12 mars 2006

Ménage de printemps

En m'attaquant aux piles de documents en vrac dans mes tiroirs, je retrouve ces phrases de stagiaires notées au vol :
"Oui, mais ce qu'on sait, ce n'est pas ce qu'on fait ?!" - voilà - et c'est ce que je trouve intéressant dans la formation pour adultes - moins de transmission de savoirs que de partages d'expérience.
"Il y a une phrase qu'on dit chez moi : partage ton pain, il diminuera ; partage ta maison, elle restera identique ; partage ton coeur, il grandira." Que la phrase soit énoncée, par une assistante maternelle ASE, ne surprendra personne. Pour mémoire, ce sont ces dames :
Imaginez un métier qui vous confronterait, 24 heures sur 24, à l'impossible. Un métier qui consisterait à accueillir dans votre propre foyer des enfants aux vies chaotiques, aux problématiques insolubles. A accueillir pour un week-end, un mois, un an, vingt ans - sans pouvoir le prévoir - des enfants dont vous ne sauriez rien, ou si peu, devinant l'impensable derrière leurs comportements erratiques, leurs blessures mal cicatrisées.
Un métier sans appuis logistiques, sans bagages théoriques - rien d'autre que votre propre cœur et votre propre histoire - votre volonté fondamentale de prendre soin. Un métier de longue patience et d'amour au quotidien ; un métier d'apprivoisement, de reconstruction lente, de réussites minuscules et d'échecs douloureux, parce qu'apprendre à aimer, et déjà à se laisser aimer, est si difficile pour ces enfants-là.
Un travail qu'aucun travailleur social, aucun psy, aucune institution se serait à même de faire : dans chaque instant du quotidien, prendre soin. Un métier peu reconnu, à peine considéré, et qui ferait parfois sérieusement tanguer votre propre famille ; un métier forcément trop peu rémunéré, parce que le dévouement de chaque minute avec des enfants toujours abîmés dans leur cœur, souvent dans leur corps, ne se chiffre pas.