09 juin 2023

On dirait le Sud...


 ...le temps dure longtemps... ou peut-être, c'est ce temps répété, retrouvé, qui me fait tellement de bien à chaque passage à Cairanne : le chemin dans les vignes, la maison d'Emilie et Arnaud, les grands-parents des deux côtés, le coucher de soleil sur les hauteurs du jardin, le marché provençal, les petits villages perchés - il y a quelque chose de profondément satisfaisant, rassurant dans ces retrouvailles chaleureuses autour de bonnes choses simples - les melons, les cerises, le bon vin. Des odeurs et des couleurs si familières - même si je n'ai pas pu m'empêcher de chercher Jingo du regard. Et puis c'était un bonheur de voir la maison en mode fête pour l'anniversaire d'Arnaud, et de déguster les pizzas tout juste sorties du four à pain rénové : que demander de plus ?

07 juin 2023

Un discours

Bonjour à tous,

Laissez-moi commencer par tous vous remercier d'être là ; ça signifie tellement pour Cyril et Lika, et pour moi aussi, de les voir si bien entourés.

Cyril, Marion m'a mis la pression en me disant que tu comptais sur mon speech, je vais faire de mon mieux !

Pour ceux qui ne me connaissent pas, je m'appelle Lucile, et je suis la grande sœur de ce séduisant jeune marié ; je sais, je pourrais presque être sa mère, mais je vous promets, je suis vraiment sa sœur.

Plus précisément, je suis sa grande demi-soeur. Alors on va se mettre tout de suite d'accord : demi ? Quel demi ? Qui pourrait n'aimer Cyril qu'à moitié ? Au-delà des liens du sang, il y a avant tout des liens de cœur, une famille choisie, des souvenirs qui se construisent et des affinités qui se confirment.

Cyril, quand j'étais gamine, j'aurais rêvé d'avoir un grand frère ; bon, ça c'est raté, mais je suis tellement heureuse d'avoir un frère comme toi, qui partage mon goût pour le bon vin et la... plus ou moins bonne chanson française (oui, tu as massacré le Coup de soleil en karaoké pour tes 30 ans, ne nie pas), mais aussi, pour parler plus sérieusement, un frère avec qui la confiance, le dialogue et la solidarité réciproque vont de soi.

Et puis c'est la classe d'avoir un petit frère à la fois brillant, mature et beau gosse (même avec la moustache !), et pourtant gentil, simple et généreux.

Avant cette semaine, je n'avais rencontré Lika qu'une seule fois, mais le coup de cœur a été immédiat. Sa vivacité, son naturel, son attention à l'autre m'ont conquise tout de suite – te souviens-tu de cette coupe de champagne surprise sur la Limmat ?

Très vite, j'ai pensé, cette ravissante jeune femme, c'est Cyril au féminin – à moins qu'il ne soit une Lika au masculin ? Des jumeaux amoureux, la même énergie à laquelle rien ne résiste, le même rayonnement, une dream team que j'imagine sans peine s'épauler pour le meilleur pendant les 100 prochaines années.

Je comprends tellement que vous vous soyez choisis ; un amour comme celui-ci n'est pas facile à trouver, et c'est une chance de le vivre : prenez-en grand soin. (Un petit conseil au passage : Cyril, la meilleure façon de terminer une discussion en étant sûr d'avoir le dernier mot, c'est : tu as raison, ma chérie).

J'ai attendu cette journée avec impatience, car j'étais certaine qu'elle refléterait votre créativité, votre goût et votre générosité ; elle est effectivement merveilleuse, et elle vous ressemble : merci pour tout ce que vous avez préparé.

Avoir des frères et sœurs beaucoup plus jeunes, c'est vraiment chouette. Ça permet d'aller de nouveau à des mariages (quand tous vos copains sont en train de divorcer), ça permet de croire à nouveau en l'amour et d'avoir des étoiles plein les yeux (et moi je suis une grande romantique, définitivement fleur bleue).

Ça permet même de s'attendrir à nouveau devant des bébés – Clara et Thibaud ont déjà commencé, Cyril et Lika, je compte sur vous. Dans cette famille de cœur, je suis très heureuse d'avoir une nouvelle sœur, et bientôt je l'espère, une petite nièce ou un petit neveu !

Mais avant que ce ne soit le bon moment pour cela... rêvez grand. Sachez qu'on ne se souvient pas des jours, mais des instants : créez-vous des instants extraordinaires - je sais que vous avez ce talent-là. Mais n'oubliez pas non plus qu'il y a aussi un bonheur secret dans le fait de faire ensemble des choses ordinaires. Et remerciez-vous d'exister – il n'y a pas de plus belle déclaration d'amour. 

Trois jours de rêve


 D'abord parce que tout était plus que parfait - un lieu incroyable en pleine nature avec une vue à l'infini sur la vallée, des vieilles pierres provençales, une piscine. Parce que l'accueil, au vrai sens du terme, avait été pensé dans ses moindres détails, avec une multitude de bonnes idées attentionnées - cocktail somptueux mais repas simple pour mieux aller danser, location de baby-foot, crêpes bretonnes à volonté pour le brunch, et j'en oublie, beaucoup. Une fête 5 étoiles, et bien plus encore dans les yeux !

Ensuite parce que c'était beau de voir les jeunes mariés si bien entourés par des amis de très longue date - un groupe aux origines et aux langues diverses (22 nationalités !), tous milieux sociaux confondus, mais chaleureux et aimant. Et que c'est quasi miraculeux que Papa et Gene aient pu être là l'un et l'autre, et participer pleinement à l'événement.

Et surtout - parce que c'était émouvant cette cérémonie en plein air, ces vœux en allemand/français/anglais/polonais où ce qui ne se saisissait pas du fait de la barrière de la langue se communiquait cependant dans l'émotion palpable des mariés et de leurs proches. Un mariage inoubliable. Et j'aime assez l'idée que ces vœux soient prononcés en dehors de tout cadre administratif ou religieux - un engagement en toute liberté, un lien qui s'affirme simplement face à ceux qui comptent pour Cyril comme pour Lika, en même temps qu'un magnifique cadeau pour tous. 

27 mai 2023

Le prix de la liberté

Arrivée à la cinquantaine, juste au moment où ma vie était censée se ralentir, se stabiliser et devenir plus prévisible, elle s'est accélérée, est devenue instable et imprévisible (...).

Je ne voulais pas restaurer le passé. Ce dont j'avais besoin, c'était d'une construction toute neuve (...) Il était vain de vouloir faire entrer une ancienne vie dans une nouvelle (...).

Cependant, créer ce foyer, un espace pour une mère et ses filles, a été une telle leçon d'humilité, une expérience si dure, profonde et intéressante qu'à ma grande surprise j'ai découvert que je travaillais très bien au milieu du chaos. J'avais les idées claires, j'étais lucide ; l'installation en haut de la colline et la nouvelle situation avaient libéré en moi quelque chose jusque-là enfermé et étouffé. J'ai gagné en vigueur à cinquante ans, à un âge où mes os étaient censés se fragiliser. J'avais de l'énergie parce que je n'avais pas d'autre choix que d'en avoir (...).

La liberté n'est jamais libre*. Quiconque s'est battu pour être libre sait ce qu'il en coûte. 

Déborah Lévy, Le coût de la vie

La première fois, j'aurais voulu restaurer le passé - comme Déborah Lévy l'écrit ailleurs dans le texte, "Pour moi, il n'y aura pas de fin au deuil de ce vieux désir de vivre un amour durable qui ne réduirait pas ses personnages principaux à moins que ce qu'ils sont."

La seconde - j'avais compris je crois, et je me suis sentie portée par cet élan vers une construction neuve, ce regain d'énergie incontournable lorsqu'il faut à nouveau tout assurer seule (mais aussi par la fierté qui l'accompagne). Et le plaisir d'explorer une identité nouvelle, lorsqu'on n'est plus la compagne et, les enfants ayant grandi, lorsqu'on a moins besoin d'être la mère.

Déborah Levy écrit longuement sur le bonheur que lui apporte son vélo électrique, qui lui donne des ailes et le sentiment de maîtriser sa vie (dans une modeste mesure) : je suis tellement d'accord !

