30 août 2020

L'Esprit souffle où il veut...

J'ai toujours beaucoup aimé cette phrase ; j'ai ressenti ce souffle à deux reprises cette semaine, sous deux formes très différentes, mais qui l'une et l'autre interrogent notre rapport à ce qui nous dépasse...

Chez ce patient, scientifique de haut niveau, modèle de rationalité, qui a perdu son père très jeune et s'est vu offrir pour son anniversaire (et à l'âge auquel son père est décédé) une troublante visite chez un medium, qui s'est de surcroît déroulée entre deux étranges "coïncidences". Au moment où il partait pour se rendre au rendez-vous, il a croisé un motard roulant sur la même moto que son père (un modèle ancien donc, qu'on ne voit plus nulle part) ; quand il en est revenu, le motard, qui n'habite pas son quartier, repartait...

Chez cette autre, jeune infirmière qui a pris la vague du COVID en service de réanimation, puis est partie faire une retraite de yoga dans les montagnes - ce qui représentait un énorme challenge pour elle (groupe inconnu, pratique récente, rupture avec ses repères habituels). Et qui m'appelle en larmes, non de chagrin mais d'émotion : elle est restée là-bas, en se mettant au service de la communauté. Elle pleure, mais de bonheur, en disant que c'est la première fois qu'elle se sent baignée dans l'Amour, et dans une vie simple qui a du sens pour elle. Elle hésite à rentrer à Paris, à continuer à contribuer à un système de soins de plus en plus déshumanisé et maltraitant, pour les soignants comme pour les soignés. Sa joie me bouleverse, ses interrogations aussi...

En aucun cas je n'ai envie de ramener leurs témoignages à des concepts cliniques, et moins encore à de la pathologie, même si je connais les fragilités de l'un et de l'autre. J'ai plus envie de me faire toute petite devant le mystère...

28 août 2020

Simple, basique

Quelquefois, le bonheur, c'est aussi simple que ça : finalement, les enfants sont là pour le dîner, et puis Jade nous rejoint, et puis Evan aussi, je cuisine en chantant avec Léo, un verre à la main, on beugle tous les deux dans la cuisine, on se filme en train de faire les cons avec Chamade dans le rôle de Simba dans l'Histoire de la vie, Ronan revient avec les super flans de la Kremlinoise, et la vie est belle quelques heures. 

27 août 2020

Voilà, c'est fini...

Après dix-huit mois de collaboration joyeuse, et en partant pour un très beau projet ailleurs. Mais ça ne va pas sans un petit pincement au coeur, parce que ce n'est pas si fréquent, une institution à taille humaine, une direction de bonne volonté, une équipe de collègues psys multi-référentielle et psychiquement vivante. Souvent dans les équipes, le psy est le seul de son espèce...


Après la violence du départ de la Cité, le silence radio lors de celui de Fournier, partir ici avec un petit mot, un petit cadeau, mais aussi et peut-être sans doute surtout avec ce qui s'est dit lors des échanges informels autour d'un pique-nique ça fait un bien fou, et ça me laisse un brin nostalgique aussi. Il y avait longtemps que je n'avais pas entendu parler de mon implication, de ma générosité, de ma présence soutenante, de mon sourire aussi  - pourquoi attendons-nous toujours que les gens partent pour leur dire ce pour quoi nous les apprécions ? 

Pas si simple non plus, de se séparer des suivis encore en cours. J'en connais certains depuis mon arrivée dans l'association ; j'ai littéralement l'impression de les avoir vus grandir ! Avec d'autres, la rencontre s'est faite au téléphone pendant cette période d'épidémie ; même sans les avoir jamais vus, des liens forts se sont noués avec ces voix sans visages, pour lesquels la permanence a été un filet de sécurité, un fil d'Ariane... Je les ai confiés aux collègues remplaçants comme j'aurais déposé un bébé dans les bras d'un ami : avec beaucoup de douceur et un brin d'émotion. 

Avec eux aussi, ce temps est celui des jolis retours et des remerciements. Je viens de raccrocher d'un appel avec celle qui fut ma première patiente Apaso ; elle a pu me dire ce qu'elle voit du chemin parcouru, remercier pour le respect de son rythme (et Dieu sait que je me suis inspirée du renard du Petit Prince), et me faire part de son souhait de continuer ce chemin auprès des collègues : il n'y a pas de plus belle récompense pour moi, que cette jeune femme si difficile à apprivoiser ait aujourd'hui un peu plus confiance dans la rencontre avec l'autre, et dans la valeur de la parole. 

