25 décembre 2008

Générations

Noël cette année est né d'une envie d'autrement - un repas comme nous le rêvions, une table de fête, ne plus être invités mais inviter à notre tour, mélanger les générations, élargir le premier cercle de famille. Les choses se sont faites toutes seules - sans crises et sans souci - des invités heureux, complètant notre menu sans même qu'il soit besoin de se concerter, une table lumineuse décorée de sablés étoiles au chocolat faits maison, les cousins du Sud invités inattendus - un Noël juste parfait. Une réflexion de ma petite grand-mère, attrapée au vol : Maintenant, c'est leur tour ! Voilà. Exactement. Et, parce que nous étions si fiers de ce que nous avions réussi à préparer, le partager ici :

Amuse-bouche :
Boudinets de homard en gelée
Foie gras au chocolat blanc et sa brioche toastée

***********
Carpaccio de Saint-Jacques aux baies roses
Lotte au vin rouge et aux épices
Brie de Meaux et sa salade
Tatin d’ananas frais et sa glace au caramel au beurre salé

Café et truffes maison

21 décembre 2008

Coup de foudre

Je l'avais croisé chez Lantoine, et puis je l'ai souvent entendu citer par les uns et les autres comme un maître-poète, comme une perle rare. J'ai découvert Allain Leprest - Ferré contemporain, frère d'âme de Léotard, fils spirituel de Brassens... La voix est rocailleuse et tendre, les mélodies superbes, et les textes sont simplement magnifiques.

Gens que j'aime
Qui se partagent, qui se livrent,
Qui se lisent comme des livres,
Qui dorment sans drap sur le cœur
Gens que j'aime me sont restés
De tous les chemins traversés
Sans le moindre aveu décousu
Et n'en eurent jamais raison
Le vent ni sa gifle traîtresse
Ou ses feuilles moche saison (...)

ou encore

Nu, j'ai vécu nu
Naufragé de naissance
Sur l'île de Malenfance
Dont nul n'est revenu
Nu, j'ai vécu nu
Dans des vignes sauvages
Nourri de vin d'orage
Et de corsages émus (...)
Nu, j'ai vécu nu
Sur le fil de mes songes
Les tissus de mensonges
Mon destin biscornu
Mais nu, je continue
Mon chemin de tempête
En gueulant à tue-tête
La chanson des canuts
Nu, j'avance nu
Dépouillé de mon ombre
J'voulais pas être un nombre
Je le suis devenu
Nu, j'ai vécu nu
Aux quatre coins des gares
Clandestin d'une histoire
Qui n'a plus d'avenue (...)

19 décembre 2008

Lulu Quichotte

J'ai un drôle de nouveau métier. Avocat du diable, ça pourrait s'appeler. Ou grain de sable dans les rouages. Ou médiatrice - comme la droite qui coupe en deux, ou relie, c'est selon. Dans l'état actuel des choses, ça consiste à rencontrer des gamins - aussi des gamines - mais plutôt des gamins - qui dérangent. Et à leur faire comprendre que mon rôle n'est pas de les remettre au pas, ou d'être la main de fer dans un gant de velours, mais de voir avec eux comment ils peuvent trouver leur place dans une institution à laquelle ils sont bien mal adaptés - à moins que ce ne soit le contraire - l'école. Le collège, très exactement.

Un collège qui se soucie d'eux assez pour leur offrir cette échappée belle, un espace de parole ; mais qui se doit aussi de conduire à bon port celles de ses brebis qui ne sont pas égarées, et de ménager ses bergers.

Je rêve d'une école où l'exclusion, temporaire ou définitive, ne soit pas la seule réponse possible ; ne soit pas le précurseur de l'exclusion sociale, quand elle n'en est pas le prolongement, l'histoire ayant tendance à se répéter. Les mômes rigolent : "La dernière fois que j'étais en vacances..." - mais il n'y a rien de drôle. J'ai appris récemment que les "exclus" étaient supposés aller travailler dans des centres plus ou moins fermés le temps de leur sanction (plutôt que d'être avachis devant la télé). Soit ; mais je ne peux m'empêcher d'y voir un avant-goût des comparatifs entre centres de détention (d'autant qu'au rythme où vont les choses, ils pourront bientôt y être à l'âge de la scolarité, en effet).

J'ai eu une discussion tout à fait intéressante avec un minot sur le terme de "récidive" ; les copains, les grands frères de la cité vivant généralement de petits ou gros trafics, ils ont généralement fait quelques allers-retours devant les tribunaux. Aussi le terme de récidive en milieu scolaire, pour des retards ou des cours perturbés, les fait sourire. Un peu étonnés, pas de mauvaise volonté, mais... quand dehors c'est la jungle, il est parfois bien difficile de comprendre la violence des réactions institutionnelles devant ce qui reste, bien souvent, des enfantillages... Bien difficile aussi de se contenir, quand l'élaboration psychique, même rudimentaire, fait défaut.

Celui-ci avait un sourire de gosse espiègle, mais aussi la conscience de ceci : se mettre en situation d'être exclu à l'âge de la fin de l'obligation scolaire, c'est un aller simple pour la rue... Derrière le gosse espiègle, se cache un adolescent en colère - qui a déjà fait les frais de cette violence à fleur de peau ; et derrière l'adolescent en colère, se cache un môme qui a peur - de n'être pas capable, de ne jamais trouver sa place, ou de ne pas en avoir...

Charge à moi de trouver les mots - d'eux à eux-mêmes, et d'eux-mêmes à l'institution ; de faire des ponts, d'inventer des accords, que les différentes parties puissent accepter sans avoir l'impression de s'y perdre... De la clinique expérimentale, aux résultats incertains ; mais la chance de pouvoir tenter ce genre de pari, c'est déjà beau...

16 décembre 2008

Coup de grâce

Repas de fin d'année dans l'équipe que je quitte, je défends Les bureaux de Dieu contre celle de nos médecins qui s'est quand même donné la peine de le voir - mais qui le trouve trop parcellaire, et médicalement erroné sur certains points - quand sa collègue lâche "Bah, de toute façon, ça n'intéresse pas grand-monde ce genre de sujet...".

Rappelez-moi où nous travaillons ? C'est sûr, quand on travaille pour son argent de poche parce que Monsieur est chef de clinique ailleurs, avant de rentrer dans sa petite maison à deux pas du Parc de Sceaux, évidemment...

Voilà. C'est pour cela, que je n'irai plus travailler là. Pour ne plus entendre la mère de cinq enfants blancs et catholiques reprocher à l'africaine sa cinquième grossesse. Pour ne plus entendre des réflexions désobligeantes sur l'hygiène approximative des patientes qui vivent dans des squats. Ou sur les possibilités intellectuelles ou les habitudes alimentaires de gamines qui se sont élevées pour la plupart toutes seules, comme elles ont pu. Elles n'ont qu'à se lever tôt (elles aussi), et se préparer des légumes frais. Ben voyons.

Voilà. C'est aussi pour cela, que je pars.

12 décembre 2008

Tunnel

Au bout il y a - de vraies vacances, une ré-organisation du temps de travail qui ouvrira à une vraie disponibilité pour de nouveaux projets, un horizon qui se dégage. Mais pour le moment, c'est plutôt une longue traversée du désert, avec quelques oasis...

Deux journées co-animées qui ont été un régal d'intelligence complémentaire et de connivence. Les clés d'un nouvel espace pour travailler, prendre mon envol dans une activité autonome, sous la protection d'une bonne fée ;-). Un hammam à partager. Une démission libératrice, deux propositions professionnelles, le luxe de refuser l'une et de s'offrir le temps de réfléchir à l'autre. Une invitation à boire le champagne, qui se termine autour d'oeufs brouillés à la truffe de Cairanne. Faire découvrir les Fanfans à Léo - ma boutique secrète spéciale cadeaux d'anniversaire et tours de magie. Madagascar 2 ! De l'amitié qui fait chaud au coeur - un pub du dimanche soir, des retrouvailles après plusieurs années d'absence, un quatuor de choc ce mercredi - et un "anniversaire-Noël" !

10 décembre 2008

Friendship

La brise faisait voler leurs cheveux dans la même direction ; à les voir ainsi, on eût dit des inséparables, appartenant tous au même petit clan. Mais je savais combien d'hésitations, combien de questionnements recelaient leurs rapports entre eux et avec moi. Et je ne les en aimais que davantage : chacun avait beau se débattre contre ses problèmes, ils étaient tous généreux, tous partants pour faire la fête avec moi. (...) J'étais émue de nous voir dans l'âge mûr bien plus que je ne l'aurais été par nos jeunes personnes. Je trouvais merveilleux que nous nous soyons arrachés à nos vies respectives pour nous rassembler au sommet de cette colline sans aucun but pratique, juste par amitié. Et bien sûr, j'ai eu la larme à l'oeil quand ils m'ont chanté "Happy Birthday, Rosie."."

Nuala O'Faolain, Best Love Rosie

Bonnes questions

Qui ose dire qu'il peut m'apprendre les sentiments
Ou me montrer ce qu'il faut faire pour être grand
Qui peut changer ce que je porte dans mon sang ?
Qui a le droit de m'interdire d'être vivant
De quel côté se trouvent les bons et les méchants
Leurs Evangiles ont fait de moi un non-croyant...


Entendu au Sancerre un mercredi soir.

30 novembre 2008

Je t'aime

Il y a tant de façons d’aimer… Je t’aime comme celui qui marche à mes côtés. Je t’aime comme celle qui m’accompagne depuis si longtemps. Je t’aime comme le frère que je n’ai pas eu. Je t’aime parce que nous sommes témoins de nos vies depuis toujours, ou presque. Je t’aime pour le rire et la légèreté, je t’aime pour la gravité attentive, je t’aime parce que nous sommes si différents, je t’aime parce que nous sommes trop semblables. Je t’aime parce que j’aurais aimé t’aimer. Je t’aime parce que tu es comme une sœur pour moi. Je t’aime parce que je peux compter sur toi, et que tu peux compter sur moi. Je t’aime parce que ton souvenir chante en moi, quand bien même nous ne nous reverrions jamais. Je t’aime parce que j’aime rire, ou danser, ou chanter avec toi. Je t’aime pour l’odeur de ta peau. Je t’aime parce que je me sens moi avec toi, que je sois triste ou bien heureuse. Je t’aime parce que je t’ai choisi(e), parce que tu appartiens à ma famille de cœur – et peu importent ton âge ou ton sexe. Je t’aime parce que j’aime aimer – ou parce que j’aime être aimée comme tu m’aimes. Je t’aime d’amour, d’amitié, de désir impossible ou satisfait, de tendresse, de complicité, de différence et de complémentarité. Je t'aime parce que je ne connais pas d'autre façon d'être vivante. Dans une église l'autre jour, une phrase de Soeur Emmanuelle : Si tu veux vivre, tu dois aimer.

29 novembre 2008

Happy Birthday


28 novembre 2008

Le Secret

Prenez juste un dicton. "Aide-toi, le ciel t'aidera". Développez un peu mais pas trop, avec une poignée d'idées. 1/ Si vous voulez un truc, demandez. 2/ Soyez attentif à la réponse qui risque de venir. 3/ Vous avez obtenu ce que vous désirez : remerciez. C'est tout. Ça s'appelle "Le Secret" et c'est un gros succès. Je suis un peu jaloux, car j'aurai dû y penser avant :-)

Ce "secret" a bien des avantages, dont le premier est de ne pas chercher la source. Avant, les hommes aimaient bien savoir qu'on s'occupe d'eux, là haut. Le Dieu Local (Bouddha si vous êtes en Orient, Dieu le Père si vous êtes en Europe, etc) ou votre Ange, vos Ancêtres (majuscules partout, attention) et tralala. Ici, on se moque de savoir qui vous aide, c'est pas mal, car ça recentre (un peu) le boulot sur vous. Ça demande à ce que vous soyiez attentif. Et puis ça décomplexe le demandeur de l'utilitarisme de ses questions. On hésiterait à demander une place de parking libre à Jésus, mais pas au Secret. Hop ! Une place libre !

