28 février 2021

Une journée paisible

22 février 2021

Est-ce que ça suffit ?

Je me sens si perdue ces jours-ci quand la nuit tombe. Je n'ose pas regarder en arrière, je n'ose pas regarder en avant.

J'ai peur du passé ancien, du temps des avancées confiantes, la main dans la main, des éclats de rire des enfants, du temps où tout était possible, où le mot foyer avait un sens, où la créativité amoureuse et réciproque allait de soi. Je m'interdis d'y penser. Je ne pense qu'à ça.

J'ai peur du passé récent, des espoirs déçus, d'un gyrophare dans la nuit, de cette maison où la vie s'enlise, où la parole ne circule pas. Je m'interdis d'y penser. Je ne pense qu'à ça.

J'ai peur de l'avenir, qui oscille entre une vie éteinte et une vie précaire, mais toujours dans une solitude croissante ; j'ai peur de ne pas trouver la force de continuer à accompagner mes enfants, seule - j'ai peur de la trouver aussi, comme c'est en fait déjà le cas depuis des années. Je m'interdis d'y penser. Je ne pense qu'à ça.

J'ai peur que le meilleur ne reste pas à venir - à l'échelle individuelle, familiale, sociale, à l'échelle de notre Terre aussi. Je m'interdis d'y penser. Je ne pense qu'à ça.

En attendant...quoi ? je ne sais pas, il me reste cette étincelle de vie qui me caractérise, cette envie de bonheur qui me remet debout sans cesse, m'invite à semer le chemin de mille petits instants précieux, un pas après l'autre, toujours. 

Chanter à tue-tête en voiture avec Elsa. Savourer un pot-au-feu de YoYo. Prendre un train, partir quelques jours. Marcher seule sur la plage. M'offrir une poignée de crevettes, une sole fraîche. Revoir un film de Sautet, un verre de Médoc médaillé à la main. Papoter des heures au téléphone, confronter les regards, me sentir accompagnée par la tendresse attentive de ceux qui m'aiment.

Lire, écrire, chanter, danser. Travailler aussi, mais oui : être émue aux larmes par une patiente, portée par une équipe stimulante et chaleureuse.  Est-ce que ça suffit ?

16 février 2021

Marcher sur les nuages

Cette semaine, une patiente italienne m'a appris que l'équivalent italien de "elle n'a pas les pieds sur terre" était "elle marche sur les nuages". J'adore ! Je n'ai malheureusement pas cette liberté, mais j'en retrouve la sensation à chaque fois que je m'offre le luxe d'un massage au Laï Thaï... Le paradoxe, c'est que c'est précisément cette sensation qui me fait redescendre sur terre, habiter à nouveau mon corps.

12 février 2021

Synchronicité

Quelques minutes après avoir publié le billet précédent, m'est arrivée cette possible réponse :
 
Sans une pensée ou un mot, elle a lâché prise.
Elle a lâché la peur.
Elle a lâché les jugements.
Elle a lâché la confluence des opinions qui bourdonnent dans sa tête.
Elle a lâché le comité d’indécision qui se trouve en elle.
Elle a lâché toutes les « bonnes » raisons.
Totalement et complètement, sans hésitation ni inquiétude, elle a lâché prise.
Elle n’a demandé de conseils à personne
Elle n’a lu aucun livre sur le lâcher prise
Elle n’a pas cherché dans les Écritures. Elle a juste lâché prise.
Elle a lâché tous les souvenirs qui la retenaient.
Elle a lâché toutes les angoisses qui l’empêchaient d’avancer.
Elle a lâché la planification et tous les calculs pour le faire correctement.
Elle n’a pas promis de lâcher prise.
Elle ne s’est pas renseignée dessus.
Elle n’a pas inscrit la date dans son agenda.
Elle n’a pas fait de déclaration publique, ni mis d’annonce dans le journal.
Elle n’a pas regardé la météo, ni lu son horoscope du jour.
Elle a juste lâché prise.
Elle n’a pas analysé si elle devait lâcher prise ou non.
Elle n’a pas appelé ses amies pour en discuter.
Elle n’a pas suivi une thérapie psychologique et spirituelle en cinq étapes.
Elle n’a pas appelé à la prière.
Elle n’a pas dit un seul mot.
Elle a juste lâché prise.
Personne n’était là quand c’est arrivé.
Il n’y a pas eu d’applaudissements ou de félicitations.
Personne ne l’a remerciée ou louée.
Personne n’a rien remarqué.
Comme une feuille tombée d’un arbre, elle a lâché prise.
Sans effort. Sans lutte.
Ce n’était ni bien ni mal.
C’était ce que c’était, et cela seulement.
Dans cet espace de lâcher prise, elle a laissé Être.
Un léger sourire est apparu sur son visage.
Une légère brise a soufflé à travers elle.
Et le soleil et la lune étaient désormais plus brillants.
Ernest Holmes

Elsa

Pas la petite (qui n'est plus si petite), mais la grande, ma prof de chant. Qui m'a cueillie, et mis les larmes aux yeux, en me restituant ceci : je te vois comme quelqu'un de très vivant et joyeux, une femme rayonnante, je pense que la vraie Lucile c'est ça, je le perçois par moments dans ton chant, mais je sens bien aussi que c'est comme si c'était étouffé, arrêté, comme si tu n'osais pas ou plus l'exprimer, le faire résonner dans ton corps aussi. Ce ne sont peut-être pas exactement ses mots, mais c'est indéniablement l'idée, et non moins indéniablement bien vu. Le message a d'ailleurs été redoublé dans la semaine... mais la question reste entière : quelle décision faut-il prendre ?

09 février 2021

Fluctuat

Je suis fatiguée, même épuisée, j'ai l'impression de toujours pédaler à fond comme un petit canard sous l'eau même si ça ne se voit pas.

C'est une patiente qui l'écrit, ce pourrait être moi parfois... en tout cas l'image de cet effort constant, mais invisible pour les autres, m'a beaucoup émue. 

Et puis, ça repart - la même écrit : ...à ce moment j'ai l'impression d'être au bout de ma vie, et puis je retourne au milieu. J'adore la poésie involontaire de cette compréhension littérale de l'expression, qui dit si bien l'équilibre - provisoirement - retrouvé.