17 ans – une petite maghrébine à la mine triste et au regard charbon – une douceur résignée qui sied mal à son âge… Son père est très âgé, sa mère régulièrement hospitalisée pour des épisodes dépressifs graves, sa petite sœur se remet progressivement d’un cancer, une fratrie de 6 enfants élevés comme des chèvres – une famille trop bien connue des services sociaux. Quand sa sœur est tombée malade, puisque elle est l’aînée, elle a arrêté l’école - elle travaillait bien pourtant, c’est manifestement une jeune fille intelligente. Le petit ami sort de prison, la malmène – elle rêve toujours à son ancien amoureux, qui ne valait guère mieux…. Lui souhaiterait qu’elle garde sa grossesse (mais au nom de quoi ?), elle voit se refermer le piège d’une relation qui ne la satisfait pas – la fin de ses modestes projets, reprendre une formation, passer son permis de conduire… Se voit-elle demander à son éducatrice d’être son référent majeur si elle choisit d’avorter ? Non. Mais qui, alors ? Autour d’elle, personne… Que va-t-elle faire ? Je ne sais pas.
15 ans, mince comme un fil, une très jeune Zaïroise flanquée d’une copine qui sert plus ou moins d’interprète – non pour des raisons de langue mais pour des questions de compréhension – elle est en classe de Segpa, adressée par le petit copain qui a saisi qu’il pouvait y avoir un problème, ignore la date de ses dernières règles (juillet ? juin ?), sourit à l’annonce du résultat du test – c’est la copine, qui a l’air consternée. Qu’est-ce qu’elle veut ? Elle ne sait pas. Est-ce qu’elle veut que je l’aide à prendre un RV d’échographie ? Pas cet après-midi. Est-ce qu’un majeur de son entourage pourrait l’accompagner ? Elle ne sait pas. Est-ce qu’elle m’autorise à joindre son infirmière scolaire ? Oui. Le tout avec le même air absent - définitivement non concernée.
18 ans tout juste, la tête sur les épaules et les pieds sur terre – une petite jeune femme décidée qui se doutait bien du résultat du test, se laisse le temps de la réflexion, et me raconte comment ballottée de famille en famille, de France en Haïti, petite dernière après quatre frères, elle a appris à ne compter que sur elle-même et à prendre ses décisions seule. Elle exprime (comme toutes les autres) son refus de principe concernant l’avortement – Un enfant c’est pas un insecte qu’on écrase, dit-elle – avant de s’informer sérieusement sur l’IVG, et ses aspects médicaux, financiers, psychiques… Elle est à peine plus âgée que les autres, mais infiniment mieux armée pour penser les choses. Quelque chose est construit, structuré chez elle, qui la soutiendra dans sa décision quelle qu’elle soit – c’est évident. Elle dit, je me suis éduquée toute seule – fantasme ou demi-réalité ? Toujours est-il que des valeurs lui ont été transmises, et une volonté, qui la tiennent debout.
17 ans, jolie comme un cœur, tout sourire aux lèvres – au décours de l’entretien j’apprends la rupture avec le copain à l’annonce d’un risque de grossesse, le travail de nuit, dans un pub (au noir bien sûr à cet âge – donc sans couverture sociale, ni jours de repos, ni…), puis qu’elle est depuis la veille à la porte de chez elle avec sa sœur de 20 ans – qu’elles ont dormi chez une amie, qu’elles ne savent pas de quoi demain sera fait – que non, elle ne veut pas aller voir l’assistante sociale parce qu’elle ne veut pas qu’on la sépare de sa sœur. Je préfère être avec elle dans la rue que sans elle. Bien – nous en reparlerons, au prochain rendez-vous… ne rien forcer, mais rester en alerte. Je l’interroge sur son prénom, rare – tunisien ? égyptien ? Ibtisam signifie : sourire.
15 ans, mince comme un fil, une très jeune Zaïroise flanquée d’une copine qui sert plus ou moins d’interprète – non pour des raisons de langue mais pour des questions de compréhension – elle est en classe de Segpa, adressée par le petit copain qui a saisi qu’il pouvait y avoir un problème, ignore la date de ses dernières règles (juillet ? juin ?), sourit à l’annonce du résultat du test – c’est la copine, qui a l’air consternée. Qu’est-ce qu’elle veut ? Elle ne sait pas. Est-ce qu’elle veut que je l’aide à prendre un RV d’échographie ? Pas cet après-midi. Est-ce qu’un majeur de son entourage pourrait l’accompagner ? Elle ne sait pas. Est-ce qu’elle m’autorise à joindre son infirmière scolaire ? Oui. Le tout avec le même air absent - définitivement non concernée.
18 ans tout juste, la tête sur les épaules et les pieds sur terre – une petite jeune femme décidée qui se doutait bien du résultat du test, se laisse le temps de la réflexion, et me raconte comment ballottée de famille en famille, de France en Haïti, petite dernière après quatre frères, elle a appris à ne compter que sur elle-même et à prendre ses décisions seule. Elle exprime (comme toutes les autres) son refus de principe concernant l’avortement – Un enfant c’est pas un insecte qu’on écrase, dit-elle – avant de s’informer sérieusement sur l’IVG, et ses aspects médicaux, financiers, psychiques… Elle est à peine plus âgée que les autres, mais infiniment mieux armée pour penser les choses. Quelque chose est construit, structuré chez elle, qui la soutiendra dans sa décision quelle qu’elle soit – c’est évident. Elle dit, je me suis éduquée toute seule – fantasme ou demi-réalité ? Toujours est-il que des valeurs lui ont été transmises, et une volonté, qui la tiennent debout.
17 ans, jolie comme un cœur, tout sourire aux lèvres – au décours de l’entretien j’apprends la rupture avec le copain à l’annonce d’un risque de grossesse, le travail de nuit, dans un pub (au noir bien sûr à cet âge – donc sans couverture sociale, ni jours de repos, ni…), puis qu’elle est depuis la veille à la porte de chez elle avec sa sœur de 20 ans – qu’elles ont dormi chez une amie, qu’elles ne savent pas de quoi demain sera fait – que non, elle ne veut pas aller voir l’assistante sociale parce qu’elle ne veut pas qu’on la sépare de sa sœur. Je préfère être avec elle dans la rue que sans elle. Bien – nous en reparlerons, au prochain rendez-vous… ne rien forcer, mais rester en alerte. Je l’interroge sur son prénom, rare – tunisien ? égyptien ? Ibtisam signifie : sourire.