Maintenant, je ne peux m'empêcher d'imaginer les gens qui deviennent intégristes de ce truc, et qui donc interprètent TOUT ce qui leur arrive comme étant des SIGNES envoyés de là-haut pour vous indiquer la "marche à suivre". Là ! Nous voici bien en enfer. Il suffit de développer un peu. De se mettre, pour de rire, à la place d'une telle personne...

Jean-Pascal

27 novembre 2008

Epuisement

Je la connais déjà, elle n'a pas encore seize ans, une beauté à la Noémie Lenoir, un bébé de six mois - le père ne l'a pas reconnu, il est bien plus âgé et a déjà une famille - elle a maintenant un amoureux de son âge, des cycles irréguliers depuis son accouchement, une histoire de famille impossible évidemment - elle a réussi à rester scolarisée cependant - et elle est à nouveau enceinte. Lorsque je le lui annonce, elle fond en larmes. Je contacte directement l'hôpital en l'imposant comme absolument prioritaire, lui demande si elle sait comment y aller - oui, son bébé est suivi là-bas pour une drépanocytose, maladie sanguine qui entraîne notamment des infections pulmonaires chez les tout-petits... STOP. Trop de misères sans issue, trop d'histoires différentes et trop semblables, trop peu de moyens, trop peu d'équipe ici pour penser, contenir, accompagner ensemble...

26 novembre 2008

Matière à réflexion

Tout le monde a enflé cette idée qu'il faut avoir une bonne opinion des gens, aimer les gens. Dans cette vie, on se retrouve jeté parmi des individus, et dans la plupart des cas on n'a pas eu son mot à dire - ses parents, ses enfants, la personne de qui on a eu la chance étrange de tomber amoureux, peut-être un ami ou deux - et voilà les gens qu'il est de notre devoir d'aimer parce que ce sont les gens qui nous appartiennent. Il n'est pas nécessaire de les apprécier ou de les admirer ou d'avoir une bonne opinion d'eux. Si l'amour en dépendait, quelle valeur aurait-il ? (...) Tu aimais ta mère et tu as rempli ton devoir envers elle, et c'est tout ce qu'on peut raisonnablement attendre d'un être humain. On regarde autour de soi et on détermine qui nous appartient, et puis on agit en conséquence. Le reste n'est pas de notre ressort.

Glenn Savan, White Palace

25 novembre 2008

Délices et... orgues

J'ai accompagné la classe de Léo au Conservatoire de Paris voir un spectacle de percussions autour des musiques de films. Nous parlons des instruments rares que nous avons observé - le marimba, les cloches - quand Elsa dit : C'est quoi déjà celui avec les grands tuyaux qui crachent la musique ?

22 novembre 2008

Secret

« Freud évoque cette nécessaire préservation d’un espace de secret inavouable à soi-même. Ce secret inavouable n’est pas seulement celui qui constitue la culpabilité : il est aussi l’inaccessible à soi-même, la face négative du Soi, l’irréductible contreface de silence dans la parole. C’est seulement la présence d’un tiers détaché – pervers – qui porterait atteinte à « l’unité de la personnalité » et à « l’autonomie sociale de la personne ». (…) divisé entre la nécessité de préserver ce noyau secret pour être et penser, et celle de livrer son intime inaccessible aux autres, le sujet pourrait n’avoir d’autre ressource que le clivage, l’acting ou le faux. Ce serait alors l’investissement de la règle par le surmoi archaïque cruel qui serait ici en cause. L’énoncé de la règle fondamentale dans les groupes (…) ne peut exprimer une telle exigence de dire absolument, coûte que coûte ».

20 novembre 2008

...mon semblable, mon frère !

Chez Léa, bistrot de quartier en bas de la rue Claude Bernard qui nous faisait de l'oeil depuis un moment. La clientèle est mélangée, habitués, bobos de passage, petits groupes au fur et à mesure que la soirée s'avance, la déco est sympa, le service aussi - et les petits verres de Terre d'Antan, un sympathique Côtes du Ventoux se succèdent.

Assis au bar, nous bénéficions d'un poste d'observation imprenable sur le jeune barman qui "essuie les verres au fond du café", comme dans la chanson, si ce n'est qu'il marmonne en même temps des choses incompréhensibles tout en jetant des coups d'oeil fréquents sous le comptoir.

Pris en flag', il se trouble : "Mais non je ne parle pas tout seul !", puis nous explique, avec l'humilité déconcertante de qui n'est pas familiarisé avec cette littérature - il aspire à devenir comédien, un habitué lui a suggéré, pour faire travailler sa mémoire et parce qu'il aime la poésie, de travailler Les Fleurs du Mal, aussi, après La servante au grand coeur, et Correspondances, il est en train d'apprendre Au lecteur. Minute de connivence improbable entre l'apprenti comédien et les clients inconnus mais amoureux des mots que nous sommes...

19 novembre 2008

Pas si TOC

Il ressentit une sorte de satisfaction nerveuse à constater que son principal grief contre la réalité se trouvait une fois de plus confirmé par la réalité elle-même : rien ne restait immobile. Dès que vous tourniez le dos, quelque chose avait pourri, s'était cassé, ou avait carrément disparu. Dans un univers auquel on ne pouvait se fier, qui pouvait, comme un rien, à tout moment, vous exploser au nez comme une bombe, il fallait se tailler son propre ilôt d'ordre et de contrôle, si aribitraire, si illusoire qu'il fût, pour vivre, tout simplement. (...) il prit le temps d'arroser son philodendron, d'épousseter sa table basse et, grâce à ces tâches rituelles, de prétendre tenir le chaos en échec.

Glenn Savan, White Palace

Ouvertures

Grâce à Cy-Real, nous avons découvert le délicieux album pour enfants, Les cartes de ma vie. Toute la famille s'est donc mise à dessiner qui une carte de son coeur, qui une carte de son chat, et pour ce qui me concerne, une carte de ce qui me rend heureuse. La liste est longue ; ce dont j'avais envie de parler dans ce billet, c'est du contact avec l'art sous toutes ses formes. Le concert de Rokia Traoré, vendredi ; emmener les enfants voir l'exposition Nés pour sentir au Palais de la Découverte (souvenirs, souvenirs...) ; me faire offrir pour mon anniversaire l'album qu'Hélène Grimaud vient de consacrer à Bach ; les livres, toujours ; et pour les lecteurs parents, un autre bon tuyau, la reprise au Studio des Champs-Elysées d'Amnesia, délicieuse comédie musicale pour les enfants, que Léo et Elsa connaissent aujourd'hui par coeur.

18 novembre 2008

Génétique

Elsa : "Les mamans ça fait qu'on naît (sic) mais c'est la nature qui dit comment on est."

13 novembre 2008

Trousse de secours

Un prof de taï-chi m'a dit un jour: "Nous ne sommes jamais seuls. Nous sommes toujours entre le ciel et la terre, quoi qu'il arrive." Je pense souvent à cette phrase et je sens l'énergie du ciel et de la terre se rejoindre en moi et me chauffer le coeur.

Isabelle

Peut être : sois douce pour les autres et vivante pour toi et puis moins sérieusement et au moins au 3ème degré, une phrase que Guy aimait bien et qui peut être un bon outil : "Qu'est ce que je ferais si j' étais moins con ?"

Marion

10 novembre 2008

La Honte

Elsa encourage son papa à accélérer en voiture : "Vas-y Papa balance la sauce !" Trop classe...
David reproche à Elsa sa consommation de BN : "Oui Papa j't'ai niqué la moitié de ton paquet !". Mais Elsa tu savais que c'est un gros mot ? Ben non, j'savais pas...

05 novembre 2008

Les dames de mon quartier

En complément au post Silhouettes, cette magnifique chanson d'Anne Sylvestre :

Les dames de mon quartier
De mon quartier d'orange
Jamais ne se mélangent
Aux familles d'à côté
Sur leur dos attaché
Un drôle de petit ange
Dort sans qu'on le dérange
Les pieds bien écartés
Elles sont environnées
D'une belle marmaille
Un peu de toutes les tailles
Aux cheveux bien nattés
De leur pas chaloupé
On attendrait qu'elles aillent
Marcher dans les broussailles
Au lieu de ces pavés

Les dames de mon quartier
Quartier de pamplemousse
Elles ont la peau si douce
Qu'on dirait de la soie
Et leur décolleté
Que l'épaule repousse
Parfois nous éclabousse
Quand elles se déploient
Quelques bijoux dorés
Eclairent leur visage
Parfois un tatouage
Met une ombre bleutée
Qu'elles ont rapporté
De leur lointain village
Pour vivre dans des cages
Sans rien à regretter

Les dames de mon quartier
De mon quartier de mangue
Quand elles montrent la langue
On dirait un rosier
Mais brève est leur gaité
Quand le rire s'étrangle
En silence elle tanguent
Rejoindre leur clapier
Ignorant les passants
Leurs petits à la traîne
Marchant comme des reines
Et le regard absent
Elles savent que les attend
Semaine après semaine
La chambre déjà pleine
Et le prochain enfant

Les dames de mon quartier
De mon quartier de lune
Je n'en connais aucune
Mais je peux bien rêver
Les avoir rencontrées
Au détour d'une dune
A l'épaule chacune
Une cruche à porter
Remplie aux sources oubliées

04 novembre 2008

Grongron

Loupé. Y a des jours comme ça... Une patiente déjà vue pour IVG l'année dernière, pour la même raison ce matin, modalités de contact identiques aux précédentes - agressive, dévalorisante, attaquante, mise en échec systématique de chacune des mes interventions, fuite en avant dans l'agir - un tir de barrage en continu... Je me suis laissée agacer. Et je suis passée à côté. J'ai compris, mais trop tard. Que la colère pouvait se dire : Une part de moi est furieuse et bouleversée de renoncer à cette grossesse, qui sera peut-être la dernière. Qu'au-delà de la pathologie par ailleurs manifeste (border-line ?), il y avait bien un (tir de) barrage. Elle avait déjà la main sur la porte, je l'ai arrêtée pour le lui dire. Elle a fondu en larmes - mais elle a fui tout de même...

01 novembre 2008

Droit au coeur

"Aux chemins de la vie, l'obstacle lui-même devient signe, pour qui accepte de l'inclure dans la perspective qui le définit et le dépasse." Eliane Lamy-Valensi

"Tu m'offres une belle cocasion d'agir au lieu de rétro-fléchir ou réfléchir trop. Tu es vraiment la belle et grande personne que je pensais. Yes, you can!" Fabrice
PS : (J'ai laissé le lapsus de clavier sur la cocasion, il est trop beau !)

30 octobre 2008

Silhouettes

Ce qui me plaît dans ce métier, c'est la rencontre toujours renouvelée de la singularité de chacun. Pourtant, avec l'expérience, se dessinent dans les consultations quelques silhouettes récurrentes...

Celle de la gamine de quinze ans, stressée par un risque qu'elle n'a pas pris, mais qui vient témoigner là de ce bouleversement qu'est le moment de la première fois - découverte de soi, de l'autre, sensation de grandir d'un coup, d'une soudaine séparation psychique d'avec les parents - Il n'a pas vu que tu pleurais - l'enfance qui s'en allait...

Celle des couples qui se déchirent, parce que cette nécessaire séparation, ne s'est jamais achevée. Alors, faute de mots, les rivalités et les haines éclatent, parfois culturellement exprimées (maraboutage, sorcellerie), les clivages font rage, on hait l'autre parce qu'il est bambara alors qu'on est soninké - on hait l'autre surtout parce qu'il est autre, et la famille (qui a pourtant souvent décidé du mariage) ré-intègre celui ou celle qui avait pensé pouvoir s'en différencier...