*La traduction perd à mon sens l'essentiel : Freedom is never free : la liberté n'est jamais gratuite...

25 mai 2023

Juste cet après-midi

Juste cet après-midi, il y a eu J, qui a perdu si brutalement sa meilleure amie, sa sœur de coeur élue, et sa joie de vivre. Dont la peine indicible croît avec cette absence qui n'en finit plus de s'imposer, et s'immisce dans chaque souvenir. J'imagine et elle me le confirme, les jumelles de Demy, qui dansent et chantent dans un monde arc-en-ciel - et puis Catherine sans Françoise...

Et puis V, une étudiante ukrainienne dont le frère est en ce moment sur la ligne de front, et qui présente pour sa fin d'études le projet d'un centre de soins psychiques à destination des traumatisés de guerre inspiré du kintsugi : dans un bâtiment éventré par un missile, ne pas chercher à restaurer à l'identique mais utiliser l'espace ainsi créé pour proposer de nouvelles circulations, un tissu cicatriciel visible mais créateur de nouveaux possibles.

Et puis A, livrée à elle-même depuis toujours, poly-consommatrice à quinze ans, sous emprise à dix-sept, submergée par l'angoisse aujourd'hui - logorrhéique, insomniaque, infiniment fragile et pourtant si résistante, résiliente. Une maturité bien trop précoce aussi - je la vois comme un petit esquif dans la tempête, sur une mer sombre dont elle seule sait ce qui se dissimule dans les abysses.

Et puis L, ce petit génie mathématique chinois à l'anglais traînant avec qui je poursuis depuis presque trois ans un dialogue intermittent (car à qui adresser cet ovni ?), qui gagne en profondeur à chaque rencontre, et révèle un questionnement existentiel et un humour insoupçonnables autrefois. Et je vois progressivement émerger du gamin terrifié de nos tout premiers échanges autrefois un jeune adulte qui revendique de plus en plus son indépendance de pensée et d'action.

Et encore J, une autre intelligence affûtée autant que perturbante, qui tente désespérément de trouver le chemin qui lui permettrait de ressentir une émotion, quelle qu'elle soit, sans pour cela avoir à se plonger dans des situations où la souffrance, la sienne ou celle de l'autre, parvient seule à lui donner la sensation d'être un peu vivante. 

Chez tous, la rapidité de pensée, la lucidité sont vertigineuses. Et le désespoir, tout autant. Leur intelligence, leur beauté, leur jeunesse ne les sauvent de rien, les sauveront peut-être. Ils sont incroyables. Ils sont bouleversants. 

23 mai 2023

Association de malfaiteurs


Léo avait dit, tu me réserves ta soirée, c'est une surprise. OK ! Après un petit dîner en terrasse, je suis arrivée les yeux bandés devant un lieu où j'ai reconnu des rires familiers - nous y avons retrouvé Agathe et Cécile, elle aussi en mode blind date, pour une soirée karaoké spéciale Fête des Mères - mais quelle idée géniale !!! On a dansé, on a chanté, et on a même bien pensé, à les remercier (même si ce n'était pas les Champs Elysées, ta da ta da ta.) Super touchée par l'idée, par sa mise en œuvre - nous réunir autour de quelque chose que nous partageons depuis toujours, c'était très bien vu, et plein d'amour.

20 mai 2023

Trouville

14 mai 2023

Une si jolie journée

Qui nous aime nous suive ! Ce jour-là, un mélange de générations, d'histoires et d'horizons, juste réunis par l'envie de célébrer ensemble les 20 ans de notre Ellie dans la joie et la bonne humeur. J'adore - l'idée d'une tribu évolutive de gens de coeur, au-delà des conventions et des ruptures, où les traditionnelles frontières amis, amours, familles n'ont pas lieu d'être. Pourquoi Ellie ? Peut-être parce qu'il y a des facettes d'Elsa que ma petite fleur a envie, en tout cas à ce jour, de laisser dans le passé... alors va pour Ellie (ou Rose ? Ou Marguerite ? Est-ce qu'Ellie évoluera un jour vers Lily  - qui peut signifier lys ou muguet ?), l'essentiel, c'est qu'elle fleurisse. Ce fut joyeux, bruyant, chantant, et délicieux - autant d'instants précieux.

09 mai 2023

Personne n'est parfait

Le film s'ouvre sur un patient qui reprend La bombe humaine : "Je veux te parler, de moi, de nous..." - et c'est tellement ça. La frontière est si fragile entre patients et soignants, dans les lieux où l'on prend le temps d'accueillir la parole et l'être de l'autre. Les images et les lumières sont douces, comme les reflets de la Seine qui illuminent ces visages souvent marqués par la solitude et la souffrance. 

Doux aussi, le regard posé par le réalisateur sur ces êtres cabossés, dont il révèle l'humour et la poésie - tantôt involontaires, tantôt surgis au contraire d'une troublante profondeur. C'est ce que dit l'un d'eux - à la question "Vous avez eu un métier ?", il répond d'abord "Non..." - et puis, après un temps : "La poésie... mais ce n'est pas un métier, la poésie..."

25 avril 2023

Bonbons des Vosges


Ça devient viscéral ce besoin de sortir de Paris à intervalles réguliers. Ça me questionne parfois - est-ce qu'il y a un moment où ça va devenir impératif d'aller vivre ailleurs ? Du coup c'était chouette d'avoir la chance de m'évader dans une maison au pied des montagnes, et pendant huit jours, de ne rien faire, à part me balader, bouquiner, cuisiner (des Bredele de Pâques !), visiter de jolis villages, manger une choucroute, et même coudre, en tout cas expérimenter l'usage de la machine. Avec deux grands-mères aussi bavardes que gourmandes et deux chats sympa - un excellent casting donc. Un petit saut chez Clara et Thibaud pour constater les progrès d'Aaron, un autre à Lampertheim - moins de progrès hélas. Du temps et de l'espace... enfin.

21 avril 2023

Haut-le(s)-coeur(s)

"Un ordre social est machinal. Il nous agit. On l'a toujours déjà oublié.

Mais toute machine est machinée. Un ordre social est machiné par quelques hommes pour machiner tous les autres hommes. Et plus il va machinalement, moins il va humainement. Ainsi, des intérêts humains - très humains - produisent des rapports inhumains.

Ce qui se voit uniquement en s'extirpant de la langue générale : depuis un ailleurs, le machinal ressemble souvent à une torture énigmatique.

(...) La norme une fois posée, elle n'est plus questionnée. C'est comme ça qu'on fait. La norme est invisible, même si elle est partout, même si elle est atroce. On ne la voit plus, on la prolonge." 

Sandra Lucbert, Personne ne sort les fusils

Un livre coup de coeur mais aussi coup de poing. Qui relate le procès Orange, mais aussi bien plus largement dénonce la novlangue néolibérale, et la façon dont elle soutient, justifie, invisibilise la violence du monde du travail et la folie destructrice du capitalisme forcené. C'est brillant - et terrifiant. Ce mépris assumé de l'humain, que l'actualité politique, sociale, écologique met en évidence jour après jour - les quelques hommes qui machinent et dirigent ne prenant même plus la peine de faire semblant d'être au service du collectif. 

Personne ne sort les fusils - et pourtant il y aurait de quoi.

15 avril 2023

Illuminations

Dans la sécurité du cercle de femmes, je nomme cette façon que nous avons d'encaisser en permanence, toutes et tous, des micro-chocs (ou pas micro d'ailleurs) qui s'accumulent, s'additionnent, finissent par nous fabriquer une peau apparemment épaisse, un supposé détachement - une armure si poreuse en réalité. Un risque majoré par nos métiers - cette façon de nous effacer devant l'émotion de l'autre, de faire comme s'il n'y avait pas d'impact sur nous-mêmes - ou si peu, juste assez pour lui communiquer une empathie profonde, donc encore à son service.

Je me demande comment ce serait, si je m'autorisais à ressentir pleinement, constamment, ce qui vient me chercher, m'atteint, me bouscule - invivable, probablement, la peau de mon âme (ou de mon ventre ?) est en réalité si fine et sensible...

