22 mars 2011

L'amande

Ca s'appelle L'amande. Un roman érotique écrit sous pseudo par une femme musulmane, qui se donne pour tâche de redonner aux femmes la parole confisquée par les hommes, de rendre hommage à l'ancienne civilisation arabe qui, écrit-elle, inscrivait le désir jusque dans l'architecture et pour qui jouir et faire jouir était un devoir du croyant. Elle ajoute que rendre aux femmes la parole sur le corps, c'est à moitié guérir leurs hommes.

Magnifique projet... et belle intuition – que la guérison des femmes ne pourra passer que par celle des hommes, et réciproquement.

Le livre est cependant loin de tenir cette belle promesse : un homme initiateur, inoubliable, follement séduisant autant que follement maltraitant – une femme victime, jouissant malgré – ou à travers (et cette ambiguïté invalide la promesse initiale) ce statut de victime, mais qui le fera payer au prix fort, et dans tous les sens du terme, à la gent masculine...

Pour voir au quotidien les ravages pour les femmes comme pour les hommes de cette confiscation de la parole et de la liberté féminines, je rêverais pour ma part d'un roman de la réconciliation, D'une « Parole de femme » musulmane, transgressive et heureuse, transgressive parce qu'heureuse. Et plus encore, d'une parole d'homme, qui oserait dire ce que signifie grandir dans un monde qui pousse jusqu'au délire la dichotomie entre la maman et la putain, qui oserait dire le prix à payer de l'ignorance du corps de l'autre et ce qu'elle engendre de troubles de la sexualité, qui oserait dire la frustration imposée, et la violence inévitable et malheureuse.

Une parole de femme qui ne serait ni victime ni manipulatrice, une parole d'homme qui ne serait ni agresseur ni par principe dénué de coeur – un livre qui resterait à écrire...