Il ne s’agit pas en psychanalyse de permettre aux gens de se mieux adapter, il s’agit d’acquérir cette liberté qui implique le risque, qui implique un choix qui vient prouver, montrer, démontrer que la vie n’est pas le plus précieux des biens. (…) …le sujet inventé par la psychanalyse est un dépassement de l’individu exclusivement préoccupé de sa survie. Or, si vous vous frottez à nos contemporains, nous constaterons que l’ennui qu’ils sécrètent découle de ce que leur seule préoccupation est une préoccupation de survie et si possible de survie dans le confort. Il n’y a aucun autre intérêt, aucune autre préoccupation et tout ce qui peut compromettre la stabilité de l’adaptation est honni et prohibé comme délit par les lois, comme péché par les religions. Renoncer, c’est un impératif, renoncez au désir et vous vivrez vieux et heureux. C’est pourquoi la psychanalyse est condamnée. Car ce qu’elle propose n’est pas gratuit mais coûteux, ne favorise pas la longévité, ne favorise ni le travail ni la famille ni la patrie. Par quelle folie, par quelle aberration est-on amené à entreprendre ce cheminement, cette recherche, je n’en sais rien, ou du moins c’est encore trop tôt pour le dire.
Lucien Israël, La parole et l’aliénation.
Lucien Israël, La parole et l’aliénation.