Celle de la femme africaine qui va se préparer à accueillir un enfant de plus - dans des conditions matérielles et psychiques qui dépasseraient n'importe quelle occidentale - pour rien, sans envie, sans désir, parce que Dieu le lui a envoyé, parce que son mari le veut, sinon il prendra une co-épouse, puisque la virilité se mesure au nombre des enfants, parce que la contraception est trop chère ou bien trop compliquée, parce que le qu'en dira-t-on, parce qu'elle n'est ni sera rien d'autre, qu'une mère - ça m'occupera, dit-elle...

Menus plaisirs

Un anniversaire d'enfant qui se termine en dîner improvisé d'adultes, trip nostalgie des dessins animés des années 80 à la clé. Un spectacle de magie avec les enfants sur scène, médusés de voir apparaître et disparaître dans leurs mains pièces de monnaie et balles de mousse. Un repas de famille chaleureux. 1h30 de massage chinois. L'excellent Mamma mia !, directement promu au rang de film culte. Un sympathique bar à vins. Un tartare parfait (Le spécial, au Daguerre, rue Daguerre).

22 octobre 2008

Ouf que...

...comme dirait Zaza. Ouf que des fois, dans mes consultations, il y a un peu d'espoir.

Cet après-midi, deux mini-minettes complices et futées, les pieds sur terre, avec lesquelles aller plus loin que le kit de survie indispensable - pouvoir aborder tranquillement les relations avec les parents, la place de la sexualité dans leur relation avec le petit copain, et même, mais si, leur propre désir. Ce qui va de soi pour nous, mais qui est si rarement possible dans ces rencontres... Bon, d'accord - elles ont quatorze et quinze ans - et la plus jeune a des relations sexuelles depuis plus d'un an (et 5 ans de différence avec Léo). Mais... elles vont bien. Vraiment.

Et une autre mineure - 17 ans, entretien pré-IVG - qui dit, je ne veux pas mettre un enfant au monde maintenant, parce que je sais ce que c'est, être dans l'incapacité d'élever un enfant. Elle a été placée à 9 mois... mais dans une famille d'accueil qui l'élève depuis - pas de ruptures ni de déplacements "sauvages", une famille aimante, dans laquelle elle a été traitée comme une petite dernière qui a manifestement reçu une éducation, aimante, structurante - bref - un plaidoyer pour l'option familles d'accueil, pourvu que celles-ci aillent suffisamment bien pour pouvoir jouer ce rôle essentiel d'accompagnement et de réparation qui est le leur... Ouf qu'il y a aussi des familles comme ça, et des mômes qui s'en sortent.

Il y a quelques années, j'avais écrit, pour ces familles... Imaginez un métier qui vous confronterait, 24 heures sur 24, à l'impossible. Un métier qui consisterait à accueillir dans votre propre foyer des enfants aux vies chaotiques, aux problématiques insolubles. A accueillir pour un week-end, un mois, un an, vingt ans - sans pouvoir le prévoir - des enfants dont vous ne sauriez rien, ou si peu, devinant l'impensable derrière leurs comportements erratiques, leurs blessures mal cicatrisées.

Un métier sans appuis logistiques, sans bagages théoriques - rien d'autre que votre propre cœur et votre propre histoire - votre volonté fondamentale de prendre soin. Un métier de longue patience et d'amour au quotidien ; un métier d'apprivoisement, de reconstruction lente, de réussites minuscules et d'échecs douloureux, parce qu'apprendre à aimer, et déjà à se laisser aimer, est si difficile pour ces enfants-là.

Un travail qu'aucun travailleur social, aucun psy, aucune institution se serait à même de faire : dans chaque instant du quotidien, prendre soin. Un métier peu reconnu, à peine considéré, et qui ferait parfois sérieusement tanguer votre propre famille ; un métier forcément trop peu rémunéré, parce que le dévouement de chaque minute avec des enfants toujours abîmés dans leur cœur, souvent dans leur corps, ne se chiffre pas.

"C'est parce qu'elles ne savent pas que c'est impossible, qu'elles le font… ".

20 octobre 2008

Escales

En écho à la sagesse de Christiane (voir post Collègue ;-)), me suis remise à cultiver les petits bonheurs. Sécher une journée de formation, pour profiter de la maison au calme - enfants à la campagne, homme en formation - juste le chat qui me regarde jouer avec les pastels que je me suis offert pour l'occasion - la boîte d'aquarelle et le bloc d'argile achetés le même jour attendront.

Rouler en calèche au pas lent d'un percheron - surprise d'anniversaire concoctée par Yoyo et Bizzou pour l'anniversaire de leur petit-fils : couleurs d'automne, soleil de début d'hiver, trois heures passés comme un souffle tant nous étions, tous sous le charme. Dans le panier de pique-nique, une bouteille de champagne et des biscuits roses, au retour, les enfants pas peu fiers de conduire l'un après l'autre l'attelage, sous le regard vigilant de notre cocher.

Baguenauder le long du Canal Saint-Martin, avec escale incontournable chez Antoine et Lili. Acheter un drôle de pull châle doudou, une salière et une poivrière en forme de champignons (rouges à pois blancs) pour mettre de la gaieté sur la table, et du bon pain de campagne dans une boulangerie inconnue mais bien achalandée. Au retour - lire le Elle frais du jour dans notre nouveau canapé... Ah, et puis : mettre à jour la Care Box !

18 octobre 2008

Toiles

Deux regards sur l'adolescence, La belle personne et Entre les murs - deux rapports au langage - élaboré, presque précieux, outil de connivence et de reconnaissance sociale, la maîtrise d'autres idiomes allant de soi pour les uns (l'exposé sur Lucia di Lammermoor) - fragmentaire, insuffisant, explosif pour les autres - la question de l'identité, de l'insulte, du sens littéral ou multiple des mots comme fil conducteur... Eric me disait, sa lecture de la "bêtise" calculée des adolescents, qui prennent au pied de la lettre les mots du professeur, cette ignorance délibérée de la polysémie des mots, comme un retour à l'envoyeur, une réponse à la surdité des adultes que nous sommes - adressée au moins sourd d'entre eux...

Je pense aussi à ces recherches qui ont montré le lien proportionnel entre la pauvreté du vocabulaire et les passages à l'acte de tous ordres ; ces enfants sont pourtant souvent, comme ceux de La belle personne, au moins bilingues... et cette richesse, n'est jamais exploitée - ni source de valorisation.

Quoi qu'il en soit, pour moi qui les côtoie au quotidien, les adolescents d'Entre les murs sont plus vrais que nature ; comme sont plus vrais que nature - quoi qu'un peu moins violents que là où je travaille, les entretiens au planning familial des Bureaux de Dieu, vu en avant-première l'autre semaine... La construction du film - de vrais entretiens joués pour les conseillères, par des actrices prestigieuses, pour les consultantes, par des comédiennes non professionnelles, est lumineuse. Et quel bonheur, que quelque chose de ce métier invisible soit restitué avec tant de justesse !

En guise de dessert, Vicky Cristina Barcelona, qui malgré ses images splendides et son séduisant trio d'actrices, nous a laissés mélancoliques : passion ou raison ? ennui ou souffrance ? danger ou sécurité ? telle est la question, mais la réponse n'est pas livrée avec...

16 octobre 2008

Je-Tu

Car le moi interrogé, s'il transcendait l'interrogation, s'il dérogeait à la grâce infinie de la rencontre, tomberait dans le monologue ou dans la confession, dans ce qui vante ou dans ce qui regrette, dans le plat récit des désirs et des peines. Il dirait ce qu'il était avant de dire ce qu'il est ; il dirait ce qu'il est, avant de dire ce que par la rencontre, il est devenu. (...)

...puisque l'être humain est relatif à l'humain, c'est dans le lien du
je-tu, sur l'axe du je-tu, qu'on découvrira les véritables caractères de l'homme. (...)

Martin Buber nous montre les deux sources de la parole, qui sont, bien entendu, les deux sources de la pensée : les choses d'une part, les personnes d'autre part, le
cela et le tu. (...) Et c'est ici qu'intervient la catégorie bubérienne la plus précieuse : la réciprocité. Cette réciprocité, on ne la trouve jamais clairement sur l'axe du je-cela. Elle n'apparaît vraiment que sur l'axe où oscille, où vibre le je-tu. Alors, oui, l'être rencontré se soucie de moi comme je me soucie de lui ; il espère en moi comme j'espère en lui. Je le crée en tant que personne dans le temps même où il me crée en tant que personne.

(...) Un monologue peut être long et disert, il exprime moins d'âme que le dialogue le plus naïf. Si étouffé, si mal balbutié que soit le dialogue, il porte la double marque du donné et du reçu, ou tout au moins, comme un prélude, la double tonalité de l'aspiration et de l'inspiration des âmes. Alors l'oreille est active puisque tendre l'oreille c'est vouloir répondre. Recevoir, c'est s'apprêter à donner. Encore une fois, notre substance spirituelle n'est en nous que si elle peut aller hors de nous. Elle ne peut aller hors de nous, vaguement, comme une odeur ou un rayonnement. Il faut qu'elle s'offre à quelqu'un, qu'elle parle à un
tu.

Gaston Bachelard, préface à Je et Tu, de Martin Buber

15 octobre 2008

Proposition d'écriture

Je ne l'ai pas inventée, mais empruntée à François Bon - au moins pour le fond, sinon pour la forme. Mais je ne résiste pas au plaisir de la partager... avec la joie de cette première rencontre entre l'animation de groupes professionnels et mon rêve récurrent d'atelier d'écriture...

Cartographie :

A la veille d'un voyage dans des terres inconnues, il peut être utile de disposer d'une carte. Géographique ou maritime, carte au trésor, carte du monde ou carte d'orientation, parcheminée ou informatisée, la carte fait partie de notre imaginaire. Ceux d'entre vous qui se sont intéressés à la PNL se souviendront qu'elle n'est pas le territoire, mais qu'elle permet de le visiter...

La proposition d'écriture est une invitation à décrire l'équipe avec laquelle vous travaillez sous une forme cartographique qui peut être :

- celle d'un pays : étendue, frontières, reliefs, ressources naturelles ou importées, climat, régions différentes avec leurs spécificités, gouvernement, population, us et coutumes, modalités de communication internes et externes, commerce extérieur...

- celle d'une maison : disposition, pièces, voies de communication (escaliers, ascenseurs, passages secrets...), ouvertures (portes, fenêtres...), parties endommagées ou en construction, sources d'énergie, jardins et dépendances...

- celle d'un océan : étendue, profondeur, faune et flore, récifs, fosses, tempêtes et accalmies...

- ou toute autre métaphore cartographique qu'il vous plaira de filer, pourvu qu'elle permette de mettre en oeuvre les notions d'espace, de frontières, d'inter-relations... et tout ce qu'il vous semblera important d'y faire figurer.

14 octobre 2008

Anatomie

La classe d'Elsa travaille sur le corps humain, je les accompagne au musée Bourdelle. Par ailleurs, j'ai bien noté une recrudescence des questions sur comment on fait les bébés, ces derniers temps... Les enfants rigolent devant le célèbre bronze d'Héraklès, "il est tout nu" ! La guide ajoute des remarques sur le métal, si solide et quasi éternel, la maîtresse souligne le travail sur les articulations, qui lui donnent l'air presque vivant, un petit garçon, regard fixé sur "le zizi d'Hercule" (!) commente : "Il bouge pas, alors il fait pas l'amour !?". Un ange (Cupidon ?) passe...

Collègue ;-)

Il ya une phrase toute simple qui a été prononcée par une formatrice de l'AFCCC à propos des techniques d'entretien individuel ou de couple: "votre meilleur outil c'est vous-même", qui est à mes yeux un des fondamentaux de la relation d'aide. Comment aider l'autre si on ne peut ou ne veut pas puiser dans nos propres richesses, celles qu'ont a bâties à partir de notre enfance, de nos échecs, de nos joies, de nos souffrances, de nos bonheurs et malheurs conjugaux, familiaux ?

