09 mai 2007

Smallworld

Un enfant d'amis fait admirer ses poissons rouges à Léo et Elsa : Avant, il y en avait quatre, mais il y en a un qui est parti au ciel. Léo : Ah bon, c'était un poisson volant ?

Nous plaisantons avec les enfants sur le fait que ce n'est pas toujours drôle d'être petit. Elsa, indignée : ah oui, c'est pas drôle d'être enfermée avec des parents dans une maison pendant 6 (?) ans !!!

J'aide Elsa à finir son dessert : Une cuillérée pour Chamade, une cuillérée pour Léo, etc... Je suis à court d'inspiration, quand elle me souffle : une cuillérée pour Ségolène ?

Grand-mère vient d'être opérée du genou. Impressionné par la taille du pansement, le petit voisin compatit : Tu as dû beaucoup pleurer ?!?

C'est le soir de l'anniversaire de Zaza, nous lui faisons un grand câlin à quatre mains au lit. Elle déclare : Papa, maman, j'ai un cadeau pour vous... c'est moi !!!

07 mai 2007

Tout petit monde

C'est un tout petit monde où s'abritent nos saisons
Petite boule ronde sous les ailes d'un avion
Et partout des gens qui dansent pour oublier un instant
La nuit et le silence et les peines du présent
C'est un tout petit monde l'eau le soleil et le sel
Les naissances et les tombes et l'essentiel et le ciel
Partout la même prière d'une mère qui attend
Que baisse la fièvre dans les mêmes yeux d'enfant
C'est un tout petit monde fragile au creux de nos mains
Balançant ses secondes entre tellement et rien...

Jean-Jacques Goldman

Ben qu'est-ce qui me prend ce soir - je ne suis pas toujours si sentimentale (quoi que...) - ni si littéraire ;-))) ? Je ne sais pas - mais c'est ça que je sens, et je me sens ça - vivante et vulnérable.

06 mai 2007

Consigne de vote

Sur une affiche de Sarko, une main anonyme a griffonné : Sans lui, tout devient paisible. Et, sur la liste des bureaux de vote - Où voter dans le 13ème ? une autre a ajouté : A gauche !

30 avril 2007

Voulez-vous danser Grand-Mère ?

Il y a cinquante ans, un accordéoniste renommé était en tournée dans une petite ville de province. Il demanda alors, où se trouvait la plus modeste des noces fêtées ce soir-là, et leur offrit une soirée de danse encore gravée dans leurs coeurs aujourd'hui.

C'est ce que nous contaient mes beaux-parents, attablés avec famille et amis pour leurs noces d'or, quand retentirent les premières notes de La Java Bleue... surprise que nous leur avions réservée. Emotion, larmes de joie, l'espace d'un instant nous étions hors du temps... Et nous avons dansé - rejoints par les tables voisines ! - au son joyeux et mélancolique de l'accordéon.

(Dans la boîte à trésors aussi, la valse de notre mariage, surprise dans la surprise préparée par un mari attentif puisque notre propre anniversaire de mariage n'est que dans quelques jours...)

21 avril 2007

Présidentielle

J'ai peur j'ai la trouille j'ai les foies j'ai les boules la pétoche
La liste est trop longue on nous bousille le monde tout y cloche
Pourrie l'atmosphère plus d'été plus d'hiver marée noire
Barbus enragés princes avides de pétrodollars

Mais où est donc le capitaine du navire
Les moussaillons boivent le bouillon ça tourne ça vire
Personne ne sait plus naviguer
Tous nos filets sont emmêlés
Et les p'tits poissons font la gueule
Les voilà prêts à s'accrocher
A l'oeil de verre et au délire
Du premier capitaine Crochet
Qui pue la haine et la friture
Y a pas à dire

Les temps sont durs

Quand ça pisse le sang j'essuie mon p'tit écran plein d'barbaque
Quand ça crève de faim je flippe et j'y peux rien faut qu'je zappe
Les p'tits à fond d'cale il paraît qu'c'est un mal planétaire
Dans tous les bateaux tout l'monde fait pas dodo en première


Moi je fais l'gros dos perdu dans ce chaos je m'rassure
Je mords avec rage dans mon p'tit bout d'fromage tant qu'il dure
Y a plein d'étrangers qui piqueraient bien les clefs d'ma maison
Chez moi comme chez eux y a plus d'amour heureux plus d'saison

Michèle Bernard, Les temps sont durs

18 avril 2007

Trêve

Vivre en maillot de bain dans l'herbe, manger des brochettes, se faire cocooner dans une atmosphère sereine - pas de non-dits encombrants, pas d'animosité rentrée... une totale liberté d'être, dans une affectueuse simplicité.

