28 octobre 2015

Dégagement

Il y a un envoûtement, un enchantement à comprendre et à être compris les uns par les autres, mais cela peut aussi constituer une limite, être régressif et adapté à ce qui perdure en nous du jeune âge. En vérité, ce peut être la défense la plus approuvée culturellement contre d'autres sortes d'expériences qui ne sont pas sujettes à la compréhension, avec lesquelles la compréhension n'a rien à voir (...).Ce n'est pas l’accroissement de la connaissance de soi que Freud a décrite, mais ses limites. L'histoire qu'il raconte est celle du besoin de passer l'âge du besoin d'être compris et de comprendre. L'enfant a besoin que ses parents le comprennent, soient suffisamment attentifs pour ses besoins et ses peurs, et ensuite il a besoin d'en être sevré. La psychanalyse est, en fait, le traitement qui sèvre les gens de leur compulsion à comprendre et à être compris. C'est une post-éducation en non-compréhension. 

Adam Phillips, La meilleure des vies

La fin de la psychanalyse / la maturité comme deuil du tout comprendre et du tout compris, comme renoncement à la sur-interprétation, à la maîtrise de soi et de l'autre, comme acceptation du mystère... en voilà une idée séduisante !

L'antidote aux interprétations sauvages des étudiants en psychologie et des psychanalystes (?) médiatiques, la mise en perspective des approches thérapeutiques consolantes et régressives : un temps pourtant nécessaire et utile, mais qui appellera un sevrage, pour ouvrir à la liberté.

Renoncer enfin à ce que l'autre soit cette mère idéale qui comprendrait tout, devinerait tout, pardonnerait tout, puisque désormais nous saurions que quelque soit notre avancement sur le chemin de notre désir, une part échappera toujours, et d'abord à nous-mêmes...