20 juillet 2007

Ca commence bien...

Léo : Elsa des fois elle me gonfle grave ! Lulu pouffe de rire. Léo : Pourquoi tu te marres ? Lulu : Mais tu viens juste de la retrouver ! Et puis, c'est la façon dont tu le dis... c'est du langage familier. Léo : Je sais... mais on est en famille non ?

Elsa bougonne au motif que Léo a eu deux coloriages et elle un seul. Je l'envoie gentiment promener et ajoute, le bureau des plaintes est fermé ! Et là, j'entends Léo marmonner : C'est normal Papa il est pas là, alors le bureau des plaintes il est fermé...

18 juillet 2007

Trop-plein

Il a dit - il n'y a rien de physiologique - uniquement de l'émotionnel, pas seulement les derniers mois mais quelque chose de beaucoup plus ancien, de structurel - c'est votre manière à vous... il faut des mots. Mais des mots j'en ai, et des espaces pour les accueillir... simplement il y a des jours où ça ne suffit pas. Où c'est le corps qui trinque, le corps dont il faut prendre soin.

Hier je disais à une collègue -il est temps que je parte en vacances, je ne retiens plus les histoires des gens... comme si ma mémoire s'effaçait au fur et à mesure, saturée. Ce n'est pas tout à fait vrai bien sûr, il suffit d'un visage, d'une voix - mais quand je vois le nom sur le carnet de rendez-vous - rien...

Dans les 48 dernières heures, une révélation d'incestes transgénérationnels (jamais parlée hors famille auparavant), les prémices du cycle de la violence conjugale (violences verbales, jalousie délirante - un bébé de trois mois), une agression sexuelle dans l'enfance partiellement recouverte par une providentielle amnésie (qui voile probablement de l'intra-familial), l'agressivité passive de deux dépressives dont une dysmorphophobique, et pour terminer - un cas d'école sur les joies de la répétition et l'IVG comme symptôme - même âge, même contexte, même croisée des chemins - l'illusion de ré-écrire l'histoire, de maîtriser sa propre vie. Vivement les vacances.

Pépites

"Une dynamique souvent vérifiable m'interpelle pourtant. Tous les êtres sont émouvants de bonté et d'amour - même s'ils l'ignorent eux-mêmes, c'est ainsi qu'ils m'apparaissent - jusqu'à la sensible ligne de démarcation où viennent suppurer les conseils, le savoir théorique fraîchement acquis ou même ancien et qui doit à tout prix être communiqué. A ce moment se produit une dégradation des composantes chimiques de la relation : le visiteur a succombé au désir "d'aider" ! L'unicité, la singularité totale de la relation est perdue - car dans la rencontre de l'autre - ici, ce voyageur des mondes que d'aucuns appellent le malade -, n'est respectueux que le non-savoir radical. Ce qu'il vit, il est le tout premier à le vivre."

Et aussi :

"Un jour, tu seras. C'est cette promesse glanée dans un regard d'adulte qui a constitué mon trésor. L'éducation n'est qu'un tissage de regards."

Christiane Singer, Derniers fragments d'un long voyage

16 juillet 2007

Two weeks in Paris ;-)

Après le gentiment branque film de Julie Delpy, je joue à mon tour la touriste dans ma ville - cure de cinéma (aussi : Persépolis), déjeuners en terrasse, dîners improvisés, Paris by night en scooter... Presque aussi bon que ces flâneries sans homme et sans enfants, le luxe de pouvoir décider : j'ai la flemme... La flemme de courir dans le XVIIIème même pour écouter Marc Perrone, la flemme d'affronter la foule du Trocadéro un jour de feu d'artifice, la flemme d'aller voir le film de Lola Doillon alors que je peux rentrer et me faire couler un bain moussant.

Ce jour, pas de flemme mais une journée de vacances, Jardin des Plantes et Jardin des Pâtes... (Devant la vipère du Gabon... ah bon ?). Non, pas de vipère ni de Vincent Delerm, mais des échanges animés avec un couple d'autruches, une bébé orang-outang rétive à la pose photographique, et un petit renard de Sibérie. Et beaucoup de complicité - un grain de folie partagé, sans doute.

Au retour, un détour par la Fnac, le plein de livres pour l'été : L'absurde et la grâce, de Jean-Yves Leloup, les Leçons particulières d'Hélène Grimaud dont j'avais aimé les Variations sauvages, La touche étoile de Benoîte Groult, Un désir fou de danser, d'Elie Wiesel et Un secret, de Philippe Grimbert, trois dont j'attendais la parution en poche, un bouquin de Roustang sur l'hypnose, et les Derniers fragments d'un long voyage, de Christiane Singer. Suis comme une enfant devant une pochette surprise - par lequel vais-je commencer ?

Last but not least : savourer un melon en riant aux éclats toute seule devant La Noiraude, vache hypocondriaque et caractérielle : Vous en avez déjà mangé de l'herbe, vous, Docteur ?

15 juillet 2007

France Musique

14 Juillet, ah non, 15 du coup, 2h38, je suis réveillée par les premières mesures fortissimo d'un concerto pour piano bien connu (Chopin ? Rachmaninov ?). Le jeu est fluide, expressif, je souris dans mon lit en me demandant qui peut bien écouter du Rachmaninov à fond la caisse - mais pourquoi non, ça change du hard-rock du voisin. Et puis les morceaux se succèdent, le tempo est un peu rapide, certains sont inachevés, le répertoire change - quand les premières notes de Memory retentissent je me lève, curieuse... et constate que ce qui résonne dans la cour n'est pas un enregistrement, à la fenêtre de l'immeuble d'en face j'aperçois le clavier du piano, une chemise blanche, de longs cheveux attachés - et dans l'appartement deux ou trois jeunes personnes qui s'affairent, fin de soirée sage où l'on range la cuisine avant de partir.

