En guise d'introduction, quelques billets qui parlent de l'année passée... Une sélection partielle et partiale, qui aurait été différente hier et serait différente demain... Les autres billets, dans la Boîte à Bonheur (lien à droite).
10 décembre : Avec les enfants un atelier bateaux et "coins-coins" en papier, et puis apprivoiser le feu : l'allumer, l'entretenir, observer les flammes, faire flamber des papiers de couleur, jeter une poignée de gros sel pour le faire crépiter.
Le soir, un vin chaud et des crêpes devant la cheminée, dans une atmosphère de dialogue serein, et l'émergence de souvenirs d'enfance, de souvenirs de guerre. Plus tôt, une discussion sur l'importance de ceci : pouvoir se pardonner à soi-même.
30 novembre : Ma grand-mère m'a raconté plusieurs fois que quand j'étais enfant, je disais déjà que je voulais faire un métier qui me plaise, "parce que quand même c'est là qu'on est toute la journée". Hier, aujourd'hui, j'ai pris un vrai plaisir à travailler - rencontre inter-institutionnelle, préparation de nouvelles formes d'interventions scolaires, entretiens individuels ou de couple.
Le moment où je vois un regard s'illuminer, une connivence possible s'ébaucher, une première marche être franchie - parce que j'ai pu mettre des mots là où il n'y en avait pas, c'est un bonheur à part entière. Il ne s'agit pas seulement de la p'tite gratification narcissique du "J'ai tout compris" - ou, mieux encore, "Vous avez tout compris" ; la plupart du temps d'ailleurs je n'ai pas compris grand-chose bien sûr ; mais d'un sentiment profond d'être en accord avec ce qui m'anime. Donner sens ; donner voix ; donner place.
17 novembre : Manifeste : me suis entendue dire, au décours d'une conversation téléphonique, "Il n'y a plus que deux choses qui m'intéressent : ce qui est porteur de sens - ce qui donne, crée, a du sens ; et l'amour au sens large du terme, les moments d'amour partagé - là où je peux sentir de la chaleur, de la confiance, de la tendresse en présence."
25-26-27 octobre : C'est une grande boîte en bois faite à la main, avec des fermoirs métalliques. Dedans, dans des grandes enveloppes en kraft, les photos d'un passé révolu, des photos de famille, de ma famille, enfin, de la moitié maternelle. La plus ancienne a été prise à New York en 1898, elle montre deux petites filles presque effacées par le temps - une de mes arrière-grands-mères est née des amours d'un cuisinier et d'une femme de chambre des grandes compagnies transatlantiques, entre deux traversées, l'autre, lavandière sur les bateaux-lavoirs de la Marne, a collectionné les hommes et les enfants.
A chaque image jaunie les souvenirs reviennent, drames et joies mêlés - depuis toute petite j'adore ces incursions dans la boîte, les pièces du puzzle qui se mettent lentement en place, de récit en récit, les zones d'ombres qui s'éclairent - ou restent intactes. J'observe chaque détail attentivement - un regard absent, une toilette incongrue, une petite fille aux yeux tristes - comment savoir ? Les photos ne donnent pas de clés ; mais elles ouvrent à la parole, aux fils renoués.
Au soleil de Touraine, les enfants jouent à cache-cache dans le jardin, l'air est doux, ce matin nous avons vu de près des sangliers, des daims, des mouflons, des biches et des cerfs - proches à les toucher ; et ma grand-mère, qui vient de se faire offrir un vol en montgolfière pour ses 80 ans, nous parle de tout ce qu'elle aurait aimé faire encore, et qu'elle ne fera plus.
Et moi, je pense à tout ce que j'aime faire, et que je peux faire encore ; à tout ce que j'aimerais faire, et qui reste possible.
Et moi, je pense qu'un jour viendra, où il m'appartiendra à mon tour de témoigner de l'histoire, transmettre la mémoire, faire parler les silences, et les absents. Puisque, pour savoir où l'on va, il faut savoir d'où l'on vient.