L'autre apprentissage de cette rencontre, en tout paradoxe, c'est cependant la possibilité de choisir : accueillir l'émotion, la laisser me traverser - acceptation salutaire ; ou pas, et c'est jouissif aussi : je constate que j'ai le choix, que je peux dire non, prendre de la distance, refuser le pathos interne et externe.

A plusieurs reprises l'idée s'impose que ce choix est toujours possible, se laisser abuser ou pas par les apparences, comme si là je pouvais toucher du doigt concrètement le fait que tout cela est un jeu, une projection, une fiction – la vie qui (s')expérimente, rien de plus.

Et puis il y a eu cette jolie de phrase de C. sur son étonnement devant la persévérance de la nature, le bourgeon qui ne se pose pas de questions mais croît et fleurit au printemps, quelques soient les circonstances extérieures... la vie têtue, inébranlable.

09 avril 2023

Les petites lumières

Dans le premier film, on ne parle que d'amour, mais c'est l'anti-comédie romantique : rien n'est souligné, tout est suggéré, dans les silences, dans les regards, dans la sensualité des lumières et des matières... et c'est bouleversant. Un amour pudique, profond, plus entier d'être partagé, parce qu'il n'y a rien d'autre à faire que d'aimer. Ce moment où Mina dit à son homme, tu es l'homme le plus pur, le plus noble que je connaisse, c'est si beau, et si vrai de ces trois personnages généreux et tendres, si délicatement attentifs les uns aux autres - une infinie douceur, tellement rare. Moi qui suis de plus en plus souvent déçue par le cinéma, je suis sortie totalement sous le charme, et restée longtemps émue (j'avais également aimé récemment Empire of light, une autre histoire d'amour fragile et touchante elle aussi).

Dans le second, s'il est question en détail de braquages, de flingues et de peines de prison - c'est tout sauf un film de gangsters. Je verrai toujours vos visages - comme il est dit à la fin, c'est (là aussi), tout ce que notre époque déteste : prendre le temps, tisser des liens, accompagner les hésitations, les ambivalences, accueillir hors de tout jugement. Mettre des mots, chercher à comprendre, et en définitive, à réparer, ou tout au moins permettre à chacun de faire quelques pas dans cette direction. Alors, c'est vrai, il est peut-être un peu trop démonstratif, pédagogique, ce film ; et sans doute les choses ne se passent-elles pas toujours aussi bien. Mais rendre hommage à ce dispositif de la justice restaurative, qui est déjà un miracle en soi dans notre époque pressée et sans nuances, c'est beau aussi.

03 avril 2023

02 avril 2023

Nomades

Pâques avant les Rameaux

31 mars 2023

Du coin de l'oeil

Ce n'est pas tout le temps mais... depuis quelques semaines je me fais surprendre par des pointes d'angoisse, ou des pics de chagrin, sans raison immédiate apparente, même si en cherchant... le contexte politique, écologique et social, l'absence de Chamade, la surdité obstinée du père de mes enfants, la maladie de Marion, les grands-parents qui se fragilisent, et l'absorption quotidienne des affects qui se déversent dans mon bureau - angoisse, colère, deuils - y participent.

La remarque anodine d'une collègue, l'histoire douloureuse d'un étudiant, l'atmosphère des manifs, tout semble appuyer à la fois sur un sentiment de vulnérabilité et de solitude, pourtant pas totalement justifiés, et sur un appel urgent au temps, à l'espace, au besoin de prendre un vrai recul, mais comment ?

Trop longtemps sans quitter la ville, sans rupture d'un rythme intense, sans les petites libertés ou les menus luxes que ce qui était un (cependant très relatif) confort financier permet aujourd'hui de moins en moins ? Mon corps est lourd, ma concentration fluctuante, c'est comme s'il y avait un petit nuage noir que je m'efforçais de maintenir sans cesse en périphérie de mon champ de vision - dont j'ai l'intuition qu'il est la somme des émotions et des besoins petits ou grands que je mets de côté jour après jour - pas le temps, pas la place, et puis ce pli pris d'être toujours en réception, qui fait que je m'étonne, dans les rares moments où je dis quelque chose de moi-même qui ne soit pas de surface.

 Ce matin, une étudiante m'a demandé si mes patients se souciaient parfois de savoir comment j'allais, et si, dans ce cas, je leur répondais sincèrement. C'est une bonne question...

25 mars 2023

Qui êtes-vous ?

"Quand je demande à ceux que je rencontre de me parler d'eux- mêmes, je suis souvent attristée par la pauvreté de ma moisson.

 On me répond: je suis médecin, je suis comptable...j'ajoute doucement: vous me comprenez mal.

Je ne veux pas savoir quel rôle vous est confié cette saison au théâtre mais qui vous êtes, ce qui vous habite, vous réjouit, vous saisit ?

 Beaucoup persistent à ne pas me comprendre, habitués qu'ils sont à ne pas attribuer d'importance à la vie qui bouge doucement en eux. 

On me dit: je suis médecin ou comptable mais rarement: ce matin, quand j'allais pour écarter le rideau, je n'ai plus reconnu ma main...ou encore: je suis redescendu tout à l'heure reprendre dans la poubelle les vieilles pantoufles que j'y avais jetées la veille; je crois que je les aime encore...ou je ne sais quoi de saugrenu, d'insensé, de vrai, de chaud comme un pain chaud que les enfants rapportent en courant du boulanger. 

Qui sait encore que la vie est une petite musique presque imperceptible qui va casser, se lasser, cesser si on ne se penche pas vers elle ?

Les choses que nos contemporains semblent juger importantes déterminent l'exact périmètre de l'insignifiance: les actualités, les prix, les cours de la Bourse, les modes, le bruit de la fureur, les vanités individuelles. 

Je ne veux savoir des êtres que je rencontre ni l'âge, ni le métier, ni la situation familiale; j'ose prétendre que tout cela m'est clair à la seule manière dont ils ont ôté leur manteau.

 Ce que je veux savoir, c'est de quelle façon ils ont survécu au désespoir d'être séparé de l'Un par leur naissance, de quelle façon ils comblent le vide entre les grands rendez- vous de l'enfance, de la vieillesse et de la mort, et comment ils supportent de n'être pas tout sur cette terre. 

Je ne veux pas les entendre parler de cette part convenue de la réalité, toujours la même, le petit monde interlope et mafieux: ce qu'une époque fait miroiter du ciel dans la flaque graisseuse de ses conventions ! 

Je veux savoir ce qu'ils perçoivent de l'immensité qui bruit autour d'eux. 

Et j'ai souvent peur du refus féroce qui règne aujourd'hui, à sortir du périmètre assigné, à honorer l'immensité du monde créé.. 

Mais ce dont j'ai plus peur encore, c'est de ne pas assez aimer, de ne pas assez contaminer de ma passion de vivre ceux que je rencontre".

Christiane Singer

22 mars 2023

Chamade


Elle est arrivée pour les sept ans de Léo, Elsa n'a pas de souvenirs sans elle. Ce qui signifie qu'elle partageait nos vies depuis bientôt dix-sept ans maintenant : les joies, les chagrins, les changements, les déménagements, les secrets et les découvertes. Un petit témoin silencieux qui a épongé bien des peines, reçu bien des confidences... et aussi des milliers de "câlins obligatoires". Le Chat Chou voyait tout, sentait tout, mais avait le bon goût de ne pas commenter, disais-je souvent !

Des yeux verts impeccablement fardés de noir, des oreilles un poil démesurées (mon petit fennec...), des coups de tête affectueux et des quarts d'heure de folie, et puis un roucoulement qui n'appartenait qu'à elle, "un chat qui fait un bruit d'oiseau". Ces derniers temps, c'était une très vieille dame de plus en plus malade, efflanquée et grognon. Ce mercredi, les enfants et moi l'avons accompagnée chez notre gentil vétérinaire pour qu'elle s'endorme pour sa dernière sieste - avec tellement d'amour que lui aussi avait les larmes aux yeux (un amoureux des chats, mais aussi de l'humain, nous a-t-il dit en partant). 