C'est un formidable potentiel, mais nous nous devons de continuer à l'alimenter en restant des êtres VIVANTS, certes avec la tête emplie de nos "noeuds" mais aussi avec les pieds dans l'humus de notre bonne vieille terre. Celle qui a nourri les vergers de mon enfance et aussi les vignes de tes parents.

Pourquoi tant douter de nos capacités à aider, à aimer ? Certes c'est quelquefois bien lourd de recevoir la souffrance de l'autre, mais peut-être faut-il mettre la barre un peu moins haute et accepter avec humilité les toutes petites limites de notre travail et avoir davantage confiance en nous, bordel.C'est dit, et ça fait du bien de le dire.

Christiane

13 octobre 2008

Subversive

Le gouvernement nous prépare un décret instituant des thérapeutes d'état, l'enseignement de la psychanalyse dans les universités est mis à mal, les psys sont invités à s'asseoir sur leur déontologie dans les domaines de la justice et de l'éducation, l'hôpital ne recrute plus que des praticiens TCC ou neuro-biologistes, la consommation de psychotropes explose...

Et une principale adjointe se propose, me propose l'ouverture dans un collège réputé difficile d'un espace de parole - une personne attentive aux questions du transfert, de la prévention, de la difficulté d'évaluer ou de quantifier une telle action, mais désireuse de donner une autre chance - encore une autre chance - à ses élèves les plus en souffrance... Une personne capable de dire, quand bien même cela permettrait de ne pas en exclure ne serait-ce qu'un seul - cela en vaut la peine. Je ne sais pas, comment ce dispositif s'inventera, entre contraintes politiques de l'une et souffrance aiguë, peut-être indicible, des autres. Mais, ne serait-ce que pour le projet... chapeau !

03 octobre 2008

Eternel masculin ?

Bien sûr, on peut changer d'avis : la première fois que j'ai vu Autant en emporte le vent, j'étais fou amoureux de Scarlett O'Hara ; la deuxième fois, après quinze ans d'analyse, je disais, quelle garce ! surtout ne pas s'en approcher ; vingt ans plus tard, je la trouve à nouveau sensationnelle !

Woody Allen, interview TRA

Test de grossesse : positif

17 ans – une petite maghrébine à la mine triste et au regard charbon – une douceur résignée qui sied mal à son âge… Son père est très âgé, sa mère régulièrement hospitalisée pour des épisodes dépressifs graves, sa petite sœur se remet progressivement d’un cancer, une fratrie de 6 enfants élevés comme des chèvres – une famille trop bien connue des services sociaux. Quand sa sœur est tombée malade, puisque elle est l’aînée, elle a arrêté l’école - elle travaillait bien pourtant, c’est manifestement une jeune fille intelligente. Le petit ami sort de prison, la malmène – elle rêve toujours à son ancien amoureux, qui ne valait guère mieux…. Lui souhaiterait qu’elle garde sa grossesse (mais au nom de quoi ?), elle voit se refermer le piège d’une relation qui ne la satisfait pas – la fin de ses modestes projets, reprendre une formation, passer son permis de conduire… Se voit-elle demander à son éducatrice d’être son référent majeur si elle choisit d’avorter ? Non. Mais qui, alors ? Autour d’elle, personne… Que va-t-elle faire ? Je ne sais pas.

15 ans, mince comme un fil, une très jeune Zaïroise flanquée d’une copine qui sert plus ou moins d’interprète – non pour des raisons de langue mais pour des questions de compréhension – elle est en classe de Segpa, adressée par le petit copain qui a saisi qu’il pouvait y avoir un problème, ignore la date de ses dernières règles (juillet ? juin ?), sourit à l’annonce du résultat du test – c’est la copine, qui a l’air consternée. Qu’est-ce qu’elle veut ? Elle ne sait pas. Est-ce qu’elle veut que je l’aide à prendre un RV d’échographie ? Pas cet après-midi. Est-ce qu’un majeur de son entourage pourrait l’accompagner ? Elle ne sait pas. Est-ce qu’elle m’autorise à joindre son infirmière scolaire ? Oui. Le tout avec le même air absent - définitivement non concernée.

18 ans tout juste, la tête sur les épaules et les pieds sur terre – une petite jeune femme décidée qui se doutait bien du résultat du test, se laisse le temps de la réflexion, et me raconte comment ballottée de famille en famille, de France en Haïti, petite dernière après quatre frères, elle a appris à ne compter que sur elle-même et à prendre ses décisions seule. Elle exprime (comme toutes les autres) son refus de principe concernant l’avortement – Un enfant c’est pas un insecte qu’on écrase, dit-elle – avant de s’informer sérieusement sur l’IVG, et ses aspects médicaux, financiers, psychiques… Elle est à peine plus âgée que les autres, mais infiniment mieux armée pour penser les choses. Quelque chose est construit, structuré chez elle, qui la soutiendra dans sa décision quelle qu’elle soit – c’est évident. Elle dit, je me suis éduquée toute seule – fantasme ou demi-réalité ? Toujours est-il que des valeurs lui ont été transmises, et une volonté, qui la tiennent debout.

17 ans, jolie comme un cœur, tout sourire aux lèvres – au décours de l’entretien j’apprends la rupture avec le copain à l’annonce d’un risque de grossesse, le travail de nuit, dans un pub (au noir bien sûr à cet âge – donc sans couverture sociale, ni jours de repos, ni…), puis qu’elle est depuis la veille à la porte de chez elle avec sa sœur de 20 ans – qu’elles ont dormi chez une amie, qu’elles ne savent pas de quoi demain sera fait – que non, elle ne veut pas aller voir l’assistante sociale parce qu’elle ne veut pas qu’on la sépare de sa sœur. Je préfère être avec elle dans la rue que sans elle. Bien – nous en reparlerons, au prochain rendez-vous… ne rien forcer, mais rester en alerte. Je l’interroge sur son prénom, rare – tunisien ? égyptien ? Ibtisam signifie : sourire.

27 septembre 2008

La princesse et les croque-notes

Samedi soir, une balade improvisée dans la rue des Lombards, une conversation à bâtons rompus au Sunside et la découverte d'une petite perle, pour les amateurs de jazz et de chanson française : Mélanie Dahan.

23 septembre 2008

Regard neuf

L’écoute qui cherche à vouloir maîtriser le discours de l’autre et qui déjà fige le propos de l’interlocuteur ou sa position, le met à une place présupposée en le guettant dans un scénario ou des comportements attendus. Elle induit souvent l’autre dans une direction en obstruant de ce fait l’instant de l’échange. C’est souvent une peur de l’inconnu, voire de la mort, qui dicte ces attitudes. (…) La relation par définition est mouvante, elle est le produit du rapport entre les êtres, des énergies en présence, qui sont toujours en mouvement. (…) Autrement dit, il faut se présenter dépouillé d’évidences, d’a priori, pour donner une chance à la nouveauté, à l’inattendu d’une situation. Afin de donner une chance à l’autre pour nous surprendre, pour nous étonner, et le découvrir différent de la façon dont on le percevait.

Michèle Taïeb, Improviser

22 septembre 2008

A la petite semaine

De ces derniers jours que me reste-il ? Les brumes de la fièvre, une fatigue persistante que je n’ai pas écoutée, un arrêt-maladie qui ne m’aura pas arrêtée.

Be Happy, concentré de bonne humeur en VO, dans la lignée de Toi, moi et tous les autres, ou Little Miss Sunshine.

Une nouvelle patiente, adressée par une grande dame dont la confiance m’honore.

Tanguera, ou West Side Story au pays du tango – danseurs virtuoses, sensualité qui affleure dans la lenteur bien plus encore que dans les tempos enfiévrés…

La préparation inquiète de deux journées sur la relation d’aide – l’envie de plus en plus affirmée de lâcher le contenu pour laisser la place à l’improvisation, à l’émergence et à la légèreté – défi de funambule, à fortiori dans l’état second dans lequel je me trouve encore.

Un colloque était prévu je crois – j’ai préféré emmener Léo et Elsa visiter les animaleries et mes souvenirs d’enfance Quai de la Mégisserie.

Se précise, le devoir d’accompagner ma grand-mère dans une maison spécialisée dont elle ne reviendra pas – la perspective de l’aider dimanche prochain à faire ses valises – mais que met-on dans sa dernière valise ? Comment transformer l’appartement de toute une vie, les souvenirs de l’autre omniprésent, en deux colis pratiques – chemises de nuit, brosse à dent, serviette de table et de toilette, et .. ?

Un dîner doux au Café Bibliothèque, une qualité de relation et de dialogue rares. A la librairie du même Mk2, deux livres à savourer, le dernier Alice Ferney, et L'art de la Joie, que je croise et recroise sur mon chemin.

Ce soir j’ai trouvé un espace de paix à inventer un nouveau rite – pas l’énergie de lire un ou deux chapitres de quoi que ce soit, aussi ai-je décidé de lire à mes enfants quelques poèmes. Qu’est-ce qu’un poème ? C’est comme une chanson mais sans chanter, dit Elsa.

Au menu, Le Cancre de Prévert – commencer en douceur, avec un texte qui a toute ma tendresse depuis toujours – La Rose et le Réséda, d’Aragon – je leur ai dit, il avait deux amours, Elsa, et une certaine idée de la liberté… Je leur ferai écouter la version mise en musique par La Tordue, ai rappelé à mon Elsa qu’elle portait ce prénom parce que cet amour était à l’origine de poèmes parmi les plus beaux de la langue française. Un poème d’amour de Ramuz, qui les a fait rire aux éclats, l’histoire d’un paysan fou amoureux fou qui parle de son amour secret à ses vaches. Pari gagné, à refaire, et pour moi j’en suis sortie comme momentanément lavée, rafraîchie.

14 septembre 2008

Pêle-mêle

Petit miracle à la réunion de rentrée hier matin : maître subtil et délicatement provocateur, qui a pour projet pédagogique transversal le décodage du monde qui nous entoure, soutient l'accès à l'autonomie sous toutes ses formes et privilégie les entrées multiples dans la culture - théâtre, cinéma, concert au Conservatoire, sorties scientifiques - jamais assisté à une réunion pédagogique aussi stimulante, je retournerais bien en CM1 moi...

Une expo très bien faite sur les incroyables cétacés (j'aurai enfin compris pourquoi il y a des mammifères marins), un thé à la menthe à la Grande Mosquée (pâtisseries du Ramadan à tomber par terre), d'amicales et chaleureuses lasagnes de rentrée, un brunch au soleil de Bercy (au Chai 33, animations gratuites pour les enfants le dimanche, avis aux jeunes parents), un anniversaire chez Mac Do (sans nous, hein ;-), une journée de formation shiatsu (pas pour moi, mais suis bénéficiaire !!!), une Zaz' émerveillée par les robes Valentino (bien qu'elle déplore qu'il n'aie pas crée de robes avec des chats, on le lui suggèrera... moi j'aurais aimé les croquis initiaux et les étapes de la création, mais c'était sublime quand même.)

Et une blague du Léo :
- Moi je suis déjà astronaute !
- Ah bon et tu navigues dans quel espace ?
- Ben dans la lune !
(Quand on sait combien le Léo peut-être distrait et rêveur, ça vaut son pesant de cacahuètes...)

12 septembre 2008

Sablier

Maman parisienne multi-employeurs, je jongle avec le temps... et me demande parfois à côté de quoi je passe. Dire hier à Léo qui avait mal au ventre - pas aujourd'hui (parce que j'anime un groupe auquel je tiens), nous irons chez le docteur demain si tu as encore mal - est-ce que c'est juste ? Ce matin Léo n'a pas l'air plus malade... mais j'ai pris la matinée pour l'accompagner - peut-être que c'est ce qui compte. Avoir le temps de conduire Elsa sans l'expédier, dessiner une sirène, papoter avec la maîtresse, avec une maman d'élève. Revenir à la maison, décider qu'après le médecin, nous irons déjeuner tous les deux avec Léo, tête-à-tête exceptionnel et moment privilégié. Peut-être ça devrait être possible plus souvent - peut-être je devrais m'organiser pour que la priorité soit là. Peut-être...

