14 décembre 2021

Exilée


Nous avions pris les billets ensemble, et puis, tu n'es plus là... Le bien nommé Cabaret de l'exil n'est pas le meilleur spectacle de Zingaro que j'ai pu voir ; mais très certainement, il restera le plus intimement chargé d'émotions pour moi. Il a commencé dans une joie un peu folle, faire de ce moment une communion d'amour(s), ne pas laisser ta place inoccupée, l'inscrire dans un partage, un dialogue émouvant et profond. 

J'ai encaissé les premières images sans broncher, le grand manège de bois aux sols couverts de tapis, aux murs comme un musée de tous les spectacles passés ; le passage cette fois non au-dessus des boxes mais au travers de l'un deux ; les oies en liberté, l'odeur du vin chaud, les premiers cavaliers... et puis il y a eu cette si sensuelle danseuse en soie noire sur ce grand cheval frison, et mes larmes ont commencé à couler, j'aurais eu tellement envie de le prendre dans mes bras cet animal, de m'agripper à son encolure, de sentir cette puissance tranquille et chaleureuse, si rassurante, si vivante... et quand des colombes sont venues se poser sur le dos du même colosse noir aux pâturons blancs, en évident clin d'oeil à Ex Anima, que nous avions vu ensemble, je me suis effondrée. 

Je n'étais pas seule et c'était doux ; je me suis rassemblée, j'ai repris un peu de vin chaud, en sortant nous avons admiré le grand feu de joie qui clôture chaque représentation. Et pourtant depuis... le sentiment d'exil perdure. Comme au retour à la vie ordinaire après les mondes fantastiques de Zingaro, du Slava's Snowshow ou du Cirque du Soleil, ta mort me laisse légèrement hébétée, comme au sortir d'un rêve - les couleurs s'évanouissent, la réalité reprend ses droits, et j'avais oublié qu'elle pouvait être si crue, si rude...