14 octobre : Les Lettres à un jeune poète, je les avais lues adolescente, et puis j'étais entrée dans la poésie même de Rilke, qui m'avait semblé infiniment plus exigeante et belle encore. Aussi, suis-je arrivée au théâtre absolument non préparée à ce qui allait suivre : un texte d'une telle densité, que je n'ai eu d'autre choix que de m'en absenter par instants, replongeant au hasard dans des phrases à l'impact chaque fois plus fort, comme si la voix d'Arestrup venait me tirer de mon sommeil, me sortir de ma torpeur. Extrait :
"Nous n'avons rien à redouter. (...) S'il y est des frayeurs, ce sont les nôtres : s'il y est des abîmes, ce sont nos abîmes ; s'il y est des dangers, nous devons nous efforcer de les aimer. Si nous construisons notre vie sur ce principe qu'il nous faut aller toujours au plus difficile, alors tout ce qui nous paraît encore aujourd'hui étranger nous deviendra familier et fidèle. (...) Toutes les choses terrifiantes ne sont peut-être que des choses sans secours, qui attendent que nous les secourions." Rainer Maria Rilke, Lettres à un jeune poète
6 septembre : Une heure après l'autre, j'écoute, relance, ouvre des pistes. Dans le tissu lâche ou trop étroit des liens je suis les mailles filées et celles manquées, repère - et non, répare - les accrocs et les déchirures.
Rencontres d'un jour, souvent. De ce que je peux entendre, je ferais bien histoire… L'envie me revient, d'animer un atelier d'écriture d'histoires de vie, de permettre à chacun de dérouler le fil. A défaut, je prends des notes, caresse l'idée d'un recueil, comme une envie de leur offrir une trace fût-ce à leur insu, une envie de témoigner : il a vécu cette vie, elle a vécu cette autre, et cela compte - cela n'est pas égal. A quinze ans parfois une vie déjà si longue…
Un moyen pour moi aussi de m'en sortir plus indemne : car cela n'est pas rien, d'être dépositaire. Ecrire : transformer la charge, partager le secret sans trahir l'anonymat, ouvrir au moins à cet espoir : que cette parole ne soit pas perdue pour ( tout) le monde.
1er septembre : Métier
Un métier où être en première ligne de la souffrance de l'autre, tout en étant confrontée à une vaste impuissance, à l'acceptation sans cesse à renouveler de ceci : " J'en ai mis du temps à me répéter que c'était tout, que ce peu-là portait la plénitude de l'entier. "
Ici viennent s'échouer toutes les misères physiques, psychiques, affectives, sociales, sexuelles... ici viennent se dire la plupart du temps le temps d'un unique entretien (parfois le temps d'un petit bout de route, une initiation à la vie psychique, à la possibilité d'un autre chemin) ce qui n'a pu se dire, ne se redira peut-être jamais ailleurs. Parce qu'il n'y a pas le temps dans ces vies submergées, pas l'espoir, pas l'idée que cela peut être entendu, et que cela seul peut suffire - un temps - à redonner un peu d'air, un rai de lumière.
Ici viennent se poser les questions qui n'ont pas pu être abordées ailleurs, ici peuvent parfois être prononcés les mots qui ont fait défaut, voici ce qu'est, ce que peut être une femme, un homme, et voici ce que peut être leur rencontre, voici ce qu'est l'enfant, et voici ce droit bouleversant de chacun à choisir sa vie, ses amours, sa sexualité, ses modalités de rencontre avec l'autre, et la possibilité de devenir parent à son tour.
Ce n'est pas un hasard si je travaille ici, autour des liens du couple et de la parentalité, et c'est encore moins par hasard si j'interviens à ce moment précis, celui où s'ouvre une petite fenêtre qui sera très probablement refermée, celui où poser un instant ses valises, avant de reprendre la route.
Ce n'est pas un hasard si je travaille dans la prévention, dans cette longue chaîne de rencontres possibles qui permettront peut-être de sortir du piège, sûrement de reprendre souffle, se restaurer, se reposer un peu.
C'est cela que je veux être, oui (je me rends compte = je n'ai pas écrit, c'est cela que je veux faire, et l'implication n'est pas la même), c'est cela que j'entends, quand on me dit, je n'avais jamais parlé de cela avant, quand on me dit, merci pour l'espace de parole ouvert, quand je sens même au milieu de l'intolérable déposé ici un étonnement, une gratitude, la reconnaissance de la possibilité d'une parole humaine, prononcée, entendue.
3 août : Où l'on parle du couple comme d'un lieu de croissance mutuelle, de courte échelle (je t'aide aujourd'hui, tu m'aideras demain peut-être, ou bien plus tard, ailleurs que là où je m'attends), de présence donnée, de confiance inconditionnelle dans une réciproque capacité à évoluer, à grandir. Où l'on parle de l'amour comme de ce don inestimable, offrir à l'autre la liberté d'aller explorer le monde, (r)assuré de notre présence confiante à ses côtés.