17 mars 2023

Le sens de la famille

Je profite aussi du bonheur d'être avec mes grands, ce temps suspendu, tous les trois à la maison, avant l'envol définitif de Léo - et puis Elsa aussi commence à imaginer son départ possible... alors, comme je l'ai toujours fait, mais avec un petit pincement au cœur supplémentaire, j'essaie de nous forger des souvenirs. Hier, le "concert-au-cinéma" de Ben Mazué-Grand Corps Malade-Gaël Faye, "un concept chelou" comme disait GCM, mais rigolo - on a dansé et applaudi comme si on était à Pleyel... 

Je n'avais pas réalisé à quel point ce thème de la parentalité habite les textes des trois artistes, du coup je me suis laissée cueillir, et puis ce matin j'en ai découvert un autre encore, et c'est tellement ça :

(...) Si jamais j'devais tout perdre, si la roue faisait demi-tour
J'n'aurais besoin que d'leur présence pour que la vie reste facile
Peu importe c'qu'il y a sur la table, c'qui compte c'est qui il y a autour

C'que j'ressens, je veux leur dire, j'crois qu'j'ai l'sens de la famille (...) 

Grand Corps Malade, encore lui.
Peu importe ce qu'il y a sur la table, ce qui compte c'est qui il y a autour...

14 mars 2023

Après l'école


Ce n'est presque rien et c'est beaucoup, ce petit rab' de famille et d'enfance - ce soir, j'ai joué au jeu de l'oie avec les jumeaux pendant que leur père préparait le dîner, et si cette fois nous n'avons pas lu d'histoire (un de mes moments préférés, un gamin de chaque côté sous la couverture, et maintenant, ils lisent un peu à tour de rôle aussi), j'ai aimé les parties de chatouilles et le chahut tous les quatre sur le lit, jusqu'à l'heure des bisous de bonne nuit. Des bonheurs simples, gratuits, inespérés - que je ne pensais pas voir revenir avant d'être peut-être grand-mère un jour... j'adore. J'adore aussi voir leur père, souvent si soucieux, sourire dans ces moments-là, et sentir l'amour qu'il a pour eux. Le lendemain, Naïm m'a solennellement demandé si j'étais là le week-end prochain, parce que, a-t-il dit, "on pourrait aller au ciné tous les quatre" - et de me décliner le programme des films à l'affiche pour les enfants. Bon, Sacrées momies, ça ne me fait pas rêver mais...

12 mars 2023

Bonheur à demeure

Ce devait être un week-end au bord de la mer. Et puis les dépenses à prévoir, la fatigue, la météo plus que maussade nous ont fait renoncer. Au lieu de cela, nous avons bricolé. Enfin... nous avons commencé par une virée Leroy-Merlin, puis Samir a bossé, et moi j'ai fait le grouillot, et barbouillé un peu de peinture par-ci, un peu de vernis par-là. Résultat des courses, on a passé un week-end délicieux - j'adore le regarder travailler, chercher des solutions, être attentif à chaque détail... et je suis tellement contente du résultat ! D'autant plus précieux que c'est le cadeau commun de mes 50 ans, et que dans les couleurs, les éclairages, les matières, il y a donc un petit peu de l'amour de chacun, et beaucoup du savoir-faire de mon artisan préféré... comme dans toute la maison.

10 mars 2023

J'avance à l'autre...

(Que c'est beau...)

Etre ensemble, écouter les moments de vie que mes proches me racontent, recevoir leurs conseils, c'est mon carburant. J'avance à l'autre, et lorsque nous nous quittons, je garde dans mon coeur toute la richesse de nos échanges.

Isabelle Maurer, Je ne baisserai plus les yeux

08 mars 2023

Warrior Girl

Ce n'est pas que ce soit une bonne nouvelle, loin de là. Et j'espère que ce ne sera bientôt plus qu'un mauvais souvenir. Mais j'avoue : annoncer un cancer via une pochette-surprise "cancer reveal" - (clin d’œil aux gender reveal parties) pour les amies proches avec tablette de chocolat et flacon de CBD de secours, c'est fort. Très, fort. Fallait bien ça, pour encaisser la nouvelle ; mais qui y aurait pensé, sinon elle ?
#mescopinesdéchirent

07 mars 2023

Sans illusions


...mais quand même...

03 mars 2023

Une fleur parmi les fleurs

Quelquefois c'est un alignement d'étoiles - Marion m'avait parlé de ce fleuriste adorable, reconverti après une autre vie professionnelle, Sandrine avait soufflé l'idée de la rencontre-immersion avant le début d'une formation, et j'ai franchi la porte de la ravissante boutique d'Hervé comme un petit coup de poker, pour voir.

Résultat au-delà de toute espérance : s'il ne prend pas d'alternants, oui, il accueille pour quelques jours des aspirants fleuristes, et d'ailleurs, plus largement, coache des gens en reconversion. Et... c'est la gentillesse même, attentionné, sensible au beau et à l'humain, éco-responsable, bien implanté dans un quartier charmant. J'y ai accompagné Elsa, ça a matché tout de suite, et ce soir je l'ai vue revenir radieuse et enthousiaste, avec ses premiers bouquets - et déjà décidée à le faire changer d'avis sur l'alternance. Sa joie communicative ce soir... rien n'aurait pu me faire plus plaisir.

01 mars 2023

Dans la cour des grands

Un jour vous avez un bébé blond et joufflu et puis... le jour d'après il intègre un Ministère et se fait courtiser par des cabinets de conseil d'envergure internationale, naviguant dans des sphères dont vous n'avez aucune idée. Mais c'est toujours le même Léo, confiant, aimant et drôle, et je suis tellement heureuse pour lui de toutes ces portes qui s'ouvrent - ou plutôt qu'il a ouvertes, à force de sérieux et d'engagement.

J'espère que son idéalisme ne se brisera pas sur les grèves du monde économique et politique, et qu'il pourra y mettre son tout petit grain de sable, ou de sel. Et qu'il se laissera cependant le temps de vivre, de voyager, et d'aimer.

18 février 2023

Un samedi soir sur la Terre

On pourrait se dire que c'est un samedi ordinaire - quelques patients, un déjeuner de copines, faire des courses, une lessive, finir un film sur Netflix, récupérer un bouquin à la librairie et tomber dedans : pas de grandes dépenses, pas de sortie culturelle, pas de dîner en ville, pas de fête jusqu'au bout de la nuit - juste la maison pour moi seule.

Et pourtant l'émotion à fleur de peau, touchée dix fois dans cette journée - par le désespoir de telle patiente à la séparation de ses parents. Par la confiance de  tel autre qui se laisse entraîner dans un état hypnotique profond à la rencontre d'un traumatisme oublié.

Par l'authenticité des échanges avec mon amie - la vie, la mort, l'amour, pas de small talk entre nous. Par le discours de Julianne Moore dans le bouleversant Still Alice, sur la maladie d'Alzheimer : qui sommes-nous encore lorsque nous perdons la mémoire ? Par le magnifique L'année de la pensée magique, journal de deuil de Joan Didion (le bouquin de la librairie).

Par les associations d'idées qui m'ont fait plonger, via la musique (ce bonheur d'être seule pour écouter à plein volume et chanter), d'abord dans mes années chorale de gospel, en commençant par This little light of mine puis The storm is passing over et Song in my soul. 
Puis ramenée vers d'autres temps  - c'est fou la puissance d'évocation de la musique, comme celle des parfums - Illumina, Days like this, Calma y tranquilidad, Rude, Alegria, juste les premières mesures suffisent à me connecter à des états, à des visages, à l'atmosphère de ces journées-là - ce soir je réalise à quel point je suis comme une éponge gorgée d'émotions, de blessures à peine cicatrisées, mais je me sens pleinement vivante.

15 février 2023

Février de cette année-là


 ...c'est une chanson de Maxime (Le Forestier), mais ce soir, il chantait Georges (Brassens). Ce concert, je l'avais vu il y avait bien des années avec le père de mes enfants aux Francofolies et je m'en souvenais comme de l'un des meilleurs auxquels je sois jamais allée. Le théâtre Romain Rolland, ce n'est pas la Rochelle, mais c'est quand même chouette, et le partager avec Maman, c'était encore mieux.

Les "inédites" ne datent pas d'hier (l'album Petits bonheurs posthumes date de 1996), mais j'aime toujours autant Honte à qui peut chanter et la Chansonnette à celle qui reste pucelle. Et puis l'irrésistible Mélanie, et puis Mourir pour des idées, et puis la Supplique pour être enterré à la plage de Sète...

