14 juin 2006

L’un ou l’autre

Elle a 24 ans, elle est accompagnée d’un petit garçon souriant et paisible, qui s’installe immédiatement au milieu des jeux de la salle d’attente. La porte du bureau refermée, elle raconte, une suspicion tardive de grossesse, et le choc à l’échographie la veille – 15 semaines – un bébé parfaitement visible, et des délais légaux pour envisager une IVG largement dépassés.

Que s’est il passé ? Rien… des rapports protégés, une rupture de préservatif, la contraception d’urgence prise dans les délais – et depuis, aucun signe, des saignements à la date attendue des règles. Une histoire banale – le premier compagnon démissionnaire, une nouvelle histoire encore fragile, des emplois précaires, une mère et une sœur gravement malades – autant d’arguments rationnels, raisonnables, avancés – et le sentiment que l’essentiel n’est pas là.

L’essentiel… il joue tranquillement dans la salle d’attente. L’essentiel, c’est ce petit garçon de 4 ans, leucémique en rémission, et dans le discours de sa mère j’entends successivement, la vie qui s’impose quand l’ombre de la mort plane, la tentation d’un marchandage, d’une conjuration, ou bien encore, l’idée que garder l’enfant à naître, condamnerait l’enfant vivant – quelque chose de l’ordre de : l’un ou l’autre.

L’un ou l’autre… que faut-il porter en soi, pour s’infliger une telle douleur ? Dans cette première rencontre, il n’est pas question d’autre chose que d’entendre ces enjeux vitaux, et d’orienter vers les structures qui seront à même d’accompagner cette femme à l’étranger. En ouvrant la possibilité d’une parole pour que, dans le temps d’accomplir les démarches à venir, elle puisse essayer de donner un sens à ce qui se joue – et faire le même choix peut-être, mais autrement.