15 juin : Gratitude : "Merci vers le haut, merci vers le bas, merci à l'espace entre les deux, merci dans toutes les directions, merci à ceux qui me permettent d'être heureuse aujourd'hui et merci à moi-même". Copyright : le grand-frère-de-Claire ;-)
Et, en plongée aléatoire dans un échange épistolaire ininterrompu : "...mais ce qu'il y a à retenir à mon sens c'est le désir, offrir autre chose qu'un miroir ou une chambre d'écho ; c'est la rencontre d'un je suis (qui ne se confond pas avec un j'exige ;-)) ; c'est l'acceptation du manque, comme dans l'histoire de la porte : user son énergie à ouvrir une porte, qui s'ouvre d'elle-même lorsque l'on renonce : elle ouvrait vers le dedans... l'intérieur."
Et encore "Laisse tomber la mousse" - Signé : Mme Eléphant
3 février : Pull marine : à la recherche d'un cadeau pour mon grand-père, je me surprends à enfiler des pulls L ou XL, essayant vaguement d'imaginer ce que ça pourrait donner, le XL me descend jusqu'aux genoux, trop grand, le L est trop grand juste ce qu'il faut, c'est bien ? Les papas et les grands-papas, on les voit toujours un peu plus grands qu'ils ne sont - avec nos yeux d'enfant. Souvenirs d'emprunts vestimentaires à l'adolescence, et aujourd'hui le sablier se retourne, c'est mon tour d'offrir du chaud, du doux et du réconfortant, à un homme qui vieillit… Un pull marine pour grand-père marin.
Pull marine bis : Où peut-on acheter des pulls qui auraient l'effet magique des "pulls-des-papas" ? Ce trop-grand-enveloppant-protecteur, ce sentiment de sécurité absolue, et l'odeur de la peau, qui n'appartiennent qu'aux souvenirs d'enfance, aux élans amoureux ? Et pourrait-on envisager un modèle spécial pour les sans-papa (perdu, parti, jamais vraiment rencontré...), un modèle "quand même", quelque chose pour nous donner ce je-ne-sais-quoi qui nous fonde, ce sentiment que quelque part quelqu'un peut nous ouvrir ses bras si nous en avons besoin ?
26 février : Exercice reconduit jour après jour, la Boîte transforme mon lien non seulement au regard mais aussi à la mémoire, répond à mon besoin de retenir. Mettre en mots pour moi, pour l'autre, même dans l'ellipse, c'est garder un peu, lutter contre la dissolution, un antidote au manque. Une réponse renouvelée à la question du devenir.
10 décembre : Avec les enfants un atelier bateaux et "coins-coins" en papier, et puis apprivoiser le feu : l'allumer, l'entretenir, observer les flammes, faire flamber des papiers de couleur, jeter une poignée de gros sel pour le faire crépiter.
Le soir, un vin chaud et des crêpes devant la cheminée, dans une atmosphère de dialogue serein, et l'émergence de souvenirs d'enfance, de souvenirs de guerre. Plus tôt, une discussion sur l'importance de ceci : pouvoir se pardonner à soi-même.
30 novembre : Ma grand-mère m'a raconté plusieurs fois que quand j'étais enfant, je disais déjà que je voulais faire un métier qui me plaise, "parce que quand même c'est là qu'on est toute la journée". Hier, aujourd'hui, j'ai pris un vrai plaisir à travailler - rencontre inter-institutionnelle, préparation de nouvelles formes d'interventions scolaires, entretiens individuels ou de couple.
Le moment où je vois un regard s'illuminer, une connivence possible s'ébaucher, une première marche être franchie - parce que j'ai pu mettre des mots là où il n'y en avait pas, c'est un bonheur à part entière. Il ne s'agit pas seulement de la p'tite gratification narcissique du "J'ai tout compris" - ou, mieux encore, "Vous avez tout compris" ; la plupart du temps d'ailleurs je n'ai pas compris grand-chose bien sûr ; mais d'un sentiment profond d'être en accord avec ce qui m'anime. Donner sens ; donner voix ; donner place.
17 novembre : Manifeste : me suis entendue dire, au décours d'une conversation téléphonique, "Il n'y a plus que deux choses qui m'intéressent : ce qui est porteur de sens - ce qui donne, crée, a du sens ; et l'amour au sens large du terme, les moments d'amour partagé - là où je peux sentir de la chaleur, de la confiance, de la tendresse en présence."
25-26-27 octobre : C'est une grande boîte en bois faite à la main, avec des fermoirs métalliques. Dedans, dans des grandes enveloppes en kraft, les photos d'un passé révolu, des photos de famille, de ma famille, enfin, de la moitié maternelle. La plus ancienne a été prise à New York en 1898, elle montre deux petites filles presque effacées par le temps - une de mes arrière-grands-mères est née des amours d'un cuisinier et d'une femme de chambre des grandes compagnies transatlantiques, entre deux traversées, l'autre, lavandière sur les bateaux-lavoirs de la Marne, a collectionné les hommes et les enfants.