Et si la voix force un peu par moments, qu'une fragilité se devine, ça ne rend l'instant que plus précieux encore. Je me souviens de concerts tardifs de Barbara, et d'Aznavour un an avant sa mort - si les voix étaient moins puissantes, elles étaient tellement émouvantes, aussi.

14 février 2023

Soyez le changement...

 ...que vous voulez voir dans le monde. Bon, vu l'état du monde, c'est une tâche un peu démesurée, mais je tenterais bien les petits changements (puisqu'il paraît qu'il suffit de 21 jours pour que notre cerveau trace les routes d'une nouvelle habitude). J'essaie une nouvelle habitude par mois :

- Janvier : carnet des 3 kifs
- Février : suppression de Facebook et Instagram... sur le téléphone
- Mars : j'hésite : challenge méditation sur 30 jours ou suppression des consommations de sucre inutiles ?

Et après ? Après j'aurai certainement d'autres idées...

12 février 2023

Cassignas

J'ai retrouvé la grande maison de Guilou, les petites boutiques désuètes d'Agen (dont le Casaquin Doré, boutique de confection probablement échappée d'un film de Jacques Demy), mangé du confit de canard, marché au soleil le long du Canal du Midi et dans la campagne environnante : grand ciel bleu, air pur, horizon dégagé, pas un bruit, à se demander comment nous pouvons vivre si loin de tout cela...

A gauche mon moment préféré lorsque je suis là-bas : ouvrir les volets sur le soleil qui se lève entre les branches du grand cèdre...

J'ai fait la connaissance de Twist, le loulou de Poméranie (un genre de micro-renard-hérisson, quelques grammes de chien et beaucoup de poils), et accueilli César et Rosalie, coq et poule de leur état (pour les œufs, il faudra attendre leur acclimatation dans leur nouveau poulailler). 

Et aussi dégusté un curry végétarien préparé par un jardinier très cultivé pour son amante anglaise - aussi excentrique qu'alcoolique, en compagnie d'un improbable Christ barbu et chevelu qui aurait eu le temps de sérieusement grisonner et d'affuter un regard indulgent mais amusé sur l'espèce humaine (un ancien travailleur social, ça aide). Le tout dans une petite maison de conte de fées - pierre, bois, trois chats et un poêle ronflant. J'adore.

Et bavardé de longues heures devant la cheminée, un verre de bon vin à la main. Une conversation ininterrompue lorsque nous sommes ensemble, intermittente lorsqu'un océan nous sépare, mais toujours reprise comme si c'était la veille. Les amours, les enfants, les projets, les découvertes : ça aussi, j'adore.

06 février 2023

Wanderlust

Et voilà, on invite des voyageurs du bout du monde, on échange sa maison, et quelques années plus tard on a un grand qui part à son tour dans le vaste monde... et c'est formidable, même si c'est un peu angoissant pour la maman. Go go go Léo ! (la suite montrera que la vie c'est ce qui arrive quand on avait prévu autre chose, comme le disait Jeanne Moreau : retour express pour cause d'opportunité professionnelle exceptionnelle.)

03 février 2023

Points communs

Avec ou sans majuscules : ce matin j'ai donné un coup de main à Louis, dans ma librairie coopérative favorite. Sur le papier c'est - ouvrir des cartons, scanner des commandes, ranger des bouquins. Sur le terrain c'est - deux heures de discussion lectures tous azimuts avec un jeune libraire passionné de littérature, de BD, de politique, de cinéma, repartir avec un roman acheté et un essai offert que j'ai ensuite partagé avec Léo, merci le service de presse, absolument enchantée.

La semaine précédente c'était atelier cuisine avec Entissar et son fils, étudiant, théâtreux et photographe - même richesse d'échanges sur les intérêts et les chemins de vie, et le plaisir de faire de mes mains. Décidément, c'est un lieu-ressource, et l'opportunité de belles rencontres - et exactement ce que je recherchais - surtout rien de psy ni de mental, juste des tâches simples et la joie de participer à un beau projet collectif. Quasi un atelier thérapeutique pour moi, et comme le disait Marion : le don, c'est bon !

30 janvier 2023

Il y a trois ans...

...quelqu'un que j'aimais beaucoup m'avait offert, en guise de cadeau d'anniversaire, une consultation chez un voyant. Choix que je n'aurais jamais fait par moi-même. Quand je relis l'enregistrement aujourd'hui, je suis assez bluffée (même s'il a fallu un peu de temps ;-))... Extraits :

"J'aime les gens amoureux, ça vous va bien. Vous n'imaginez même pas comment ça vous va bien : on s'en rappelle même plus (…) L'image d'un homme homme – quelqu'un que vous connaîtriez déjà ?(…) Amour gloire et beauté : travaux dans une nouvelle maison, finances OK, Peut-être vous travaillerez là aussi (…). Un mec qui dit éventuellement je sais pas faire mais dis-moi, et je suis là (…). Ça sera pas une rencontre cérébrale ce sera une rencontre affective. Le cœur qui bat des deux côtés, vous allez voir tout ce qu'on transforme. Quelqu'un sur qui tu peux t'appuyer, compter, qui sait ce que c'est qu'une paternité, qu'une maison à gérer, la vie... (...)

Déménagement, la gamine vous suit, il y a un homme dans la maison, vous y travaillez... c'est chouette ! Moi j'aime bien, je suis un peu fleur bleue j'aime bien les happy ends. Quand les choses marchent en voyance c'est quand les gens se bougent. Et vous vous êtes une femme qui bougez, qui prend les choses en main, c'est ce qui va vous sauver. Et en cadeau : je veux qu'on m'aide et être épaulée et avec le cœur qui bat – la décision que vous allez prendre c'est la bonne."

Air-Bag

En supervision, je râle après la perte de temps voire la perte de chances que peut représenter, pour un patient, un premier contact avec un psychanalyste caricatural qui l'abandonne à la solitude du divan et se contente de faire hum hum, ce sera tout pour aujourd'hui, au revoir. Et j'aime bien la réponse de mon interlocutrice qui me dit, moi quand je les vois arriver après une première mauvaise expérience, je ne ressens pas de colère, mais de la joie devant l'élan qui pousse cette personne à continuer à chercher de l'aide, à garder foi en la possibilité d'une parole. 

De la même façon, lorsque je lui partage mon ras-le-bol d'avoir parfois le sentiment d'éponger toute la misère du monde, elle me renvoie aussi à la joie de voir dans le long terme émerger la vitalité, la créativité chez les patients, et la façon dont cela sollicite aussi ces dimensions chez le thérapeute. Et je suis d'accord, bien sûr !

C'est juste qu'actuellement... je suis un peu fatiguée. 

28 janvier 2023

Des sorcières comme les autres

Un cercle de femmes, un lieu et un temps hors lieu, hors temps, si loin de nos quotidiens, pour plonger dans nos profondeurs, explorer nos questions, et trouver les réponses que nous n'attendions pas (quel privilège). De ce temps je ramène un lien paisible avec le masculin - en moi et en l'autre, et l'envie de prendre davantage soin de mon féminin - de la possibilité d'être fragile, du droit d'être vulnérable, une invitation à la douceur, à la lenteur pour moi-même. Si la précédente rencontre m'avait invitée à dire oui, peut-être celle-ci me suggère-t-elle d'apprendre à dire non - à m'arrêter quand je suis fatiguée, comme je le fais actuellement, à refuser les sollicitations, à prendre et à faire prendre en compte ce dont j'ai besoin ?

Cruche et fière de l'être !

Ce matin, j'ai eu l'insigne honneur d'être invitée dans le groupe des cruches, dont voici le manifeste :

 L’art  d’être une cruche 

La cruche expose sa rondeur et sa stabilité. Certaines masquent leur contenu  comme celles en terre permettant maturation dans leur ventre abrité dans l’ombre, tandis que d’autres laissent la lumière traverser leur corps de verre exposant leur intérieur en toute transparence et infusant ainsi la clarté céleste.

