J'ai un drôle de nouveau métier. Avocat du diable, ça pourrait s'appeler. Ou grain de sable dans les rouages. Ou médiatrice - comme la droite qui coupe en deux, ou relie, c'est selon. Dans l'état actuel des choses, ça consiste à rencontrer des gamins - aussi des gamines - mais plutôt des gamins - qui dérangent. Et à leur faire comprendre que mon rôle n'est pas de les remettre au pas, ou d'être la main de fer dans un gant de velours, mais de voir avec eux comment ils peuvent trouver leur place dans une institution à laquelle ils sont bien mal adaptés - à moins que ce ne soit le contraire - l'école. Le collège, très exactement.
Un collège qui se soucie d'eux assez pour leur offrir cette échappée belle, un espace de parole ; mais qui se doit aussi de conduire à bon port celles de ses brebis qui ne sont pas égarées, et de ménager ses bergers.
Je rêve d'une école où l'exclusion, temporaire ou définitive, ne soit pas la seule réponse possible ; ne soit pas le précurseur de l'exclusion sociale, quand elle n'en est pas le prolongement, l'histoire ayant tendance à se répéter. Les mômes rigolent : "La dernière fois que j'étais en vacances..." - mais il n'y a rien de drôle. J'ai appris récemment que les "exclus" étaient supposés aller travailler dans des centres plus ou moins fermés le temps de leur sanction (plutôt que d'être avachis devant la télé). Soit ; mais je ne peux m'empêcher d'y voir un avant-goût des comparatifs entre centres de détention (d'autant qu'au rythme où vont les choses, ils pourront bientôt y être à l'âge de la scolarité, en effet).
J'ai eu une discussion tout à fait intéressante avec un minot sur le terme de "récidive" ; les copains, les grands frères de la cité vivant généralement de petits ou gros trafics, ils ont généralement fait quelques allers-retours devant les tribunaux. Aussi le terme de récidive en milieu scolaire, pour des retards ou des cours perturbés, les fait sourire. Un peu étonnés, pas de mauvaise volonté, mais... quand dehors c'est la jungle, il est parfois bien difficile de comprendre la violence des réactions institutionnelles devant ce qui reste, bien souvent, des enfantillages... Bien difficile aussi de se contenir, quand l'élaboration psychique, même rudimentaire, fait défaut.
Celui-ci avait un sourire de gosse espiègle, mais aussi la conscience de ceci : se mettre en situation d'être exclu à l'âge de la fin de l'obligation scolaire, c'est un aller simple pour la rue... Derrière le gosse espiègle, se cache un adolescent en colère - qui a déjà fait les frais de cette violence à fleur de peau ; et derrière l'adolescent en colère, se cache un môme qui a peur - de n'être pas capable, de ne jamais trouver sa place, ou de ne pas en avoir...
Charge à moi de trouver les mots - d'eux à eux-mêmes, et d'eux-mêmes à l'institution ; de faire des ponts, d'inventer des accords, que les différentes parties puissent accepter sans avoir l'impression de s'y perdre... De la clinique expérimentale, aux résultats incertains ; mais la chance de pouvoir tenter ce genre de pari, c'est déjà beau...
Un collège qui se soucie d'eux assez pour leur offrir cette échappée belle, un espace de parole ; mais qui se doit aussi de conduire à bon port celles de ses brebis qui ne sont pas égarées, et de ménager ses bergers.
Je rêve d'une école où l'exclusion, temporaire ou définitive, ne soit pas la seule réponse possible ; ne soit pas le précurseur de l'exclusion sociale, quand elle n'en est pas le prolongement, l'histoire ayant tendance à se répéter. Les mômes rigolent : "La dernière fois que j'étais en vacances..." - mais il n'y a rien de drôle. J'ai appris récemment que les "exclus" étaient supposés aller travailler dans des centres plus ou moins fermés le temps de leur sanction (plutôt que d'être avachis devant la télé). Soit ; mais je ne peux m'empêcher d'y voir un avant-goût des comparatifs entre centres de détention (d'autant qu'au rythme où vont les choses, ils pourront bientôt y être à l'âge de la scolarité, en effet).
J'ai eu une discussion tout à fait intéressante avec un minot sur le terme de "récidive" ; les copains, les grands frères de la cité vivant généralement de petits ou gros trafics, ils ont généralement fait quelques allers-retours devant les tribunaux. Aussi le terme de récidive en milieu scolaire, pour des retards ou des cours perturbés, les fait sourire. Un peu étonnés, pas de mauvaise volonté, mais... quand dehors c'est la jungle, il est parfois bien difficile de comprendre la violence des réactions institutionnelles devant ce qui reste, bien souvent, des enfantillages... Bien difficile aussi de se contenir, quand l'élaboration psychique, même rudimentaire, fait défaut.
Celui-ci avait un sourire de gosse espiègle, mais aussi la conscience de ceci : se mettre en situation d'être exclu à l'âge de la fin de l'obligation scolaire, c'est un aller simple pour la rue... Derrière le gosse espiègle, se cache un adolescent en colère - qui a déjà fait les frais de cette violence à fleur de peau ; et derrière l'adolescent en colère, se cache un môme qui a peur - de n'être pas capable, de ne jamais trouver sa place, ou de ne pas en avoir...
Charge à moi de trouver les mots - d'eux à eux-mêmes, et d'eux-mêmes à l'institution ; de faire des ponts, d'inventer des accords, que les différentes parties puissent accepter sans avoir l'impression de s'y perdre... De la clinique expérimentale, aux résultats incertains ; mais la chance de pouvoir tenter ce genre de pari, c'est déjà beau...