En bas, trois jeunes cachés par les arbres applaudissent et commentent, je devine leurs ombres projetées sur le mur, les vois même esquisser une passe de rock. Petit moment de poésie et d'entente cordiale entre voisins - j'applaudis à mon tour, je suis la seule dans les étages mais au moins n'y a-t-il pas eu de protestations. En bavardant avec eux ensuite, j'apprendrai que notre soliste d'un soir a dix-huit ans, qu'il s'appelle Benjamin et qu'il a commencé le piano à l'âge de trois ans... Qui a dit que ça craint, les HLM parisiens ? Et que les jeunes d'aujourd'hui, etc, etc..?

14 juillet 2007

Vide-grenier

C'est le temps de ne rien faire, le temps d'être seule, le temps de profiter, de ranger aussi, l'intérieur et l'extérieur, et même, l'ordinateur ! En ouvrant les uns après les autres des fichiers aux noms oubliés, j'ai retrouvé ceci (2002) :

Jouer le jeu
Etre dans les temps
Simultanément
Etre ailleurs
Caresser ce rêve
Vivre quelques-unes de toutes ses vies
De toutes ces vies…
Danser au-dessus de l’abîme
Faire un pas de côté
Quitter la piste
Esprit voltigeant ailleurs…
Petites fugues
Voies (voix) parallèles
S’autoriser la discordance…
Pour respecter ses harmonies.
« Une valse à quatre temps
C’est beaucoup moins dansant… »
Nous ne choisissons pas toujours
De rompre les cadences
De rompre les rangs
De rompre les liens…
De la contrainte naît l’improvisation
Pas de création sans un cadre préalable,
Ne serait-ce que pour en mieux sortir…

Et aussi cela - sur les mots :

Le mot silence… celui qui contient tous les autres. Le mot fragile… l’idée d’une tension, d’un être sur le fil, toujours au bord de la chute… « Ce qu’il y a de bien avec les fêlés, c’est qu’ils laissent passer la lumière. » Le mot souffle… celui qui anime ; plus doux que l’étymologiquement proche enthousiasme. Plus modeste aussi, l’enfant qui soupire, la brise légère, plutôt que le mistral ou la tramontane… Le mot fertile, et ses promesses de moissons.

Je ne crois pas à la possibilité d’infliger la vie à quelque mot que ce soit… Ne sont vivants que ceux qui circulent d’un être à l’autre, que ceux qui s’inscrivent dans une histoire, dans une rencontre. Après… on ne devrait jamais relire les lettres d’amour… Les livres peut-être – peut-être pas : après l’éblouissement, il est trop tard… Pourtant : relire les mots, et même les lettres des autres, Kafka etMilena, Apollinaire et Lou…

Je réalise : je n’aime pas les mots pour eux-mêmes, même quand ils ont un joli son (tintinnabuler ; fragrance ; escarcelle…) mais pour les liens qu’ils tissent. Pour les forêts d’images qu’ils font parfois croître en nous. Pour les chambres d’écho qu’ils mettent en résonance… Pour leur extraordinaire capacité parfois à nous atteindre en profondeur, et bien plus loin que ne le pourrait une caresse. Parce qu’ils abolissent momentanément la distance à cet Autre, qu’il soit assis près de moi, ou à portée de voix, ou à portée de lettre… Parce qu’ils nous ouvrent la porte au « mentir vrai », à la création de mondes.

Trésors partagés ;-)

"Bateson s'est toujours méfié du désir volontaire et conscient de provoquer des changements. Il y voyait l'ombre de cette angoisse existentielle que l'homme s'évertue à exorciser en apportant des réponses partielles et prématurées aux grandes interrogations de l'existence. Pour lui, la meilleure réponse à une question était d'arriver à formuler une question plus large, plus englobante. Certainement pas de donner une recette précise qui, si elle nous permet de "piéger" les hasards des changements ou de l'évolution des systèmes, risque fort d'amputer, fût-ce par ignorance, certaines boucles de régulation essentielles, laissant ainsi des cicatrices inesthétiques dans le tissu de la structure qui relie les êtres et les choses dans le monde naturel."

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"Ce qui compte ce n’est pas de savoir si on est bon ou mauvais, ce qui compte c’est de savoir quelle part on élit…".
C’est réduire l’humanité à un certain manichéisme, certes, et il faudrait trier ou savoir ce qui permet de distinguer le bon du mauvais, mais j’ai trouvé que cela militait activement pour la vie.

Ces trésors n'ont rien en commun (quoi que...), si ce n'est d'avoir été partagés par des êtres que j'aime, d'être passés de la mail box à la care box.

12 juillet 2007

Picture Box ?

Filmer, voilà ce que j'ai voulu faire, pour piller, pour ne rien perdre, pour retenir l'enfance, pour garder quelque chose du regard des hommes et de l'instant.

C'était naïf et présomptueux, comme de cueillir sous la tuile déplacée le rayon de soleil avec la main et le glisser entre les pages d'un livre. (...) J'épinglais des instants. J'ai aimé faire cela mais je n'ai regardé le monde que dans l'étroire fenêtre de mon appareil. J'ai aimé tricher avec le vécu, j'ai inventé, recousu, sculpté autrement la réalité proposée. J'ai occulté une part de l'essentiel. J'ai filmé l'instant sans le vivre jamais. J'avais peur de le perdre.

J'étais rémoin. Difficile de mettre le coeur en image. Pourtant, c'était cela aussi, parfois, la poésie, l'autre regard, le jeu des mots, des assemblages qui étaient le sens même.

Bernard Giraudeau, Les dames de nage