La cruche a une grande ouverture. Ouverture à ce qui peut la remplir. Son espace intérieur accueillant sans réserve ce qui vient la remplir, parfois même à en déborder. La cruche distribue avec générosité ce qu’elle a reçu sans déverser à tort et à travers grâce à son bec verseur courbé de douceur et à sa poignée qui la rendent ergonomique et saisissable.

La cruche est concave et non vide, réceptacle de fluides nourrissants. Elle a cette capacité à reverser ce qui l’a remplie pour se remplir à nouveau et redistribuer légèrement imprégnée de ce qui l’a déjà traversée, infusant à son tour tel un tonneau ancien redistribuant un peu de ses essences.

Sa stabilité donne un socle solide aux fluides instables. Elle est contenante mais non « retenante ». La cruche se doit d’être ouverte, prête à accueillir généreusement ; si elle fermée hermétiquement, elle n’est plus cruche, elle devient un pot plein de vide, ou bien remplie sans espace intérieur. Ce n’est plus une cruche.

Grande ou petite, la cruche a des formes et tailles diverses mais toutes ont en commun aussi la simplicité. 

Tellement cruche !

Annabelle C.

18 janvier 2023

Communs

Points communs, c'est le nom de la librairie coopérative, et le Pot commun, c'est le nom du tout récent café associatif adjacent. Au programme, des lectures et des rencontres, mais aussi des jeux de société, des expos, des conférences, de la musique, un prix jeunesse - et pour le café, restauration bio, circuits courts, cafés suspendus, espace coworking - bref, tout pour me plaire.

Ce matin, j'y ai fait ma première matinée de bénévolat, et je me suis régalée, dans tous les sens du terme : j'ai épluché des choux de Bruxelles avec José, un autre bénévole sympa, appris à faire des baklavas avec Entissar, la chef cuisinière syrienne, et joué à la restauratrice en préparant la vitrine de desserts et en en dressant les tables. C'était joyeux, léger, un parfait antidote à l'immobilité et au tout-dans-le-mental de mon métier. Faire de mes mains, rencontrer des gens du coin animés par les mêmes choses, j'ai déjà envie d'y retourner ! La prochaine fois, je donne un  coup de main à la librairie. 

17 janvier 2023

Gracias a la vida

...que me ha dado tanto...

En ce début d'année, je me suis entendue recommander à une patiente le concept des 3 kifs par jour (Florence Servan-Schreiber), ou "trois questions pour une vie heureuse" en thérapie brève (Luc Isbaert) - ça fait tout de suite plus sérieux. Et puis je me suis dit que je pourrais être tentée d'en faire l'expérience moi aussi, et j'ai commencé un petit carnet au premier janvier. 

- qu'est-ce que j'ai fait aujourd'hui dont je peux être satisfait ?
- qu'est-ce que quelqu'un d'autre a fait pour moi dont je peux être satisfait ?
- et quoi d'autre m'a fait plaisir aujourd'hui ?

Le point sympathique c'est qu'il peut s'agir de très petites choses - le sourire d'un inconnu, l'arrivée du métro pile quand on entre sur le quai, le chat qui vient ronronner sur vos genoux - ou de plus grandes, et qu'en exerçant son regard on se rend vite compte qu'il y en a beaucoup plus que trois par jour. J'aime particulièrement la deuxième, qui invite à travailler la gratitude.

Après deux semaines d'observation, je ne peux que constater, ou plutôt, confirmer : l'amour, l'amitié, la gentillesse, les grandes discussions, les petites attentions, mon métier, les livres (les mots en général), le chant, les projets même très modestes (acheter enfin un petit congélateur sur le Bon Coin, prendre des billets pour quelques jours à la campagne en février) sont d'inépuisables et récurrents pourvoyeurs de kifs.

15 janvier 2023

Trop long...

Mi-janvier déjà ? Aujourd'hui j'ai lu la fiche CPAM sur le Covid long : fatigue massive et fluctuante, toux, essoufflement, vertiges, douleurs oculaires, douleurs musculaires, troubles du sommeil et de la digestion, de la mémoire et de la concentration : ah ben c'est peut-être ça tous ces petits bobos qui s'accumulent, et l'épuisement qui s'aggrave... la bonne nouvelle, c'est que ça passe. La mauvaise, c'est qu'il faudrait s'arrêter, se reposer, ce qui n'est pas complètement possible... à voir.

En tout cas, ça explique cette sensation de tunnel anxieux depuis plusieurs semaines, et pourquoi je suis submergée par la parole des patients dès le début de mes journées, et cette envie de pleurer dès que je vois la moindre contrainte s'ajouter à celles qui sont incontournables. Vivement le printemps !

31 décembre 2022

Choisir la douceur, la suite de la suite

La douceur, c'est aussi une journée hammam avec Marion, le plaisir d'un long déjeuner avec Léo, faire de la pâte à sel, lire la fin de Moby Dick et revoir Klaus avec les jumeaux (et leur monter des lits superposés avec leur père), franchir le seuil de la nouvelle année dans le temps d'un câlin. Rien de compliqué... juste de la douceur.

26 décembre 2022

Choisir la douceur, suite

Choisir la douceur

Et décembre ? Décembre je n'ai pas eu le temps de le voir passer... une grippe et un Covid en trois semaines, Léo et Elsa malades tous les deux aussi, une charge de travail trop dense qui devrait m'amener à repenser mon modèle professionnel - mais comment ? Des bleus au coeur qui n'en finissent plus - les fragilités d'Elsa auxquelles nous nous écorchons encore parfois l'une et l'autre, un message de haine recuite vomie par son père le matin de Noël, les nouvelles de Patrice aussi, et mon impuissance devant ce naufrage inévitable... un décembre qui aurait pu n'être que glacial.

J'avais appréhendé ce Noël, l'absence de Bizzou, l'absence de Daniel, la peine des deux grands-mères, l'impossible lien pour Léo et Elsa avec Camille et Gabriel.

Un Noël qui aurait pu être si fragile, et que nous avons su rendre si joli cependant tous les quatre - d'abord le retour de Léo, et sa présence autour de ses grands-mères, la complicité autour des matches de foot regardés ensemble, et puis une jolie chapelle de bois pour que souffle quand même un peu de l'esprit de Noël, un dîner tout doux avec parmentier de canard façon Cyril Lignac (trop facile d'être bluffante), des chansons (ça c'est un tel bonheur pour moi, ce plaisir à chanter ensemble), un brunch tout simple, un spectacle sans prétention mais rigolo, Avatar tous les trois demain, et tellement de tendresse attentive de tous, même à distance - un petit colis de Gene, des messages aimants de YoYo, et les clins d'oeil des amis. Bonne résolution : de ce décembre, je ne garderai que la douceur, et l'admiration tranquille devant le courage, la bonne volonté et l'intelligence du coeur de tous.

30 novembre 2022

Enthousiasme

Après 8 mois de cheminement, je continue à grandir dans mon être-thérapeute avec la certification en Hypnose Ericksonienne Transpersonnelle... et si cette image peut paraître bien ésotérique à l'observateur extérieur, elle est riche de symboles pour moi. On pourrait la voir comme une marelle, du monde d'en bas au monde spirituel, de l'animal à l'esprit guérisseur, un chemin, un passage, une porte d'entrée qui traverse successivement le monde de la terre, celui de l'eau, celui de l'air et celui du feu... Une représentation des mondes et des niveaux multiples qui sont en nous, et que nous habitons ; des forces silencieuses ; de la dimension mystérieuse, inspirée (parfois !), de ce métier de passeur qu'est le métier de thérapeute. Au-delà de l'apprentissage de techniques, c'est une invitation à se laisser traverser par le souffle, quelque soit le nom qu'on lui donne - Dieu, l'Univers, la Source, l'Esprit...

Est-ce que je me sens d'ores et déjà hypnothérapeute ? Non. Je pense que c'est le fruit d'une longue expérience, et d'une pratique sans cesse interrogée et approfondie. Le formateur nous l'a d'ailleurs formulé explicitement. Est-ce que je mentionnerai cette dimension spirituelle auprès des patients ? Ce n'est pas nécessaire... mais pour certains, ce pourra être utile. Est-ce que je l'ai déjà rencontrée dans ma pratique encore débutante ? Oui. De façon frappante à deux reprises déjà - dans la clôture d'un cycle de deuil familial, dans la rencontre annoncée avec un objet symbolique...

