la liberté prend du temps. Mais après tout, est-ce très important ? Je crois qu'un bon renoncement est un renoncement qui, finalement, ne coûte rien. C'est pour ça qu'il faut attendre qu'il sonne juste. On le sait, on le sent. On accepte de laisser mourir quelque chose pour laisser grandir autre chose. Et de choisir, librement, d'aller vers un mieux."
Gonzague Masquelier

04 décembre 2006

Portrait craché

18h, je cherche du regard mon Elsa dans la cour de récréation. Un mouflet à lunettes rigolard que je connais pas s'approche : Elle est là ! Ben, comment tu sais que c'est cette petite fille-là que je cherche ? Bah c'est facile rétorque-t-il, elle a presque la même tête que toi !

Aller à l'essentiel

"J'ai découvert que quatre données sont particulièrement pertinentes en matière de psychothérapie : l'aspect inéluctable de la mort, pour chacun de nous et ceux que nous aimons ; la liberté de diriger notre vie comme nous l'entendons ; notre solitude fondamentale ; et enfin, l'absence d'une signification ou d'un sens évident de l'existence. Pour oppressantes que soient ces données, elles contiennent les germes de la sagesse et de la rédemption. (...)
Nous ne pouvons leur dire : il s'agit de vous et de vos problèmes. Nous devons au contraire parler de nous et de nos problèmes, car notre vie, notre existence, sera toujours rivée à la mort, l'amour à la perte, la liberté à la peur, et la maturité à la séparation. Nous sommes tous engagés dans la même épreuve."

Irvin D. Yalom, Le bourreau de l'amour, histoires de psychothérapies