Travailler un tout petit peu, pour le plaisir de redescendre aussitôt dans le jardin pour jouer au loup (Elsa : Tu veux une brochette d'agneau le loup ?), chanter des chansons, imprimer des coloriages trouvés sur internet (et colorier aussi !). Regarder Elsa faire pipi debout contre le cerisier. Jouer aux dominos, au Rummykub, au Chromino. Relire L'amant de Lady Chatterley, avoir sous le coude L'Oeuvre au Noir - parce qu'il faut du temps et de la disponibilité pour savourer le bonheur de relire ses classiques. Voir le chat s'émanciper - de la maison au jardin, et du jardin au village. Boire du lait de la ferme, manger des oeufs frais pondus - des choses que même le plus bobo des Parisiens n'oserait pas espérer ! Construire une cabane sous la table du jardin. Etre entourés d'une nuée d'enfants, car les petits voisins ne s'y trompent pas, c'est la maison du bonheur ici...

N'avoir momentanément pas d'autre charge matérielle que de jouer avec les enfants, de les rincer le soir quand ils sont saturés de poussière et de soleil, de leur lire une histoire - n'avoir donc plus aucune charge, rien que le plaisir d'être dans un espace où chacun se retrouve, grâce à la diligente intendance de beaux-parents chaleureux.

12 avril 2007

Histoire de oufs

...une dame maghrébine de plus de soixante ans entre dans mon bureau. Dans son discours passablement décousu, je comprends qu'elle est adressée par l'assistante sociale, qu'elle se croit victime d'un complot de la famille de son mari (qui a bientôt 80 ans), et que celui chercherait à lui jeter le mauvais oeil - et à l'empoisonner, pour plus de sûreté ! - pour en épouser une plus jeune.

Ce qu'elle veut ? Rien moins que je serve d'intermédiaire, pour que le mari reconnaisse et explicite ses supposées pratiques suspectes ! Malgré l'aspect pathétique - et manifestement assez délirant - du discours, je ne peux m'empêcher de sourire... Elle n'entend pas que mes possibilités ne s'étendent guère à la magie noire, et en désespoir de cause, je lui propose, si lui le souhaite, de le recevoir. Et là, elle s'arrête, me sourit d'un air entendu et complice et déclare - mais c'est lui qui va dire qui je suis folle !

11 avril 2007

Happiness Box

Face à la Seine, un pique-nique inattendu -
deux verres de vin, un souper fin, et beaucoup d'amour.

Alleluia

Une jeune fille de 16 ans qui dit, voilà, j'ai "eu ma première fois" - et si c'était à refaire je le referais, même si je ne suis plus avec ce garçon, et ça s'est bien passé, et je me suis découverte différente - une jeune fille de 16 ans qui s'émerveille de son propre désir, questionne avec naïveté les thèmes de la sexualité humaine - et repart souriante, étonnée et ravie que le Centre soit un lieu de parole possible sur tous ces sujets - et pas une espèce d'usine à distribuer des pilules - une jeune fille qui dit, bien sûr, je suis musulmane, je n'étais pas censée le faire mais, ça va bien avec ça, une jeune fille qui dit - même si on se prend la tête il y a beaucoup d'amour dans ma famille - ça existe donc ?!?!

Je ne sais pas, ce qu'elle venait chercher - elle savait qu'elle n'était pas enceinte, ne souhaitait pas de contraception dans l'immédiat - peut-être juste ce qu'elle ne pensait pourtant pas pouvoir y trouver, cette parole échangée : un adulte qui accueille sa joie de devenir femme, un bonheur à partager. Mais je sais ce qu'elle m'a apporté - un vrai rayon de soleil au milieu d'une consultation souvent chargée en drames - une joie contagieuse.

Démasquée

Un médecin inconnu m'établit un dossier : Profession ? Psychologue. Il lève un sourcil : Psychologue ? Je croyais que toutes les psychologues avaient des grosses lunettes et un air rébarbatif ? Vous n'êtes pas du tout dans le moule vous ! (Je sais. J'peux pas m'en empêcher - ça s'voit tout de suite. :-)))

08 avril 2007

Zamille

Pourquoi tu m'appelles Zazou alors que j'm'appelle Zaza ?
Pourquoi tu m'appelles Babouche alors que j'm'appelle Dora ?

(Les amateurs reconnaîtront Janine - sauce Zaza).

07 avril 2007

Cérémonie d'ouverture...

