05 avril 2025

Sourde oreille

Bon mais ces jours-ci je ne suis pas sûre qu'on soit même à 12/20 - il y a la grande Histoire qui semble foncer dans le mur chaque jour un peu plus vite, la Terre qui brûle, et nos petites vies, l'avenir de mes enfants déjà grands, chacun avec ses questionnements, légers ni l'un ni l'autre pour l'instant. J'ai peur pour ce monde, j'ai peur pour eux.

Et puis ces jours-ci pour moi il y a cette oreille en folie qui démultiplie acouphènes, migraines et vertiges, menaçant à la fois mon exercice professionnel et tellement des choses que j'aime dans cette vie - annulation d'un concert que je me faisais une joie de partager avec Léo et Elsa, peut-être abandon de la chorale (?), sillonner Paris oui mais avec des bouchons d'oreille, aller bavarder avec ceux que j'aime dans un café, un restaurant, c'est non, le niveau de bruit n'est plus tolérable pour le moment. L'ORL dit, il faut vous calmer madame, la fatigue et l'anxiété décuplent vos symptômes - elle est marrante la dame... 

J'ai peur - que ça ne revienne jamais à la normale, des dépenses de santé qui se démultiplient, des résultats de l'IRM avec injection qui se profile, d'être appareillée, de finir chaque journée en pleurant d'épuisement parce que me concentrer sur la parole de mon interlocuteur en luttant contre l'acouphène d'un côté, l'hyperacousie compensatrice de l'autre, c'est infernal.

Il y a pourtant un effet de vérité là - dans ce double mouvement, une envie folle de faire la sourde oreille à toutes ces détresses, de fermer les écoutilles, et en même temps de l'autre côté ça rentre à flots, me submerge et m'abîme. Et puis "Sinon, il y a la vie", comme l'a soufflé François Roustang à Nicolas Demorand. Chercher des premiers secours. Du côté du corps - traitement(s), ostéo, massage. Du coeur - ne pas renoncer aux rencontres, amoureuses, amicales, humaines. De l'âme - chercher le Soi derrière les nuages du mental, cette part intangible et tranquille, ce silence contemplatif - un nénuphar flottant tranquillement entre la terre et le ciel.

04 avril 2025

Santé mentale

La vie est trop courte
pour souffrir sans remède
se ramasser sans demander de l'aide
la vie est trop courte
pour la vivre à demi
devenir son propre ennemi...

Jeanne Cherhal, qui chante... son traitement anti-dépresseur.

Et je me suis déconnecté avec cette idée que ça allait aller. Vraiment.(...) Ca va pas forcément aller, mais on VA y aller (...). Moi j'ai toujours voulu que la vie soit 20/20, j'attendais le moment où ça allait s'aligner pour que ça devienne 20/20 mais je crois que c'est en acceptant que ce soit toujours 12 qu'en fait on se retire la pression de la note.

Panayotis Pascot, cité par deux patients cette semaine.

Et puis Nicolas Demorand, qui assume un matin pas comme les autres sa souffrance psychique devant des millions d'auditeurs "Je suis malade mental dans un monde qui ne sait pas ce qu'est la maladie mentale. Qui pense, d'ailleurs, que ce n'est pas une maladie (...). La maladie mentale, sauf cas extrême, reste prise dans un nuage de mépris, de déni et de morale", écrit-il dans son bouleversant  petit livre Intérieur, nuit. 

Voilà - ça bouge, je crois. Et ça ouvre enfin la parole. C'est beau.