11 septembre 2008

Bulle

A noter dans le dîner de retrouvailles ce jour, une observation rare - la possibilité d'un échange à dix personnes, qui laisse sa place à chacun, où l'on puisse entendre chaque voix singulière, et pas uniquement le brouhaha de conversations particulières.

09 septembre 2008

Rentrée

Deux naufragés agrippés l’un à l’autre – 37 et 25 ans, des enfances et des vies dévastées par la violence, l’alcool, le mensonge et la disqualification. Elle a deux grands enfants, passablement abîmés eux aussi, il s’auto-mutile depuis l’enfance. Ils sont intelligents, créatifs (elle écrit, il peint, sculpte, fait de la musique), dotés d'un humour ravageur, émouvants – et complètement déglingués.

Une grossesse s’annonce, c’est ce qui les amène, à laquelle ils semblent en fait assez d’accord pour mettre fin – mais que viennent-ils faire ici au juste ? Est-elle venue interroger son ambivalence, face à une grossesse qu’elle s’imagine comme la dernière ? Demander des soins pour elle ? Demander des soins pour lui, par le biais de cette consultation pré-IVG ? Et lui, qu’est-il venu confirmer, venu affirmer, de sa position nihiliste apparemment argumentée mais rempart dérisoire contre une détresse que je devine insondable ? La transparence psychique de la grossesse fait ici coup double - l'un et l'autre déversent, digressent, marée noire que je dois à plusieurs reprises endiguer pour ne pas perdre le fil, rester dans le cadre de l'entretien.

Deux funambules, qui m’ont laissée vidée, épuisée par ce qui circule de violemment incestuel et de violent tout court dans leur discours, dans leurs histoires, dans leur relation, dans leurs prises de position d’adultes ou supposés tels aujourd’hui… Elle aimerait se dispenser de l'étape échographique, il souhaite au contraire en être témoin ; ils sont d’accord pour revenir ensemble au prochain rendez-vous, ensuite. Quelque chose a accroché... Pourquoi, et pour quoi ?

08 septembre 2008

Second degré

David raconte fièrement à ma maman : "La maîtresse d'Elsa a dit qu'elle était une élève parfaite - mais qu'il ne faudrait pas le répéter devant elle." Et là, on entend une petite voix de cinq ans dans la pièce à côté : "T'inquiète pas Papa, j'ai rien entendu !".

02 septembre 2008

Hameau 2008

Préférer la prise de terre à la prise de tête ;-)

(...) Ce point d'équilibre que je retrouve naturellement ici, pouvoir le trouver ou tout au moins le retrouver aussi régulièrement dans ma vie. Pouvoir accueillir ce qui vient avec la même tranquillité, la même disponibilité, la même joie, la même gratitude. Que me manque-t-il au dehors, pour que je sois si peu en connexion avec ça ? D'extérieur ? D'intérieur ? Qu'est-ce qui est bon ici, dont je ne crée pas les conditions d'existence au dehors ? Qu'est-ce qui me gêne au dehors, qui n'interfère pas ici ? Qu'est-ce qui ne dépend que de moi, dans les deux cas ? (...) Je ne veux pas attendre ? Mais je n'ai pas le choix... Il est urgent d'attendre. (...) Cinq minutes de bonheur - un bain-douche d'amour. Et une citation : "Et souviens-toi. Il existe deux sortes de fous, ceux qui ne savent pas qu'ils vont mourir, et ceux qui oublient qu'ils sont en vie."

19 août 2008

La main à la pâte

Décoller des papiers peints (en quadruple couche, et la dernière, centimètre carré par centimètre carré). Poncer des murs. Poser du parquet. S'initier à la peinture des plafonds, à la pose d'enduit à la chaux. Ca occupe la tête et les mains, fatigue d'une bonne fatigue, c'est plus facile que prévu, c'est la porte ouverte à des blagues discutables ("je ponce donc j'essuie") - bref, c'est salutaire. M'est avis que les travaux de décoration n'ont pas qu'un effet de "ravalement" (!) mais possiblement une portée supérieure - choisir son environnement, habiter sa maison, ça pourrait bien être thérapeutique aussi...

13 août 2008

Versailles

...c'est un film rugueux et tendre, à l'image de Guillaume Depardieu, déglingué, habité, lumineux comme jamais. C'est l'histoire d'une adoption réciproque, la confirmation qu'on ne saurait se sauver tout à fait seul, un film sur la naissance d'un père. Un film pas fait pour "plaire" - personnages habituellement socialement invisibles, scènes nocturnes, musique discrète, dialogues minimalistes mais qui touchent au coeur. Un film qui laisse sous le charme - émotion rare, tendresse brute. Le Kid, version 2008...

10 août 2008

Avedon

"Toutes mes photographies sont exactes. Aucune n'est la vérité." Il disait aussi, "Il n'y a rien derrière mes photos. Il ne s'agit que de la surface." Coquetterie de créateur ? Car ses images ont bel et bien une profondeur - celle de leur sujet, qu'il savait capter comme personne, celle du photographe - "Je vois les gens et les choses comme les musiciens entendent, c'est-à-dire d'une manière extra-sensorielle et sans porter de jugement", celle de l'observateur - renvoyé à sa propre humanité, mais aussi à sa créativité : parce que les portraits d'Avedon, et tout particulièrement ceux des anonymes, s'imposent à nous, nous prennent à témoin, et simultanément suggèrent mille romans possibles...

J'ai souvent eu l'envie de photographier certaines des personnes que je reçois - ces patients... ; les images d'Avedon me donnent l'envie réciproque d'écrire la vie de ses modèles - récits de vie ou fictions, rencontre ou imagination, mais d'écrire... Je ne suis pas photographe - ni écrivain. Mais ce qui me meut, est la même chose : un certain regard sur l'humain.

09 août 2008

Disparitions

Avant de partir en congés, son médecin de famille a dit à ma grand-mère, ce n'est pas à la cliente que je dis au revoir, mais à une amie qui n'est plus la même - plus celle que j'ai connue. Qu'est-ce qu'elle en a entendu ? Je ne sais pas, mais la phrase me serre le coeur. Le désert de sa mémoire s'étend un peu plus chaque jour, qu'elle essaie de combler par des histoires toujours plus absurdes. L'histoire s'emmêle, les générations aussi...

Le désert affectif autour d'elle aussi - parce qu'elle n'a jamais su nouer de liens profonds, petite fille narcissique, capricieuse, agressive, et plus que jamais hors réalité. Une vie sans intériorité, toute entière tournée vers l'extérieur... Elle m'a donné le goût des belles choses ; mais elle ne transmettra pas non plus cela, puisqu'elle vient de perdre ? trop bien cacher ? se faire voler ? les bijoux de prix qu'elle possédait. Indépendamment de leur valeur marchande, je ne peux m'empêcher d'y voir un redoublement de ce que j'observe - une vie dont il ne reste rien, l'absence de toute forme de création ou de transmission.

07 août 2008

Iconoclaste ?

Analyse, relation et représentation :
L'analyse là ne se joue pas fondamentalement et prioritairement (...) dans l'élaboration mentale-et-verbale, mais dans l'élaboration affective-et-charnelle à travers la relation et le cadrage analytiques, et elle s'avère devenir en même temps un voyage régressif dans lequel le sujet aura non seulement à reconnaître le refoulé dans son retour, mais à retrouver les racines plus profondes de son être-en-devenir (...).

Plus que faire des liens, c'est "faire du liant" qui est le plus important. (...) Il n'y a pas à réduire la passion, le non-sens, la folie, le conflit, il n'y a pas à les "comprendre" au sens de les objectiver, les rationnaliser, les ex-pliquer, mais seulement à les "com-prendre" au sens de les prendre en compte tels qu'ils apparaissent : les "con-tenir", "rester avec" et "laisser être, laisser passer, laisser avec...". L'affectivité se régule ainsi elle-même au contact d'une "présence" charnelle et "contenante", qui lui sert de pare-excitations et apaise ses intensités pulsionnelles. Non seulement elle n'a pas besoin de la représentation pour cette régulation, mais c'est toujours, contrairement à ce qui se dit généralement, la représentation qui vient faire obstacle et créer des problèmes (...)

La représentation (…) est un déplacement fictif hors d’eux-mêmes, hors de leur vérité, des « représentés ». Par la représentation, on les fait s’absenter de leur corps, de leur être, de leur actualité réelle et mouvante, de leur potentiel de devenir et d’irreprésentabilité pour les changer en quelque sorte de perspective et pouvoir les objectiver, les transformer en objets. Finalement, il s’agit d’une nouvelle présentation dans une autre place que la leur, à une place de substitution et de mort, dans l’ailleurs de l’image ou l’ailleurs du langage.

Le silence :
Ce silence, matrice de la parole, toile de fond d'où jaillit toute parole et sur laquelle se déploie tout discours, n'étant pas le silence des non-dits, le silence du mutisme, mais le silence du corps (...), c'est-à-dire un silence qui n'est pas fait de l'absence de bruits, mais de l'absence de paroles (...), un silence plein et habité affectivement, le silence où parle dans son propre langage inarticulé et archaïque la vie dans toutes ses tonalités et modulations, ses vibrations (...).

C'est là que j'ai découvert la différence entre les mots insérés organiquement dans le silence et les mots qui ne sont là que pour dominer et déchirer ce silence, pour le fuir en fait, et j'ai réalisé combien les analysands qui ne parlent pas à partir d'un point de silence sont hors d'eux, combien leur parole est une mascarade, qui leur permet de se cacher derrière semblant et leurre... Les analysands qui parlent sans silence ne font que du bruit, on n'entend pas leur source.

Alain Amselek, L'écoute de l'intime et de l'invisible

02 août 2008

Parigote...

...émerveillée. Parce qu'en arrivant chez les cousins de Provence, nous avons été accueillis par un panier de légumes fraichement cueillis, une bouteille de l'huile de leurs oliviers, et le rosé au frais. Plus fort que la corbeille de fruits exotiques des grands hôtels ! Parce que les enfants se sont goinfrés de pêches et de brugnons encore chauds du soleil qui les a dorés, cueillis directement sur les arbres. Parce que l'espace - le silence, la maison au bout d'une route de cailloux, le soleil qui se couche sur la vallée. Parce que dans la maison des vendangeurs, qu'ils nous prêtent, la fenêtre de notre chambre ouvre directement sur les vignes.

29 juillet 2008

A deux

"Les chemins il y a un poète espagnol qui dit Caminante no hay camino se hace camino al andar. Je traduis Marcheur il n'y a pas de chemin c'est nous qui faisons le chemin en marchant." C'est vrai de tout. Aussi du couple... Pas de réponses toutes faites, d'hypothétique perfection à atteindre, de chemins tout tracés, mais la vie jour après jour après jour, avec ses impasses et ses échappées belles, ses retours en arrière et ses avancées inattendues...

21 juillet 2008

Happy days


Avoir le temps. Celui de ne rien faire, ou pas grand-chose, hésiter entre la piscine et la plage, profiter de joies enfantines, parc aquatique, Marineland, karaoké, ou plus adultes - le temps de lire, un restaurant de plage option Bali sur la Côte d'Azur, les charmes bling-bling de Saint-Trop' en saison, une journée dans une magnifique villa avec accès direct à la mer. Clore la quinzaine par un dîner parfait dans un lieu parfait, sous le signe de l'amitié, au Cap d'Antibes.