26 novembre 2022

50 nuances de gratitude

C'est tellement chouette de vous voir tous, famille, amis, ceux que je connais depuis toujours, depuis des décennies, ou juste des années, et parfois moins. 

50 ans, ou l'âge de compter certaines amitiés en décennies, comme en témoignent les photos sur le mur de l’escalier... je ne sais pas vous mais pour ma part, je ne les ai pas vues passer, peut-être aussi parce que nous les avons traversées ensemble. Des années avec des joies et des peines, des fêtes, des fous-rires, des maisons de vacances, des naissances, des déménagements, des apéros et des petits et des grands changements de vie(s).

Je me souviens... d'une course en sac de couchage chez les parents de Cécile, nous avions treize ans ; que Lalie m'a tiré les cartes la première fois que je l'ai rencontrée ; de la petite chambre de Marion quai aux Fleurs et que Marguerite fut le bébé qui nous a donné envie d'en faire ; de week-ends char à voile avec Christine et Philippe ; d'un concert de Barbara au Châtelet avec Michaële ; de Moon River au mariage d'Antoine et Vincent ; d'une danse audacieuse de Ronan au Hameau, et d'avoir fait une déclaration d'amour à Ghislaine dans le même lieu magique ; des confidences à la machine à café du Fil Santé Jeunes ; de la maison de l'Ile de Ré, et de notre petite Mémé ; d'avoir retrouvé Nadia à New York ; d'avoir chanté grâce à Elsa des trucs que je n'aurais même pas osé imaginer, comme Hallelujah et Someone like you ; de coups de foudre amicaux pour Charlotte et les deux Cécile, de la petite flûte à papa et de la pince à cornichons avec Céline et Laurence. Je me souviens aussi très bien de la première fois où Samir est venu prendre un café rue de la Convention, il n'y a pas si longtemps. Et de tellement, tellement d'autres choses encore... 

50 ans c'est aussi l'âge d'avoir vu grandir mes enfants, et je suis si fière des deux, qui tracent chacun leur chemin singulier avec du courage, de l'intelligence et du cœur. J'ai élevé des petits gauchos-écolos-militants – et je ne vois pas comment il aurait pu en être autrement ! Je suis très heureuse de la relation que j'ai avec les jeunes adultes qu'ils sont aujourd'hui.

50 ans c'est l'âge où je peux me dire que la vie m'a apporté déjà tellement de bonheurs... je mesure ma chance. D'avoir une famille affectueuse. D'être en bonne santé. De faire un métier que j'aime. De vivre dans un lieu que j'ai choisi, et que j'adore ! D'être aimante et aimée.

C'est surtout réaliser la chance que j'ai d'être si bien entourée, par tellement de belles personnes, si différentes entre elles et qui apportent tellement de joie, de complicité et de tendresse à ma vie. Chacun, chacune, de près ou de loin, au quotidien ou ponctuellement, amène sa petite musique singulière, une couleur de plus à notre arc-en-ciel – et je n'oublierai jamais comment nous avons été soutenus, aidés et entourés, les enfants et moi, toutes ces dernières années. Sans vous tous, les bonheurs d'aujourd'hui n'auraient pas été les mêmes.

Vous réunir, c'est mon plus beau cadeau, et s'il en manque quelques-uns ce soir, je sais que c'est parce qu'ils ont été appelés par d'autres obligations, mais qu'ils auraient été heureux de répondre présent également. 

50 ans ce n’est ni un début ni une fin pour moi. C’est la continuité de ce que j’ai déjà construit jusqu’à aujourd’hui. Et je me réjouis à l'idée de partager plein de petits et de grands bonheurs avec vous dans les années à venir.

Je n'ai pas à ce jour de grands projets, je n'ai pas eu non plus de révélation sur un but à atteindre pour cette seconde partie de vie, mais j'ai trouvé mon chemin : DIRE OUI. Avoir confiance que ce qui est, est bien. Avoir confiance tout court. Je constate : le oui à l'inattendu, à l'imprévu, n'a amené que du bonheur dans ma vie ces derniers temps. 

Je vous aime, merci d'avoir tous répondu Présent ! Et maintenant, Champagne !

24 novembre 2022

Daniel


Je les trouvais si beaux ensemble, et racontais à qui voulait l'entendre comment ces deux-là s'étaient bien trouvés (si j'avais fait un casting de l'homme idéal pour Maman, il aurait furieusement ressemblé à Daniel). Et comment je trouvais absolument jubilatoire l'idée qu'on puisse vivre une histoire d'amour à 77 et 79 ans, quand on a l'un et l'autre pas mal de cicatrices au corps et à l'âme. Et comment j'aimais la façon qu'ils avaient de savourer la vie tant qu'elle est là - aller au cinéma, au théâtre, bien boire et bien manger, voyager - c'est elle qui l'a emmené à Venise pour la première fois. Et la tendresse amusée, pas dupe, qu'ils avaient chacun pour les petits travers de l'autre. J'aimais sa gentillesse, sa discrétion, sa générosité ; ses engagements sociaux et politiques. J'avais été très touchée qu'il accepte d'être, avec elle, caution pour mon logement ; et de le voir, il n'y a pas si longtemps, porter fièrement des chaussettes rigolotes que je lui avais offertes. Ce soir je suis si triste pour elle et pour lui... mais aussi reconnaissante pour cette invitation à vivre pleinement aussi longtemps que nous sommes vivants. 

PS : j'ai été très touchée qu'une petite-fille de Daniel me propose de lire ce texte lors des obsèques. Ce que j'ai fait, avec une profonde émotion. 

23 novembre 2022

Des fleurs, un bon fauteuil et des mots doux

...que demander de plus ?

J'ai failli râler ce soir-là, quand il est arrivé les mains vides - mais en moto, avant une sortie, évidemment ! Et puis je me suis tue, parce que la ligne silencieuse de ce lien reste, de part et d'autre - parce que tu ne me dois rien, alors tout ce qui vient est don. J'ai bien fait... et les fleurs m'attendaient à la maison. Et m'ont d'autant plus touchée qu'il avait retenu que de tous les bouquets, mes préférés sont, et de loin, les bouquets de fleurs blanches. 

Ce jour-là, il y a eu aussi tellement de petits messages, coups de fil, peut-être... 50 ? Et la vidéo montée avec amour par Léo... sur la photo, il y a aussi un autre cadeau qui me tient beaucoup à coeur, celui de Maman - cet amour de fauteuil club plein cuir dans lequel me lover avec plaid et chat pour bouquiner... un rêve très ancien réalisé. 

22 novembre 2022

Too

A la veille de mon anniversaire, il y a eu aussi cette amitié délicate comme un amour, ce lien improbable, joueur et poétique à la fois, cette capacité à faire naître des instants fragiles dans le banal comme dans l'exceptionnel. Nous avons bu un chocolat chaud, découvert une délicieuse librairie, acheté des recueils de poésie, manqué de peu un bar à champagne fermé ce soir-là, et puis nous sommes montés sur le toit du monde, pour admirer Paris à nos pieds... deux sales gosses, un enchanteur et un lutin-Lutens, une fleur de frangipanier derrière l'oreille.

21 novembre 2022

Poèmes

Je parlais avec tendresse d'un de mes patients, et Samir m'a dit en riant : mais il faut que tu arrêtes d'aimer tout le monde comme ça ! J'ai d'abord souri à mon tour, oui... et puis à la réflexion, j'ai rectifié - non, parce que c'est moi, je suis faite comme ça !

 J'ai aimé qu'il ait ce regard-là, sur cette tendresse irrépressible chez moi - et j'ai aimé aussi mon double mouvement, le besoin de défendre cet élan, fût-ce sur le ton de l'humour. Et puis quelques jours plus tard, je suis tombée sur ce texte-là :

 À cette superbe raison de vivre
- se taire et s'appliquer à une tâche matérielle, humble -
j'ajoute la lecture de poèmes.
Ce n'est pas une spécialité d'écrivain,
c'est une affaire commune :
les rayonnants d'amour savent que ceux qu'ils aiment
sont des poèmes de chair et d'âme.