...des vacances de Pâques : les vacances ont été officiellement déclarées ouvertes à la Foire du Trône, où Zaza a mangé sa première barbapapa (yeux écarquillés), où les enfants ont pêché les canards, tiré à la carabine (enfin, Léo !), roulé-boulé dans la maison parcours d'obstacles, où David a fait son tour annuel de manège-lessiveuse-sensations-fortes et Lulu réalisé un rêve de presque enfant, en gagnant à la ficelle un grand tigre blanc.

04 avril 2007

Les mots et les gestes

Ils ont une petite trentaine - elle replète, diabétique, enceinte - lui maghrébin au français hésitant, sec et fermé en début d'entretien, sourire lumineux ensuite. Ils sont venus ensemble, parler de violences qui l'ont envoyée quinze jours auparavant à l'hôpital.

Bien sûr, l'acte reste inexcusable - inacceptable - et cela sera dit, au cours de l'entretien - et que si un coup reçu fait mal, le coup porté par quelqu'un que l'on aime fait deux fois mal. Le reste, est l'affaire du médico-judiciaire.

Mais je mesure, ce qu'il a fallu d'amour à ces deux-là pour ne pas aller au bout de leur rage meurtrière de l'autre jour - ne pas se séparer sur-le-champ - venir consulter avec l'envie et l'espoir que cela ne se reproduise pas. Et je mesure ce qu'il lui a fallu à lui de courage pour mettre son orgueil dans sa poche et venir demander de l'aide, affronter le regard d'une étrangère sur des affaires généralement considérées comme absolument privées.

A mettre des mots, sur ce qui s'est joué dans les gestes, nous avons repéré les points de fragilité qui ont déclenché la violence - au-delà de l'anecdotique, une histoire de vêtements à ranger, des enjeux majeurs de confiance, de respect, de sécurité dans ce couple encore fragile - identifié aussi des situations antérieures dans lesquelles ils avaient su trouver les mots - et proposé des pistes pour l'avenir.

Une seule rencontre - ils n'étaient pas demandeurs d'un suivi - pour offrir un espace de non-jugement, d'une parole possible, un lieu où ils savent maintenant pouvoir revenir. Une seule rencontre, ne saurait évidemment suffire... mais donner à penser, réintroduire la parole, - cela vaut. Même une fois.

Laitière

Elsa traite Chamade de vache sous prétexte qu'elle mange systématiquement ses bouquets de pâquerettes. Mais, elle donne pas de lait, objecté-je ? Si, regarde, là y a son p'tit puits, elle donne du lait avec ses gamelles !!!

02 avril 2007

Menues joies

Ecouter avec les enfants les Chansons pour (se réveiller, dire bonjour, avoir un bonbon...) d'Anne Sylvestre.

Prendre un thé à la menthe en terrasse à Ménilmontant - avant quatre heures d'interventions scolaires épuisantes !

Se faire offrir un tiramisu par notre pizzaïolo préféré.

Entendre Elsa m'accueillir en disant, regardez c'est ma maman, ma vraie maman, et puis dire en partant, à tout à l'heures les copines, on est copines pour toute la vie !

Profiter des "Jours Passion" Etam.

Lire le nouveau Elle devant un grand verre de lait et une tranche de brioche avec du Nutella.

01 avril 2007

Nauséeux

Un court extrait d'un entretien entre Sarko et Michel Onfray. La misère, la souffrance sociale, physique et psychique, résultantes d'un déterminisme génétique - "tares" incurables donc, et dont nous pourrions alors de surcroît nous estimer socialement quittes ?

M. O. : Je ne suis pas rousseauiste et ne soutiendrais pas que l'homme est naturellement bon. À mon sens, on ne naît ni bon ni mauvais. On le devient, car ce sont les circonstances qui fabriquent l'homme.

N. S. : Mais que faites-vous de nos choix, de la liberté de chacun ?

M. O. : Je ne leur donnerais pas une importance exagérée. Il y a beaucoup de choses que nous ne choisissons pas. Vous n'avez pas choisi votre sexualité parmi plusieurs formules, par exemple. Un pédophile non plus. Il n'a pas décidé un beau matin, parmi toutes les orientations sexuelles possibles, d'être attiré par les enfants. Pour autant, on ne naît pas homosexuel, ni hétérosexuel, ni pédophile. Je pense que nous sommes façonnés, non pas par nos gènes, mais par notre environnement, par les conditions familiales et socio-historiques dans lesquelles nous évoluons.

N. S. : Je ne suis pas d'accord avec vous. J'inclinerais, pour ma part, à penser qu'on naît pédophile, et c'est d'ailleurs un problème que nous ne sachions soigner cette pathologie. Il y a 1 200 ou 1 300 jeunes qui se suicident en France chaque année, ce n'est pas parce que leurs parents s'en sont mal occupés ! Mais parce que, génétiquement, ils avaient une fragilité, une douleur préalable. Prenez les fumeurs : certains développent un cancer, d'autres non. Les premiers ont une faiblesse physiologique héréditaire. Les circonstances ne font pas tout, la part de l'inné est immense.