14 juillet 2008

Odyssée

Compte (conte ?) à rebours : « De quoi suis-je réellement capable ? » ; « As-tu encore réellement besoin d’une famille adoptive ? Ou es-tu prête à prendre le risque de l’autonomie ? A donner gratuitement à ton tour – sans attendre ? » ; « De quoi as-tu besoin maintenant ? ».

Par l’intermédiaire d’un lien-plume, que me suis-je reconnu ? La capacité de la transformation, le regard qui révèle, l’écriture, la douceur, la légèreté, le rire, la créativité…

Tarots : La Tempérance, carte de guérison et de transformation, d’équilibre des pôles masculin et féminin (voir aussi : densité – plénitude - intégrité). La Roue de Fortune : achèvement d’un cycle, début d’un autre : qui en moi actionne la manivelle ? d’où part l’énergie – du passé, ou de l’à-venir ? Le Soleil : Nouveau cycle dans la construction et le rayonnement – dans le lien, la fraternité.

Avoir un corps. Goûter la nudité dans la sécurité. Massages donnés, reçus. Baignades. Soleil. Dans le plus simple appareil.

Et encore – un émouvant rituel de guérison autour de l’enfance. Et encore – au cœur de la nature – rêver plus grand, descendre plus profond. Sans oublier d’identifier les sabotages possibles. Inventer – un espace d’affirmation de soi. Et le lendemain – clore pour mieux ouvrir.

Stop this World : pour le constat. De tout ce qui retient, freine, alourdit, fausse : devoir, conformité, normes, gentillesse mon cul ! Never Ever : pour abandonner ce qui précède. Symboliser une nouvelle naissance, ou plus exactement, révéler la part de lumière. Femme Libérée – pour le clin d’oeil, et la joie de danser ensemble.

Mais j’ai vu aussi, une femme prendre par la main son enfant intérieure, une autre offrir la paix en partage, une troisième faire le chemin du pardon qui ouvre à l’amour. J’en ai vu d’autres danser la vie, ouvrir grand les fenêtres, transformer les limites en appuis sûrs pour progresser encore. Et une pianiste réaliser un de mes rêves, celui d’entendre un jour un concertiste s’adresser à son public, partager l’émotion contenue, transformée – pour mieux la restituer, ce travail du don. Et d’autres encore.

Et ce viatique : Continue à croître.

12 juillet 2008

Matière à penser

Berta : « Comme thérapeute si on applique la règle on est foutus. C’est là que commence la créativité, la thérapie. Ca nous interpelle – on a tous un Ca. Si on ne travaille pas avec les gens qui sont dans leurs impasses, alors avec qui ? ».

03 juillet 2008

Pense-bête

Il a dit – désapprenez à vous conformer à une image – quelle qu’elle soit – trouvez des êtres auprès de qui être gratuitement, sans que vous ayez à faire d’effort, sans qu’ils attendent rien en échange. Cela suffit.

23 juin 2008

Hokusai

« Depuis l’âge de six ans, j’avais la manie de dessiner les formes des objets. Vers l’âge de cinquante, j’ai publié une infinité de dessins ; mais je suis mécontent de tout ce que j’ai produit avant l’âge de soixante-dix ans. C’est à l’âge de soixante-treize ans que j’ai compris à peu près la forme et la nature vraie des oiseaux, des poissons, des plantes, etc. Par conséquent, à l’âge de quatre-vingts ans, j’aurai fait beaucoup de progrès, j’arriverai au fond des choses ; à cent, je serai décidément parvenu à un état supérieur, indéfinissable, et à l’âge de cent dix, soit un point, soit une ligne, tout sera vivant. Je demande à ceux qui vivront autant que moi de voir si je tiens parole."

Ecrit, à l’âge de soixante-quinze ans, par moi, autrefois Hokusai, aujourd’hui Gakyo Rojin, le vieillard fou de dessin.


Au-delà des estampes érotiques et des vues du Mont Fuji - du grand dragon peint récemment retrouvé qui clôt magnifiquement l'exposition (sur un face-à-face troublant entre le dragon oriental et le tigre occidental), je crois que ce qui m'a le plus touchée, ce sont ses manuels de dessins, oeuvre-fleuve où il restitue en quelques traits des dizaines et des dizaines d'attitudes humaines, mouvements, plissés, végétaux, animaux, une encyclopédie minimaliste et foisonnante - merveilleuse.

18 juin 2008

Toutes seules

Je vous ai donné toutes les informations utiles, que vous aviez au demeurant déjà. Je voudrais vous dire autre chose – que je sais que vous n’en tiendrez pas nécessairement compte – que vous en ferez ce que vous voudrez, ou plus exactement ce que vous pourrez. Que ce que vous dites de vous, me soucie, et que je suis inquiète. Que nous serons là pour vous accueillir, quelque soit la situation dans laquelle vous vous trouverez.

Ce que je ne lui ai pas dit, à ce petit oiseau effarouché et aux yeux trop cernés, mais que j’aurais aimé pouvoir lui dire – ce que je lui dirai peut-être un jour, c’est – vous n’êtes pas folle. Mais vous êtes aux prises avec la folie de l’autre. Ce n’est pas vous. Mettez-vous à l’abri. A l’issue de cette première rencontre, spontanément, les larmes aux yeux, elle m’a tendu sa main.

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Elle est africaine - douze grossesses, sept enfants vivants. Les premiers adultes - dont une fille récemment morte en couches, dans la brousse - les plus jeunes, nés ici, ont cinq et sept ans... Sa fille de dix-huit ans, perturbée depuis son arrivée en France, a ré-intégré le domicile maternel récemment, enceinte de sept mois. Les médecins exigent qu'elle reste alitée, elle court les rues la nuit, se fait régulièrement ramener par la police - délinquance ordinaire. Elle n'a pas compris, dit la mère - que je voulais qu'elle aie la chance de faire des études, devenir quelqu'un... au lieu de cela elle se promène - elle a gâché sa chance. Les loyers en retard s'accumulent, les hommes sont loin, lâches ou impuissants...

Cette femme a fui un premier mariage, forcé, à 13 ans - probable excision, violence et rapports obligatoires, maternités précoces ; un deuxième homme, resté en Afrique, qui a fait peser sur elle malédictions et maraboutage, une menace que les Africains ne prennent pas à la légère. Si elle vient aujourd'hui, c'est parce qu'une mammographie vient de révéler chez elle un cancer du sein... et qu'elle n'en peut plus, de peines et d'inquiétudes, de douleurs et d'interrogations. Pour ses deux plus jeunes enfants, demain, quel avenir ?
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Elle est roumaine, à peine plus jeune que moi - parle un français hésitant - vit dans un squat, probablement. Trois enfants en bas âge - elle suspecte, à raison, une nouvelle grossesse. Je n'ai pas fait grand-chose - le test de grossesse qui confirme son intuition, l'ordonnance pour l'échographie, la prise de RV au dispensaire - mais dans son remerciement chaleureux "Vous êtes gentille" je devine les humiliations quotidiennes auxquelles elle est sans doute en butte - pauvreté, hygiène approximative, barrière de la langue, préjugés liés à la communauté à laquelle elle appartient - et je m'interroge : c'est pourtant le moins que l'on puisse faire, d'accueillir un être humain humainement ?

16 juin 2008

Jonvelle rue Jacob

Jonvelle s'affiche rue Jacob jusqu'en septembre - photographe amoureux des femmes qui disait de lui-même : "Je suis un obsédé sexuel sentimental. Quand je photographie une femme, je veux qu'elle sache qu'elle est la plus belle de la terre, parce qu'une femme qui se sent belle est vraiment la plus belle femme du monde." Voici ce qu'écrit pour lui un ami journaliste : "Les femmes de Jonvelle sont fraîches parce qu'elles ne savent pas que nous les regardons. Jonvelle fait de nous des voyeurs amoureux. Il montre pourquoi il est si douloureux d'être hétérosexuel : partout, dans chaque maison, dans n'importe quelle salle de bain, se cache le paradis. Le paradis retire délicatement son T-shirt et se brosse les dents, torse nu, les fesses cambrées en arrière. Jonvelle est désormais au paradis mais pour lui ça ne fait aucune différence : il y était déjà de son vivant."

15 juin 2008

Madeleines

Léo et David sont partis regarder le foot "entre hommes", je reste avec Elsa qui fredonne une berceuse d'Anne Sylvestre. Voilà une idée qui change de l'histoire du soir ? Et nous écoutons, ravies, Tortue têtue, Je voudrais faire un cadeau, Chanson pour se réveiller, Bel escalier... Ces chansons avec lesquelles j'ai grandi, Elsa les connaît par coeur - bonheur.

09 juin 2008

Affranchi

Léo se renseigne sur les codes postaux, les adresses, etc. Il voudrait savoir comment faire pour qu'il y ait un jour une rue à son nom. Je lui explique qu'il faut qu'il fasse quelque chose d'important et devienne célèbre, qu'il y a des rues qui portent des noms de musiciens, d'hommes politiques, d'écrivains, de scientifiques... et je lui demande ce qu'il envisage de faire. Après un temps de réflexion, il me déclare : Je veux vivre ma vie.

Vache à boire

Fou rire du matin : dans les rayons du supermarché, une nouvelle génération de yaourts à boire est apparue, ceux de Michel et Augustin. Des yaourts bio, bobos, aux parfums originaux et au marketing pointu (et au coût en conséquence...) - pour se faire une idée, il y a quelques vaches . Sur l'étiquette, une indication : avant de la boire, faites faire trois fois le poirier à la vache, en meuglant de plus en plus fort. Ca marche. Sur le yaourt, je ne sais pas ; mais sur les enfants (et les parents qui ont gardé leur âme d'enfant), c'est sûr !

04 juin 2008

Amnésique

Elsa : - Maman, comment ça s'attrape un trou de mémoire ?
Lulu : - J'ai oublié...

01 juin 2008

Marraine

Si je devais donner une image pour exprimer ce que signifie pour moi être marraine, je dirais que c'est une main d'enfant dans une main d'adulte - de fragiles mains humaines dans la main de Dieu. Je mets ma main dans Ta main. C'est le signe d'une confiance donnée et reçue, d'un engagement sur un même chemin : que la route soit aisée ou qu'elle soit difficile, je serai là.

31 mai 2008

Concision

Tout part d'une légende peut-être, celle de cette invitation faite à l'écrivain américain Ernest Hemingway d'écrire une nouvelle en six mots. Et de son oeuvre, vertigineuse : A vendre : chaussures bébé, jamais portées.

Fabuleuse contrainte d'écriture - et réponse irréprochable. Relance mon envie, un jour, d'animer des ateliers d'écriture...

28 mai 2008

Parallèles

Dans le courrier d'une amie ce jour, matière à méditation, et un sourire - comme souvent, je constate que nous nous avançons sur des chemins parallèles...

"C'est aussi toucher les limites de ce que je fais pour l'autre et de ce que je fais pour moi, et l'espace que l'on se donne mutuellement, aussi dans l'absence... (...) je ne veux plus donner, en amour ou en amitié, en attendant quelque chose en retour, je ne veux plus donner en espérant que ça va apporter du soulagement, du bien être, du confort, un mieux vivre, et donc un changement. Je veux du partage en paroles, et en actes, et je saurai désormais dire non si ça ne me nourrit pas."

Et, un peu plus loin : "L'instant présent c'est tout." L'instant présent c'est tout - pas plus, pas moins, sagesse bouddhiste, hier n'est plus, demain n'est pas encore - l'instant présent c'est Tout.

21 mai 2008

Sagesse du fou

Les enfants ne sont pas des imbéciles, ils savent très bien d'où viennent les bébés mais ignorent d'où viennent les adultes.

Tomi Ungerer, interview TRA.

Trop la classe

Une pépite du dernier album de Maxime Le Forestier, Restons amants. Textes ciselés, impertinence élégante, mélodies intemporelles - et d'un album à l'autre un univers qui va vers l'épure sans perdre de sa cohérence - ici, un duo avec la belle Emmanuelle (Béart), L'hymne à la soie.