Christian Bobin - Pierre, en hommage au peintre Pierre Soulages

Des poèmes de chair et d'âme... que c'est beau. Oui. En fait on devrait TOUJOURS avoir ce regard-là sur les êtres, non ?

17 novembre 2022

Halo


Je ne l'aurai appris que trois mois après, et sans autres détails sur ce qui s'est passé (je devine - le diabète, la dialyse, l'insuffisance rénale ou cardiaque) mais... il n'y aura plus de "- Hello Beautiful ! - Hello Halo-Tiger !", plus de SMILE ! Je ne retournerai pas en Jamaïque... alors, que reste-t-il ? Sans doute la plus belle et la plus inspirante de nos rencontres CouchSurfing, ce papa afro-américain parti faire le tour du monde avec ses garçons dans l'objectif de leur ouvrir les portes du monde - rien que ça. Une rencontre amicale, amoureuse, familiale, qui nous aura profondément influencés, les enfants et moi.

Et un trousseau de clés dont je me rends compte que, depuis notre rencontre, je les ai intégrées à ma vie, les transmettant autour de moi, à mes proches, à mes patients... 

- If your dreams don't scare you, they're not big enough
- What would you do if you coud not fail ? 
- What is the worst thing that could happen ?
- What's the alternative ?

-Thinking small, Halo, isn't easy or hard. It's just a habit. A habit with consequences. Same for thinking big.

I'm very spiritual. In that sense this has been an eye opening trip for me. My beliefs are that there is a God, I don't know what name he goes by. Jesus, Allah, who knows. He wants us to love each other as people, religion gets in the way of that, sometimes. God is in the people we have met, that accept us just as we are, that care for us as if we are part of their family. We are all his angels, and he puts us where he needs us to help someone. This has happened to me and for me. Some things could have no other explanation. It's happened to me several times on this trip already.

Il a été le premier à me parler des 5 langages de l'amour aussi... et de la nécessité d'être vigilants face aux dreamkillers

Ce soir j'ai replongé dans les photos de nos différentes rencontres, de celles avec nos enfants aussi - Léo est allé seul à Denver, Isaiah est venu au Kremlin... dans leurs photos de voyage, toujours en ligne, dans la présentation de son projet sur CouchSurfing - avant que peut-être, ses traces ne s'effacent. 


HALO'S HYMNS for HAPPINESS
1 Search out Happiness. It's looking for you too !
2 Transform someones life. Start with your own.
3 Look to connect with people. Eliminate strangers campaign.
4 When God winks, wink back (there are no accidents).
5 Be a superhero, fight FEAR (False Expectation Appearing Real).
6 Pour your passion, let it flow.
7 Thoughts become actions. Speak life to what you want.

- I'm a single father to 2 great young men. They are the reason my heart beats. I wish I was able to travel and explore the world when I was their ages, but I didn't have experiences like that. I'm about breaking cycles.

- I’ve come to the realization that through discourse with others we could eliminate a good deal of the mistrust and misgivings we have for people. It takes no work to see what’s different. We could find some common ground. It’s there ; we just have to look for it. 

- When I was a young man, I wanted to change the world. I found it was difficult to change the world, so I tried to change my nation. When I found I couldn't change the nation, I began to focus on my town. I couldn't change the town and as an older man, I tried to change my family. Now, as an old man, I realize the only thing I can change is myself, and suddenly I realize that if long ago I had changed myself, I could have made an impact on my family. My family and I could have made an impact on our town. Their impact could have changed the nation and I could indeed have changed the world. (~Author Unknown)

16 novembre 2022

Enveloppes

Elle est grande, très mince, très maquillée, tout de noir vêtue, un vague côté bad girl gothique qui se dément dès qu'elle ouvre la bouche - elle est charmante, courtoise, cultivée, et...porte beau sa détresse de long terme derrière un sourire radieux. Tout va bien, mais rien ne va : une famille aimante, créative, tournée vers le corps et la création - le sport, la danse, la musique - mais chez elle c'est le corps qui trinque, troubles alimentaires, troubles du sommeil, hypersensibilité au bruit. Les proches sont décrits comme attentifs et unis, mais son t-shirt, qui représente un petit renard et une lune blafards sur fond noir, affiche : Lonely Fox.

Deuxième entretien, il est étourdissant dans tous les sens du terme - brillant mais hypomane, a minima. Dilettante dans sa filière de maths de haut niveau, il se passionne aussi pour la philo et la psychologie. Ce jour-là, il me raconte une longue et multiple tentative de phlébotomie, échouée, un dimanche de désespoir, il y a deux ou trois ans ; ce jour-là aussi, il porte une chemise blanche tie and dye dont la partie rose foncé, artistiquement délavée, part du poignet pour aller jusqu'à la moitié du vêtement.

Cet autre, qui n'en finit pas de s'interroger sur le curseur entre le normal et le pathologique, et sur sa propre place sur ce continuum, vient avec une coiffure différente à chaque fois - la plus spectaculaire aura été une tour de dreadlocks surmontée d'un grelot qui évoque immédiatement la figure du fou du roi ; je l'aurai vu aussi arriver avec des vêtements intégralement trempés parce qu'il vient de pédaler une heure sous la pluie pour se rendre à notre rendez-vous, ses convictions lui interdisant d'utiliser des transports nécessitant des énergies fossiles.

Celui-ci vient se plaindre de récurrents "coups de pas bien", selon ses propres termes. L'anamnèse découvre des vagues de traumas successifs, comme une marée qui se retire en laissant apparaître un paysage rocheux chaotique et redoutable. Un père alcoolique et violent, mais qu'il a continué à voir longtemps après la séparation de ses parents ; deux frères aînés issus d'un premier mariage de la mère - qui vont mal aussi, père addict également ; la mère a récemment été diagnostiquée bipolaire... S'il a déjà vu des psys ? Oui, dans l'enfance et au collège, pour accès de violence incontrôlables. Sur son T-shirt s'étale cette question : IS THIS A MONSTER ?

14 novembre 2022

Grizzly

«Il reste d’une personne aimée une matière très subtile, immatérielle qu’on nommait avant, faute de mieux, sa présence. Une note unique dont vous ne retrouverez jamais l’équivalent dans le monde. Une note cristalline, quelque chose qui vous donnait de la joie à penser à cette personne, à la voir venir vers vous. Comme la pépite d’or trouvée au fond du tamis, ce qui reste d’une personne est éclatant. Inaltérable désormais.»

Christian Bobin

13 novembre 2022

Jubilons, acte I

Mais 2X50, ça fait beaucoup quand même...

06 novembre 2022

Dire Oui

Pas de projet ou de révélation, de but à atteindre pour cette seconde partie de vie, mais un chemin : dire oui. Avoir confiance que ce qui est, est bien. Avoir confiance tout court (...). Je constate : le oui n'a amené que du bon ces derniers temps (...).

Du coup j'explore un peu plus loin : est-ce que je peux dire oui aussi aux événements du passé ? Hum, ça c'est beaucoup plus difficile... mais en même temps, je vois, sous différentes formes, ce que ça m'a coûté de dire non à différentes étapes de ma vie. De lutter. De ne pas accepter ce sur quoi je n'avais pourtant pas de prise.

Un poème me vient, dont chaque phrase commence par, Je dis oui...

03 novembre 2022

Sur le fil

...à nouveau, des semaines-tunnels, le corps qui déraille un peu - une douleur aiguë au pied disparue presque aussi vite qu'elle était apparue, des vertiges, des nausées, des migraines, un épuisement qui se chronicise et décidément des questions sur l'impact sur le corps de ce métier de l'âme ? J'alterne entre l'enthousiasme - hypnose et EMDR continuent de produire des effets étonnants, mais j'ai encore tellement à apprendre... et le découragement, l'envie nette de fuir parfois. Mais il y a eu aussi cet élan joyeux à concevoir une fête pour mon désormais tout proche jubilé - le retour du G.O LuLu, les retrouvailles avec le spectacle vivant - Rien ne s'oppose à la nuit avec Lalie, Mixity avec Samir, Mots d'elles avec Michaële, une marche en forêt avec Annabelle et Emilie un soir de formation en hypnose, un dîner avec la lumineuse Charlotte. Ne pas oublier de voir le beau, le bon...