30 janvier 2006

Avoir des enfants, c’est…

- Faire des milliers de lessives, ranger par deux des milliers de petites chaussettes, acheter des milliers de petits BN tout ronds, préparer des milliers de repas.

- (Re)découvrir la joie des faire des bulles, la course, dessiner ou faire de la pâte à modeler, de courir dehors, de se glisser sous la couette pour lire à voix haute.

- Etre réveillés à 6h30 le dimanche, alors qu’il est difficile de les tirer du lit le matin en semaine.
- Se décentrer de soi-même. Se découvrir des trésors de tendresse, de patience, d'attention. Mais pas tous les jours, et pas à chaque instant. Et pourtant.

- Avoir en permanence une salle de séjour qui ressemble à une salle d’attente de pédiatre (dixit Marion).

- Se réveiller la nuit alors qu’ils ne pleurent pas. Se réveiller la nuit parce qu’ils pleurent. Dire adieu aux grasses matinées.

- Avoir le cœur qui se serre chaque matin en les déposant à la crèche, à l’école le matin – déjà, et ces journées si longues…

- Partager des petits bouts de notre enfance : Les Cités d’or, les légendes arthuriennes, le Palais de la Découverte, Emilie Jolie, Pomme d’Api, les emmener au théâtre, au cinéma, à la bibliothèque, voir les vitrines illuminées des grands magasins.

- Etre confrontés quotidiennement à la question, qu’avons-nous envie de leur transmettre ? Essentiel ou accessoire ? Cohérent ou paradoxal ? Vanille ou chocolat ? Le chouchou, rose, ou bleu ?

- Prendre soin de l’enfant qui continue à vivre en soi. Dans les difficultés inattendues, les silences du texte, le deviner davantage, le bercer doucement.

- Avoir une quadruple ration de câlins emmêlés sous la couette le week-end – petits bras ensommeillés autour du cou.

- Noter les mots d’enfants.

- Attendre les week-ends ; constater que les adultes aussi ont besoin de repos, une fois expédiées les corvées restées en plan durant la semaine ; attendre les vacances – les trouver trop courtes ; remettre à demain, le cœur inquiet à l’idée de se réveiller alors qu’il sera trop tard.

- Etre surpris par tout ce qu’ils découvrent sans nous : tiens, mais je ne savais pas que tu connaissais cette chanson ? Où est-ce que tu as grandi sans moi ? Les entendre parler entre eux, aussi – parce qu’ils savent déjà tout, de ce qui peut être dit devant les adultes, ou avec leurs pairs…

- S’interroger sur ce qu’ils nous reprocheront plus tard ; s’inquiéter de ce qui se transmet silencieusement ; accepter de leur accorder la confiance nécessaire pour qu’ils le transforment à leur tour, dans le chemin qui sera le leur.

- Garder précieusement des bracelets de naissance, les premières chaussures avec lesquelles ils ont marché, des pyjamas minuscules, des cahiers de maternelle.

- Etre bouleversés par un petit garçon qui lit pour la première fois – Nuala O’Faolain parle, pour elle-même, d’une deuxième naissance – l’ouverture d’un nouveau monde.

- Fondre devant les assauts de charme d’une chipie haute comme trois pommes et demie.

- Retrouver un Robin des Bois sur les packs de lait, le réveil sous le lit, et des chouchous multicolores dans toutes ses poches.

- Renoncer à l’idée d’un équilibre définitif entre l’intime, le familial et le professionnel – quadrature du cercle. Mais : ce matin, mon ami JP m'écrit : J'espère que vous n'oubliez jamais que le temps qui file pour nous est une éternité pour eux.