Je suis venue pour te les dire
Dans le plus doux tissu qui soit
Ces choses qu’on garde pour soi
Tant qu’on s’aime encore c’est-à-dire

Que dans ces douceurs honni soit
Qui pense amour ou même désir
Pour toi seulement comme tu respires
Tu gardes tes dessous de soie

Soit tu déchires soit tu t’en vas
Chacun pour soi

Fini le jeu perdue la mise
Oublie ce que tu aperçois
Par la meurtrière de soie
Qui s’ouvre au cœur de la chemise

Et ce regret que je perçois
Je vais le jeter sur des feuilles
Où je t’effleure où je t’effeuille
Sur le papier ça va de soi

Soit tu me cueilles doucement soit
Chacun pour soi

Ecris les vers écris la prose
Les plus jolies pages qui soient
Si tu te plains tu me déçois
Ecris mon prénom si tu l’oses

Je garderai quoi qu’il en soit
Pour toutes mes amours à venir
Transparent comme un souvenir
Caché dans un foulard de soie

Soit du plaisir soit ces mots-là
Chacun pour soi...

15 mai 2008

Bad boys

Elsa : Moi j'adooooore les pirates. Parce que leur métier c'est d'être jolis.

13 mai 2008

Je suis terrible depuis 5 ans

(C'est le T-shirt que nous avons fait faire à Elsa pour son anniversaire).

Elsa veut épouser tout ce(ux) qui lui plaisent. Je lui conseille d'épouser un homme bon. Et aussi un homme m(â)l(e?), me rétorque-t-elle. No comment.

Question du soir : maman, pourquoi il est sacré Charlemagne ? (Ben, parce qu'il a inventé l'école... mais quand même, sur le moment, il y a eu un blanc de parents perplexes.)

Question en voiture : maman c'est quoi les péchés capitaux (Léo) ? Et c'est quoi la luxure ? Euh... on t'expliquera quand tu seras plus grand, mon chéri.

Bubulle est mort. Il est parti au ciel du paradis des poissons, ça c'est la mer ! commente la Za.

12 mai 2008

Retrouver

Le temps. L'autre. Soi. Prendre le temps... de laisser être, de se laisser sentir, d'accueillir ce qui vient, ce qui est. Autant d'instants pleins - parce que dans cet instant, je me trouve là où je suis - je me trouve là où je suis - dans un lieu d'être :

Je dis espace j’entends ce point où le silence se fait en nous
Où nos jardins se font secrets, où nous pouvons entendre
La source oubliée et tranquille sans laquelle nous ne serions pas.
Où sommes-nous ? - nous sommes là où nous nous arrêtons...
Là où nous jetons nos armes, là où nous posons nos masques
Là où nous respirons - en silence.


Dans Paris ensoleillé, balades à vélo ou à pied, expos - deux regards de femmes sur les hommes, Sophie Calle et Camille Claudel - et un regard d'homme sur les femmes - Jonvelle, un shiatsu improvisé sur les pelouses du rond-point des Champs-Elysées, quelques bières fraîches en terrasse (blanches, avec une rondelle de citron), re-découvrir le quartier Saint-Germain. Ce qui ne se laisse pas si facilement saisir avec des mots, c'est l'accordance qui s'instaure à nouveau - sans mots et sans projet, un mouvement naturel... la liberté d'être soi avec l'autre.

Plus tard, des bonheurs simples à retrouver - une flûte de champagne dans le jardin, un hamac sous les cerisiers, les enfants qui improvisent avec le théâtre de marionettes qu'Elsa a reçu pour son cinquième anniversaire, ma belle-maman qui joue Roses de Picardie à la mandoline.

06 mai 2008

Changement

Ce qu'elle redoute aussi c'est la perte de la maîtrise. Elle se demande comment elle va pouvoir se repérer et manoeuvrer dans ce nouvel univers. Mais ce qui est plus grave et qu'elle soupçonne, c'est que le changement ne va pas s'arrêter et qu'elle n'a aucune garantie de la stabilité du système relationnel nouveau qui va être instauré.

Elle a raison :
accepter le changement, c'est accepter qu'il soit permanent, que plus rien ne soit figé, sinon la vie qui a recommencé à proliférer retournera à la pourriture. Bien plus, c'est admettre de ne pas être le centre ; c'est plutôt entrer dans un mouvement qui nous donne une place, laquelle se modifiera sans cesse en fonction du temps, des circonstances et des personnes. Changer, c'est donc peu ou prou se laissser faire par une mobilité sans relâche.

François Roustang, Savoir attendre

03 mai 2008

Liberté

Face à la liberté qui va peut-être s'exercer, le seul respect convenable se traduit dans le renoncement à tout pouvoir. Le pouvoir que le patient m'avait octroyé en espérant par là éviter le risque, je dois le lui rendre et n'en faire aucun usage. Je ne peux pas ne pas souhaiter qu'il fasse le pas, car c'est l'intérêt et la passion de mon métier ; et cependant, je dois me tenir ici à la fois présent et à l'écart, m'installer tranquille dans mon incapacité radicale.

François Roustang, Savoir attendre

01 mai 2008

Tante Pititi

Dans ma famille de cœur – ma famille choisie, il y a désormais une dame de bientôt 70 ans, qui parle net et boit sec, à moins que ce ne soit le contraire, mais qui a gardé intacte sa capacité de jouir de la vie et de s’émerveiller – une dame au grand cœur et au jugement sûr. Une dame qui s’amuse de raconter que sa demeure est une ancienne maison close, accueille les enfants à bras ouverts et s’est offert pour Noël une ravissante dînette en porcelaine dans un panier de pique-nique – pour elle.

Elle vit dans les îles – moitié de l’année dans celle de Saint-Louis, et l’autre à l’Ile de Ré – dans une immense maison ancienne dans laquelle sont venus s’accumuler les héritages successifs d’une famille nombreuse et cosmopolite. Meubles anciens, tapisserie d’époque, profonds canapés de soie fleurie, portraits de famille, piano demi-queue dans l’immense salon aux deux cheminées – et pourtant la vie passe dans ces murs – jouets d’enfants, canard lumineux incongru, un désordre subtil qui évoque plus la brocante que l’antiquaire…

Dans ses paroles – l’attention aux très petites choses, à l’histoire des objets et des êtres qui l’entourent, une tendresse à fleur de peau, une pointe d’humour et de distance, et un je ne sais quoi de résolument ouvert, généreux, politiquement incorrect qui m’a absolument ravie. Il n’y a pas tant d’êtres vivants – et encore moins à cet âge. De ces êtres qui nous mettent en contact avec la vie en nous, ouvrent un chemin : c’est possible.

30 avril 2008

Douces chimères

Qu’on songe à ce que Bertha signifie pour Josef : fuite, fuite périlleuse, fuite face aux dangers de la vie confortable. Et passion, aussi, et mystère, et merveilleux. Elle est la grande délivrance qui lui accorde un sursis à la condamnation à mort. Elle est dotée de pouvoirs surhumains, elle est le berceau de la vie, la mère qui pardonnera tout cequ’il a en lui de sauvage et de bestial. Elle lui assure une victoire acquise acquise d’avance sur les autres prétendants, un amour constant, une amitié éternelle et une survie garantie dans ses propres rêves. Elle est un bouclier contre les ravages du temps, un rempart contre son gouffre intérieur, un filet au-dessus de l’abîme.

Bertha est synonyme de mystère, de protection et de salut ! Josef Breuer appelle cela l’amour. Mais en vérité cela a pour nom prière.

Irvin Yalom, Et Nietzsche a pleuré.

25 avril 2008

Happy Birthday

Décidément – il n’y a rien qui me réjouit tant que la parole libérée des conventions et des identités officielles – l’ouverture à ce que nous sommes – tâtonnements, brefs bonheurs, interrogations, expérimentations hors des prés carrés de notre éducation et de notre pas si bonne société… Le lien, le désir, l’amour, ne sont jamais comme dans les livres – ni conformes à ce qu’on nous en dit. ET ALORS ?

15 avril 2008

Délicieuses enfants

Soi-disant virginité, test de grossesse, résultat positif, et grande crise d'hystérie à l'africaine à la clé. - De toute façon, je ne me vois pas avec un môme - avait-elle dit à sa copine en entrant dans nos locaux. - Moi non plus, avait rétorqué celle-ci, enceinte de quatre mois.

Elle

Nous l’appellerons L. Elle a seize ans, elle est enceinte, adressée par l’assistante sociale de son collège – elle raconte une étrange histoire de soirée au cours de laquelle elle se serait fait agresser – elle ne se souvient plus de rien, sa grossesse est une conséquence de cela, voilà tout. Elle semble très adulte pour son âge, se veut rassurante, et je pointe très vite qu’il lui est sans doute difficile de faire confiance, à l’assistante sociale comme à moi. Elle acquiesce, entrouvre une porte sur les adultes jamais fiables, laisse entrevoir des démêlés précédents avec les services sociaux mais ne s’étend pas sur la question.

Elle est charmante, tranquille en apparence, et… complètement isolée. Dans l’obligation de choisir un référent majeur pour l’IVG, elle désigne une vague tante qui, fait exceptionnel, sera disqualifiée par l’équipe hospitalière qui l’accueille. Je pense un temps à prendre à titre personnel la responsabilité de l’accompagner… mais elle revient au RV suivant avec une copine majeure – je croise les doigts pour qu’elle ne lui fasse pas faux bond. L’assistante sociale, à qui j’avais demandé de m’éclairer davantage sur la situation avant de me décider, livre peu à peu des éléments de plus en plus préoccupants – situation irrégulière, hébergement chez une femme qui n’est pas sa mère mais qui a sur elle l’autorité parentale, elle-même sans-papiers, et qui lui fait élever ses propres enfants, la maltraite, probablement ; nous avons l’une et l’autre l’intuition que la soi-disant agression anonyme pourrait être une façon de couvrir… le compagnon de cette femme. Il y aurait des antécédents semble-t-il…

La question n’est plus alors de savoir s’il faut faire un signalement ou non : il faut, de toute évidence. La question, c’est de savoir comment le préparer ; comment ne pas rompre le fil très ténu qui la relie à nous, comment lui redonner confiance dans la possibilité d’être protégée, ré-intégrée à sa place de très jeune fille – alors même que la loi nous oblige à révéler ce qu’elle estime relever de sa vie privée. Sa conviction, est qu’elle se protège en se livrant le moins possible ; notre souhait, serait de lui ouvrir un espace de parole et de protection ; mais à cette enfant grandie trop vite, qui raisonne comme une adulte, comment le proposer ?

06 avril 2008

Dansoir

Sur le parvis de la BnF, un chapiteau de bois est monté qui abrite pour deux mois une compagnie de danse contemporaine. Un théâtre à l'ancienne, piste ronde et velours rouges, des miroirs et des verres taillés partout comme sur un vieux carrousel. Hier, un orchestre reprenait diverses chansons du répertoire français, et nous avons pris tous les quatre une hilarante leçon de danse dite contemporaine - prétexte à amener sur la piste jeunes et vieux - même les ados, si souvent hésitants, maladroits, se sont laissés séduire ! Un bal bon enfant, et pour les nôtres, des paillettes plein les yeux.

03 avril 2008

Avril

Avril 1994 - deux amoureux de fraîche date, de longues balades à moto, les sandwiches grecs du Pentadactylos. Avril 2008 : il y a désormais deux motos, qui roulent côte à côte et chacun un mouflet ravi en passager, le Pentadactylos est fermé mais on peut toujours manger des falafel sur les bords de Seine. Elsa veut savoir, est-ce que ça vole les bateaux-mouches, danse sur le Point Zéro devant Notre-Dame et se demande si la cathédrale, illuminée par le soleil couchant, est en or...