A chaque image jaunie les souvenirs reviennent, drames et joies mêlés - depuis toute petite j'adore ces incursions dans la boîte, les pièces du puzzle qui se mettent lentement en place, de récit en récit, les zones d'ombres qui s'éclairent - ou restent intactes. J'observe chaque détail attentivement - un regard absent, une toilette incongrue, une petite fille aux yeux tristes - comment savoir ? Les photos ne donnent pas de clés ; mais elles ouvrent à la parole, aux fils renoués.
Au soleil de Touraine, les enfants jouent à cache-cache dans le jardin, l'air est doux, ce matin nous avons vu de près des sangliers, des daims, des mouflons, des biches et des cerfs - proches à les toucher ; et ma grand-mère, qui vient de se faire offrir un vol en montgolfière pour ses 80 ans, nous parle de tout ce qu'elle aurait aimé faire encore, et qu'elle ne fera plus.
Et moi, je pense à tout ce que j'aime faire, et que je peux faire encore ; à tout ce que j'aimerais faire, et qui reste possible.
Et moi, je pense qu'un jour viendra, où il m'appartiendra à mon tour de témoigner de l'histoire, transmettre la mémoire, faire parler les silences, et les absents. Puisque, pour savoir où l'on va, il faut savoir d'où l'on vient.
14 octobre : Les Lettres à un jeune poète, je les avais lues adolescente, et puis j'étais entrée dans la poésie même de Rilke, qui m'avait semblé infiniment plus exigeante et belle encore. Aussi, suis-je arrivée au théâtre absolument non préparée à ce qui allait suivre : un texte d'une telle densité, que je n'ai eu d'autre choix que de m'en absenter par instants, replongeant au hasard dans des phrases à l'impact chaque fois plus fort, comme si la voix d'Arestrup venait me tirer de mon sommeil, me sortir de ma torpeur. Extrait :
"Nous n'avons rien à redouter. (...) S'il y est des frayeurs, ce sont les nôtres : s'il y est des abîmes, ce sont nos abîmes ; s'il y est des dangers, nous devons nous efforcer de les aimer. Si nous construisons notre vie sur ce principe qu'il nous faut aller toujours au plus difficile, alors tout ce qui nous paraît encore aujourd'hui étranger nous deviendra familier et fidèle. (...) Toutes les choses terrifiantes ne sont peut-être que des choses sans secours, qui attendent que nous les secourions." Rainer Maria Rilke, Lettres à un jeune poète
6 septembre : Une heure après l'autre, j'écoute, relance, ouvre des pistes. Dans le tissu lâche ou trop étroit des liens je suis les mailles filées et celles manquées, repère - et non, répare - les accrocs et les déchirures.
Rencontres d'un jour, souvent. De ce que je peux entendre, je ferais bien histoire… L'envie me revient, d'animer un atelier d'écriture d'histoires de vie, de permettre à chacun de dérouler le fil. A défaut, je prends des notes, caresse l'idée d'un recueil, comme une envie de leur offrir une trace fût-ce à leur insu, une envie de témoigner : il a vécu cette vie, elle a vécu cette autre, et cela compte - cela n'est pas égal. A quinze ans parfois une vie déjà si longue…
Un moyen pour moi aussi de m'en sortir plus indemne : car cela n'est pas rien, d'être dépositaire. Ecrire : transformer la charge, partager le secret sans trahir l'anonymat, ouvrir au moins à cet espoir : que cette parole ne soit pas perdue pour ( tout) le monde.
1er septembre : Métier
Un métier où être en première ligne de la souffrance de l'autre, tout en étant confrontée à une vaste impuissance, à l'acceptation sans cesse à renouveler de ceci : " J'en ai mis du temps à me répéter que c'était tout, que ce peu-là portait la plénitude de l'entier. "
Ici viennent s'échouer toutes les misères physiques, psychiques, affectives, sociales, sexuelles... ici viennent se dire la plupart du temps le temps d'un unique entretien (parfois le temps d'un petit bout de route, une initiation à la vie psychique, à la possibilité d'un autre chemin) ce qui n'a pu se dire, ne se redira peut-être jamais ailleurs. Parce qu'il n'y a pas le temps dans ces vies submergées, pas l'espoir, pas l'idée que cela peut être entendu, et que cela seul peut suffire - un temps - à redonner un peu d'air, un rai de lumière.
