30 avril 2008

Douces chimères

Qu’on songe à ce que Bertha signifie pour Josef : fuite, fuite périlleuse, fuite face aux dangers de la vie confortable. Et passion, aussi, et mystère, et merveilleux. Elle est la grande délivrance qui lui accorde un sursis à la condamnation à mort. Elle est dotée de pouvoirs surhumains, elle est le berceau de la vie, la mère qui pardonnera tout cequ’il a en lui de sauvage et de bestial. Elle lui assure une victoire acquise acquise d’avance sur les autres prétendants, un amour constant, une amitié éternelle et une survie garantie dans ses propres rêves. Elle est un bouclier contre les ravages du temps, un rempart contre son gouffre intérieur, un filet au-dessus de l’abîme.

Bertha est synonyme de mystère, de protection et de salut ! Josef Breuer appelle cela l’amour. Mais en vérité cela a pour nom prière.

Irvin Yalom, Et Nietzsche a pleuré.

25 avril 2008

Happy Birthday

Décidément – il n’y a rien qui me réjouit tant que la parole libérée des conventions et des identités officielles – l’ouverture à ce que nous sommes – tâtonnements, brefs bonheurs, interrogations, expérimentations hors des prés carrés de notre éducation et de notre pas si bonne société… Le lien, le désir, l’amour, ne sont jamais comme dans les livres – ni conformes à ce qu’on nous en dit. ET ALORS ?

15 avril 2008

Délicieuses enfants

Soi-disant virginité, test de grossesse, résultat positif, et grande crise d'hystérie à l'africaine à la clé. - De toute façon, je ne me vois pas avec un môme - avait-elle dit à sa copine en entrant dans nos locaux. - Moi non plus, avait rétorqué celle-ci, enceinte de quatre mois.

Elle

Nous l’appellerons L. Elle a seize ans, elle est enceinte, adressée par l’assistante sociale de son collège – elle raconte une étrange histoire de soirée au cours de laquelle elle se serait fait agresser – elle ne se souvient plus de rien, sa grossesse est une conséquence de cela, voilà tout. Elle semble très adulte pour son âge, se veut rassurante, et je pointe très vite qu’il lui est sans doute difficile de faire confiance, à l’assistante sociale comme à moi. Elle acquiesce, entrouvre une porte sur les adultes jamais fiables, laisse entrevoir des démêlés précédents avec les services sociaux mais ne s’étend pas sur la question.

Elle est charmante, tranquille en apparence, et… complètement isolée. Dans l’obligation de choisir un référent majeur pour l’IVG, elle désigne une vague tante qui, fait exceptionnel, sera disqualifiée par l’équipe hospitalière qui l’accueille. Je pense un temps à prendre à titre personnel la responsabilité de l’accompagner… mais elle revient au RV suivant avec une copine majeure – je croise les doigts pour qu’elle ne lui fasse pas faux bond. L’assistante sociale, à qui j’avais demandé de m’éclairer davantage sur la situation avant de me décider, livre peu à peu des éléments de plus en plus préoccupants – situation irrégulière, hébergement chez une femme qui n’est pas sa mère mais qui a sur elle l’autorité parentale, elle-même sans-papiers, et qui lui fait élever ses propres enfants, la maltraite, probablement ; nous avons l’une et l’autre l’intuition que la soi-disant agression anonyme pourrait être une façon de couvrir… le compagnon de cette femme. Il y aurait des antécédents semble-t-il…

La question n’est plus alors de savoir s’il faut faire un signalement ou non : il faut, de toute évidence. La question, c’est de savoir comment le préparer ; comment ne pas rompre le fil très ténu qui la relie à nous, comment lui redonner confiance dans la possibilité d’être protégée, ré-intégrée à sa place de très jeune fille – alors même que la loi nous oblige à révéler ce qu’elle estime relever de sa vie privée. Sa conviction, est qu’elle se protège en se livrant le moins possible ; notre souhait, serait de lui ouvrir un espace de parole et de protection ; mais à cette enfant grandie trop vite, qui raisonne comme une adulte, comment le proposer ?

06 avril 2008

Dansoir

Sur le parvis de la BnF, un chapiteau de bois est monté qui abrite pour deux mois une compagnie de danse contemporaine. Un théâtre à l'ancienne, piste ronde et velours rouges, des miroirs et des verres taillés partout comme sur un vieux carrousel. Hier, un orchestre reprenait diverses chansons du répertoire français, et nous avons pris tous les quatre une hilarante leçon de danse dite contemporaine - prétexte à amener sur la piste jeunes et vieux - même les ados, si souvent hésitants, maladroits, se sont laissés séduire ! Un bal bon enfant, et pour les nôtres, des paillettes plein les yeux.

03 avril 2008

Avril

Avril 1994 - deux amoureux de fraîche date, de longues balades à moto, les sandwiches grecs du Pentadactylos. Avril 2008 : il y a désormais deux motos, qui roulent côte à côte et chacun un mouflet ravi en passager, le Pentadactylos est fermé mais on peut toujours manger des falafel sur les bords de Seine. Elsa veut savoir, est-ce que ça vole les bateaux-mouches, danse sur le Point Zéro devant Notre-Dame et se demande si la cathédrale, illuminée par le soleil couchant, est en or...