27 mars 2008

Agréablement surprise

"Je suis ravi de gagner ma vie en disant ce que je ne m'attendais pas à dire." Ca me plaît. La liberté d'être soi, l'émergence, la reconnaissance de la richesse humaine propre à chacun comme matière première, fonds de commerce. Un autre cadeau du même monsieur, une citation de Nietzche paraît-il écrite à l'encre sympathique sur les murs de ses locaux : "Ce n'est pas moi qui suis fou, ce sont les autres qui sont normaux." Et encore : "Ici, nous nous intéressons immodéremment à la personne." Venue accomplir une formalité administrative, je suis repartie en me demandant ce que je pourrais effectivement amener dans ce monde-là - celui de l'entreprise - précisément parce que je suis issue d'un autre - celui du soin et de la relation.

25 mars 2008

L'essentiel et l'accessoire

Où peut-on écrire et lire - sans rire ! - des perles de ce genre ? Dans mon Elle, chaque semaine... Y a pas à dire, c'est un métier, rédactrice de mode. J'adore. J'adore savoir chaque semaine que les ballerines sont les nouvelles babies, ou le jean large (que je n'ai pas manqué d'acheter, et même plus, de me faire offrir...) le nouveau slim.

Plus l'insecte est incongru, plus la tenue sera classe. Une chaînette matinée d'araignées et un beau tailleur-pantalon : c'est glam' et mystérieux. (Ah oui ?!?)

Les socques : ça ressemble à nos compensées bois chéries... mais le twist créatif en sus ! A chic-iser absolument. Ces chaussures-là font un effort luxe, à vous de poursuivre le propos avec une tenue cocktail. (C'est vrai que ça donne tout de suite un sujet de conversation...)

...un sac peut se gérer à toute heure. Usuel pour prendre l'avion, il apporte une touche de chic à une tenue décontractée. Party-cool en soirée, il soutient très bien la mini-robe de nuit. Au top pour la vie de tous les jours, il veut bien partager jean et top trop lâche pour conserver un minimum de distinction. (Sans blague ?)

Bijoux et babioles

Le téléchargement, c'est souvent de la consommation musicale fast-food - vite désiré (la sortie de tel ou tel nouvel album), vite écouté (sans l'attention autrefois consacrée à l'écoute d'un nouveau disque), vite oublié. Ce qui passe la première écoute - parce que c'est facile, sans aspérités - easy listening - ne passe généralement pas la deuxième - parce qu'ennuyeux ou convenu, et basta, hop ! A la corbeille et au suivant. Quelquefois un titre sort du lot... Je me rends compte que je ne prends pas toujours le temps d'écouter chaque chanson en entier - ça m'interroge, parfois. Alors, quand une première chanson me séduit, que la deuxième me fait rire, et que de fil en aiguille j'écoute l'album intégralement, ravie par les atmosphères successives, le travail des textes, l'interprétation malicieuse, c'est l'exception qui confirme la régle ! Plaisir intégral, les Bijoux et babioles de Juliette. C'est intelligent, drôle, parfois émouvant (Aller sans retour), merveilleusement écrit, et finement interprété. Rien à jeter ! Juliette sait raconter les histoires, manie la langue avec une élégance rare, et nous balade avec bonheur... celui-là - je vais l'acheter.

19 mars 2008

Je rêve !

Ce matin, je m'accroche avec la Zaza sur une histoire de chaussons. Après avoir insisté à plusieurs reprises, cherché à sa place lesdits chaussons dans le souk qui lui tient lieu de chambre, je monte le son et lui enfile manu militari ses ballerines rouges. Deux minutes après, je vois arriver une Elsa pieds nus et furibarde qui me dit (texto !) : Toi tu peux pas CONTROLER MA VIE ! C'est moi qui dois décider si je mets mes chaussons ou pas ! Parce que moi je suis grande ! Et Mammie quand j'enlève mes chaussons elle me laisse TRANQUILLE ! (Pfouuuuu ! Qu'est-ce que ce sera quand elle aura quatorze ans... En attendant, inutile de dire qu'elle a bénéficié d'un net rappel à propos de qui décide pour elle, jusqu'à nouvel ordre... ainsi que sur les différences éducatives inter-générationnelles...)

Déboussolée

Hier – deux fois seize adolescents, les mêmes questions qu’à l’accoutumée sur le corps, ses transformations, la rencontre avec l’autre, l’abîme entre les représentations de la sexualité dans cette société et ce qu’ils ressentent, vivent, espèrent. A l’issue de l’intervention, comme souvent un mot de gratitude sur le discours que j’essaie de leur tenir, que j’espère à la fois respectueux et sans hypocrisie. Mais aussi, pour moi, une interrogation : qu’est-ce qu’il en restera le jour venu ? Est-ce que ça leur est vraiment utile ? Ou s’agit-il d’un alibi, pour l’école et les parents, qui se défaussent d’une mission délicate, pour moi, qui vient défendre – quoi ? Une certaine idée du lien et de la parole…

Hier – une Ivoirienne de 28 ans, qui vit quasi-recluse depuis dix ans, affolée à l’idée d’être ramenée chez elle de force, et que la dépression pousse aujourd’hui à demander enfin de l’aide, s’appuyer sur les services sociaux, faire enfin confiance : « C’était ça ou je devenais folle. » Hébergements précaires, ménages au noir « Je ne voulais pas descendre sur le trottoir, ça ce n’était pas possible », amours hasardeuses et souvent déçues, la télévision et ses reportages sur les retours en charter pour principale compagne, la famille là-bas, fière d’avoir une fille en France et qui la croit heureuse, s’étonne qu’elle n’aie pas les moyens de revenir les visiter… Une jeune femme ravissante, qui s’étonne de retrouver la parole, essuie une larme discrète, et escamote le tout sous le grand rire des africaines – même pas mal, même pas peur.

Hier – l’ébauche d’un projet d’interventions sur les relations garçons-filles, dans des classes où une gamine de treize ans a été violée par deux de ses camarades.

Hier – un joli bébé sur les genoux d’une collègue, dont je reconnais la mère au sortir du cabinet de gynécologie – ce bébé-là arrive après une glaçante série de fausses-couches, une ITG et une mort fœtale – quels fantômes y a-t-il derrière ces grands yeux noirs bordés de longs cils ?

Hier – dans la salle d’attente, la petite Guyanaise du post du 6 février, qui accompagne sa très enceinte copine et s’excuse d’avoir manqué son propre rendez-vous – que s’est-il passé ? Son amoureux a changé d’avis, elle a avorté la semaine passée à sa demande, comment se sent-elle ? Apparemment souriante – pas de trace perceptible, il n’est rien arrivé, cette promesse de maternité s’est évanouie, voilà tout.

Hier – une équipe désorientée par une jeune majeure désormais hors délais pour interrompre sa grossesse, et qui multiplie les passages à l’acte, nous transmet intacts son désordre et son impuissance – et je me lasse, de ne pas arriver à enclencher la pensée, de ne pas parvenir à faire saisir que nous ne sommes pas responsables de ce qui la meut et la dépasse, mais que nous avons au contraire à nous en dégager pour espérer la contenir…

Hier – je suis rentrée épuisée, découragée, à fleur de peau. Me demandant quel sens pouvait bien avoir ma présence au milieu de tout cela, et si j’évaluais réellement l’impact de cette place pour moi et les miens. La crise de larmes, la nuit passée – pour quoi, pour qui ?

13 mars 2008

Ecole(s) de vie

Et j’essaie que ma baraque soit surtout une école de vie. Elle doit faire prendre conscience à chacun de ses possibilités ou de ses impossibilités d’exercer ce métier. Si tout le monde peut être acteur, tout le monde ne peut pas être acteur de profession. C’est en se frottant aux obstacles qui jalonnent notre profession que l’élève doit découvrir par lui-même s’il est fait ou non pour ça. Il faut savoir bifurquer, et notamment grâce à l’école. Notre travail est d’y guider le rêve pour mieux accéder à la raison. …

Comment s’enseigne-t-il (l’art théâtral)? En essayant de « dé-censurer » la personne, d’exhumer son imaginaire le plus enfoui, de l’enrichir. Mais il faut faire très attention, car « chaque individu possède des possibilités qu’il est beaucoup plus facile de bloquer que de faire éclore ».

Interview François Florent (directeur du cours du même nom !), Télérama mars 2008.

Elle a dit, c'est important, trouver de la souplesse, parce que pour être thérapeute il faut pouvoir offrir cette souplesse, cette ouverture... une autorisation à ne pas se faire violence, à respecter son rythme propre. Elle a dit, il n'y a pas quelque chose comme une bonne ou une mauvaise élève... ce n'est pas important, ne pas tout faire. Elle a dit, vous ne trouverez pas tout, dans le sens de l'exhaustivité - mais vous trouverez à votre arrivée, le tout dans cette continuité, de tout ce qui s'est déposé auparavant. Elle a dit quelquefois un petit bout suffit à comprendre, et à avancer - comme dans le temps d'un entretien il n'y a pas tout, et ce n'est pas grave.

"Les chemins il y a un poète espagnol qui dit Caminante no hay camino se hace camino al andar. Je traduis Marcheur il n y a pas de chemin c'est nous qui faisons le chemin en marchant."

Berta Vega, formatrice Cifp

12 mars 2008

La Consolante

Et puis, ça n’existe pas, des gens pas amochés par la vie. (…) et c’est plutôt une chance, d’être ou d’avoir été amoché par la vie. C’est signe que c’est vivant à l’intérieur, que ça palpite encore. (…) Si je vous demande si vous êtes cabossée par la vie, vous aussi ? Ce serait indécent de répondre oui. Vous la connaissez, ma théorie de l’orange ? Non, eh bien l’orange, c’est la Terre. La minuscule étiquette, là, ce sont les gens qui mangent à leur faim tous les jours. Maintenant, déchirez-la en deux, cette étiquette, et ne recollez que la moitié. Elle représente les habitants de cette planète qui font trois repas par jour et qui sont aimés. Si vous avez l’honnêteté de reconnaître que, oui, vous vous trouvez sur ce minuscule bout de papier, alors chut… Mais on a quand même le droit de se plaindre, heureusement !

Interview Anna Gavalda

02 mars 2008

Parenthèse

Une maison sous les toits, huit jours de silence et de solitude, huit jours d'échanges et d'amitié, huit jours pour lire, écrire et réfléchir, boire des litres de thé Mariage, acheter LE jean parfait, aller voir les tendres clichés de Boubat et les délires devenus oeuvres d'art de Louise Bourgeois, tester le Vélib', craquer pour les tissus chinois de Petit Pan, boire un verre de vin chez La belle Hortense, découvrir une jazzeuse petite Za et un duo lyrique à Saint-Merri, aller au cinéma - le délicieux Be kind rewind et PS I love you, parfait navet dont surnage cette phrase : Nous sommes tous seuls. Mais c'est ce qui nous rassemble. Cette idée m'aide, parfois.

19 février 2008

Les p’tits philosophes

La marraine de Léo lui a offert un livre de philo adapté aux plus jeunes - nous explorons donc l’un et le multiple, la nature et la culture… Léo en redemande, c’est vrai que le livre se prête aux débats et aux digressions, ouvre des possibles plus encore qu’un livre d’histoires.

Ce soir, nous parlons de l’apparence et de l’être. Léo trouve un exemple : tu vois là, on dirait une petite sœur… eh bien en fait, c’est un cauchemar !!!

ET, à propos de raison et passion – Lulu commente : il faut un peu des deux… Léo : oui, il faut la passion pour avoir envie d’inventer, et la raison pour penser comment faire. (Là, j’avoue, je fus épatée).

15 février 2008

Chaleur humaine

même si nous n'appelons pas, nous pensons fort à vous et sommmes tout à fait prêts à vous accueillir ensemble ou par morceaux... et serions ravis d'avoir de vos nouvelles... par n'importe quel moyen... Surtout, rappelle-toi que notre porte est toujours ouverte sans aucune condition que celle de ne pas être ailleurs !!!