22 août 2020

Amsterdam

C'était joyeux, de faire découvrir la ville à Ronan ; et de découvrir qu'au quatrième passage, je ne me lasse pas de ses canaux paisibles, des longues balades à pied, ni d'aller saluer Van Gogh et Vermeer (j'ai redécouvert la Femme en bleu, qui me touche plus encore que la Laitière). Un séjour beau comme un cliché, avec des vélos, des fleurs et des paradis (gentiment) artificiels, une balade au Vondelpark et des maisons à pignons aux façades penchées. Quelques bonus cependant, deux petits musées moins fréquentés, le House Boat Museum et le Canal House Museum, une visite privée en vélo sur le thème du Street Art dans le quartier des chantiers navals, et surtout un hébergement de rêve, dans un house boat aux hôtes attentionnés. Ce plaisir de prendre le petit déjeuner sur notre petite terrasse privée, ou de plonger dans le canal après les longues marches...

Amsterdam bis

Drogue, prostitution, COVID : ce que je trouve intéressant dans cette ville, c'est la cohérence de leur approche, avant tout pragmatique : ne pas ignorer le problème, mais chercher à l'encadrer intelligemment, en faisant appel à la responsabilité du citoyen, et non en l'infantilisant ou en le culpabilisant. Ce serait tellement bien, si nous nous en inspirions un peu... Avec la conscience que cette approche a aussi ses risques et ses limites ; mais le postulat de base me semble tout de même plus juste : s'appuyer sur la conscience, la réflexion, la liberté, bref, ce qui permet de croître en humanité.

15 août 2020

Il paraît...

Il paraît qu'en Bretagne il pleut souvent - mais pas dans "ma" Bretagne, ou alors le temps de buller une après-midi au frais, ou de laver un ciel d'orage.

Il paraît que les vacances en maison de famille génèrent inévitablement tensions et conflits ; c'est sans doute assez vrai, mais pas si cette famille n'est pas complètement la vôtre, ni si vous êtes habité(e) par un regard tranquille sur tous sans exception, un regard qui peut tout au plus être brièvement assombri par un instant d’agacement, mais qui revient vite vers la tendresse. 

Il paraît que même les dragons les plus apparemment féroces se révèlent parfois simplement être maladroits, ou peut-être malheureux - et plus attentionnés qu'on ne pourrait le croire. Il paraît aussi que les enfants grandissent beaucoup plus vite que ce que l'on pensait...

De plus en plus avec le temps j'ai la sensation d'entendre tout ce qui n'est pas dit, de ressentir les émotions qui circulent entre les uns et les autres. Ce n'est pas toujours confortable, mais c'est riche d’enseignements, et me ramène immanquablement à cette petite phrase de la grand-mère de Theresa : What is not to love ?

Il paraît qu'on oublie souvent de remercier pour ce que l'on a : j'ai l'impression de ne jamais avoir eu autant ce sentiment de gratitude, cette conscience des petits moments de bonheur qui s'ajoutent les uns aux autres, et de la chance d'avoir de surcroît des amis, anciens ou nouveaux, à deux pas de cette maison d'exception, dans cette région magnifique.

Pour vivre heureux, vivons perchés ;-)
Il paraît que ces petits moments de bonheur se nichent partout pour peu qu'on y soit attentifs...

Dans le mouvement du corps : danser avec Oriane dans la salle des mariages, nager un peu au large, randonner sur les falaises de Plouha avec Ronan, faire la course avec Audouin (perdre lamentablement bien sûr), ouvrir les bras pour un câlin - et finir par faire sauter les barrières du COVID pour rétablir les bisous, mais chut !

Dans une amitié naissante aux échanges à coeur ouvert sur la plage de Trégastel. Dans un coucher de soleil aux lumières blondes. Dans la joie d'entendre le rire d'Elsa, adoptée par sa brochette de cousins de coeur. Dans les questions  futées d'Aymeric, dont j'aime décidément beaucoup le côté pince-sans-rire. Dans une toute dernière baignade, joueuse et douce...


Dans des sensations d'enfance : un peu de volley en fin de journée sur la plage, chahuter avec le chien, enterrer Marin dans le sable jusqu'au cou. Dans le plaisir d'évoluer avec aisance à quinze ou vingt mètres du sol à l'accrobranches, sans m'obliger pour autant à faire le saut dans le vide qui conclut le parcours. 

Dans la créativité invraisemblable de la nature au jardin de Pellinec. Tellement de diversité dans ces couleurs, formes, textures, parfums, et la main de l'homme qui ici enfin ne force rien mais protège, agence, caresse... Pellinec est le rêve réalisé d'un amoureux fou du végétal, et ça se sent - ce n'est pas un jardin comme les autres.

Dans un café pris au soleil sur le port de Paimpol. Dans la saveur des huîtres, que j'ai appréciées vraiment pour la toute première fois (penser à faire un voeu). Et dans celle, inimitable, des galettes caramel beurre salé - mes absolues préférées : mais quel dommage de mettre ce caramel dans des crêpes ?!?  #teamgalettes

Dans la profondeur de certains regards - je pense tout particulièrement à la bienveillance rayonnante de celui de Cécile, à la douceur infinie de celui d'Audouin, à ce qu'il y a de tellement touchant dans la vulnérabilité et la gentillesse de celui de Mamé.

Il paraît que la beauté sous toutes ses formes nettoie le coeur et le regard : de ce temps de vacances, je reviens lumineuse.