Ici viennent se poser les questions qui n'ont pas pu être abordées ailleurs, ici peuvent parfois être prononcés les mots qui ont fait défaut, voici ce qu'est, ce que peut être une femme, un homme, et voici ce que peut être leur rencontre, voici ce qu'est l'enfant, et voici ce droit bouleversant de chacun à choisir sa vie, ses amours, sa sexualité, ses modalités de rencontre avec l'autre, et la possibilité de devenir parent à son tour.
Ce n'est pas un hasard si je travaille ici, autour des liens du couple et de la parentalité, et c'est encore moins par hasard si j'interviens à ce moment précis, celui où s'ouvre une petite fenêtre qui sera très probablement refermée, celui où poser un instant ses valises, avant de reprendre la route.
Ce n'est pas un hasard si je travaille dans la prévention, dans cette longue chaîne de rencontres possibles qui permettront peut-être de sortir du piège, sûrement de reprendre souffle, se restaurer, se reposer un peu.
C'est cela que je veux être, oui (je me rends compte = je n'ai pas écrit, c'est cela que je veux faire, et l'implication n'est pas la même), c'est cela que j'entends, quand on me dit, je n'avais jamais parlé de cela avant, quand on me dit, merci pour l'espace de parole ouvert, quand je sens même au milieu de l'intolérable déposé ici un étonnement, une gratitude, la reconnaissance de la possibilité d'une parole humaine, prononcée, entendue.
3 août : Où l'on parle du couple comme d'un lieu de croissance mutuelle, de courte échelle (je t'aide aujourd'hui, tu m'aideras demain peut-être, ou bien plus tard, ailleurs que là où je m'attends), de présence donnée, de confiance inconditionnelle dans une réciproque capacité à évoluer, à grandir. Où l'on parle de l'amour comme de ce don inestimable, offrir à l'autre la liberté d'aller explorer le monde, (r)assuré de notre présence confiante à ses côtés.
15 juin : Gratitude : "Merci vers le haut, merci vers le bas, merci à l'espace entre les deux, merci dans toutes les directions, merci à ceux qui me permettent d'être heureuse aujourd'hui et merci à moi-même". Copyright : le grand-frère-de-Claire ;-)
Et, en plongée aléatoire dans un échange épistolaire ininterrompu : "...mais ce qu'il y a à retenir à mon sens c'est le désir, offrir autre chose qu'un miroir ou une chambre d'écho ; c'est la rencontre d'un je suis (qui ne se confond pas avec un j'exige ;-)) ; c'est l'acceptation du manque, comme dans l'histoire de la porte : user son énergie à ouvrir une porte, qui s'ouvre d'elle-même lorsque l'on renonce : elle ouvrait vers le dedans... l'intérieur."
Et encore "Laisse tomber la mousse" - Signé : Mme Eléphant
3 février : Pull marine : à la recherche d'un cadeau pour mon grand-père, je me surprends à enfiler des pulls L ou XL, essayant vaguement d'imaginer ce que ça pourrait donner, le XL me descend jusqu'aux genoux, trop grand, le L est trop grand juste ce qu'il faut, c'est bien ? Les papas et les grands-papas, on les voit toujours un peu plus grands qu'ils ne sont - avec nos yeux d'enfant. Souvenirs d'emprunts vestimentaires à l'adolescence, et aujourd'hui le sablier se retourne, c'est mon tour d'offrir du chaud, du doux et du réconfortant, à un homme qui vieillit… Un pull marine pour grand-père marin.
Pull marine bis : Où peut-on acheter des pulls qui auraient l'effet magique des "pulls-des-papas" ? Ce trop-grand-enveloppant-protecteur, ce sentiment de sécurité absolue, et l'odeur de la peau, qui n'appartiennent qu'aux souvenirs d'enfance, aux élans amoureux ? Et pourrait-on envisager un modèle spécial pour les sans-papa (perdu, parti, jamais vraiment rencontré...), un modèle "quand même", quelque chose pour nous donner ce je-ne-sais-quoi qui nous fonde, ce sentiment que quelque part quelqu'un peut nous ouvrir ses bras si nous en avons besoin ?
26 février : Exercice reconduit jour après jour, la Boîte transforme mon lien non seulement au regard mais aussi à la mémoire, répond à mon besoin de retenir. Mettre en mots pour moi, pour l'autre, même dans l'ellipse, c'est garder un peu, lutter contre la dissolution, un antidote au manque. Une réponse renouvelée à la question du devenir.