Contre-poison

C'est de nos fragilités, que nous tirons nos forces - c'est là qu'est la source de notre vitalité, de notre créativité - le cadeau offert par notre histoire, quelle qu'elle ait été. Copyright : Eric W.

Le temps de vivre

Quatre week-ends d'affilée, sans horaires ni rendez-vous - Bobin écrit quelque part, ne pas céder à l'imaginaire du plein. Des semaines absurdement surchargées, mais - qu'est-ce qu'on fait ce week-end ? Rien...

Manger sans heures, improviser des rencontres non programmées, faire de longues siestes, prendre des bains, fabriquer des éléphants et des avions en papier, jouer à la Wii, laisser chacun vaquer à ses occupations, se trouver à deux, à trois ou tous les quatre, câliner le chat, faire du vélo - ce jour, aller réveiller des souvenirs d'enfance au Jardin des Plantes, observer les orang-outangs, déjeuner d'une crêpe au soleil, et ce soir, pour célébrer les treize ans de notre rencontre, regarder ensemble La Mélodie du Bonheur : Do, le do, il a bon dos, ré, un rayon de soleil, mi, c'est la moitié d'un tout, fa, c'est facile à chanter - sol, la terre où vous marchez, la, l'endroit où vous allez, si, c'est siffler comme un merle - et nous revenons à do !

30 mars 2007

Moineau

Tu grandis vite en ce moment, regarde tes ailes ! Elles poussent tellement vite que bientôt tu vas t'envoler, et je ne te verrai plus !

(Trans)former

Elle a dit, c'est important, trouver de la souplesse, parce que pour être thérapeute il faut pouvoir offrir cette souplesse, cette ouverture... une autorisation à ne pas se faire violence, à respecter son rythme propre. Elle a dit, il n'y a pas quelque chose comme une bonne ou une mauvaise élève... ce n'est pas important, ne pas tout faire.

Elle a dit, vous ne trouverez pas tout, dans le sens de l'exhaustivité - mais vous trouverez à votre arrivée, le tout dans cette continuité, de tout ce qui s'est déposé auparavant. Elle a dit quelquefois un petit bout suffit à comprendre, et à avancer - comme dans le temps d'un entretien il n'y a pas tout, et ce n'est pas grave...

Elle a dit, quelquefois ce n'est pas la raison raisonnable, la raison raisonnante, qui permet de prendre la meilleure décision... il faut examiner tout cela bien sûr. Mais peut-être décider ailleurs. Ne pas cloisonner... mais imaginer comment les différents espaces de votre vie, peuvent se nourrir les uns et les autres...

Accepter le risque - l'incomplétude - l'imprévisible - d'être ce que je suis - là où j'en suis - accepter d'être accueillie comme je suis - là où j'en suis - est-ce que je peux imaginer plus formateur ?

26 mars 2007

Présence

C'est un vieux monsieur, pétillant d'intelligence et de spiritualité, pétri d'humanité - un thérapeute qui n'a plus rien à prouver, mais tout à transmettre. Ce que j'ai retenu de ce qu'il nous a dit - c'est qu'aujourd'hui il ne voit plus de différence entre la rencontre thérapeutique - ici via l'hypnose mais, je pense, toute rencontre authentique - et la méditation - une expérience d'une profonde présence à soi, reliée à la présence d'un autre également présent à lui-même.

Comme j'associais avec le lien mère-enfant, il a acquiescé, et puis ajouté, oui - il n'y a pas de plus beau cadeau que l'on puisse faire à un être - cette présence, et cette disponibilité...

Hook

Hier soir, projection privée à la maison, plateau télé et câlins sur canapé, tous les quatre et le chat. Les enfants ont adoré le méchant Pitaine Crochet et les batailles rangées entre les pirates et les Enfants Perdus, mais voici le message que nous en avons retenu :

- Tu as des enfants qui t'aiment. Ils aimeraient jouer avec toi... Tu crois que ça durera toujours ? Bientôt Jack ne voudra même plus que tu viennes voir ses matchs... Nous avons quelques années privilégiées à passer avec nos enfants tant que ce sont eux qui veulent de notre présence. Ensuite c'est toi qui leur courras après pour un peu d'affection... Ca va si vite Peter... quelques années, et c'est fini. Tu ne fais pas assez attention... et tu passes à côté d'eux.

24 mars 2007

Un pied devant l'autre

Dans ce qui a été parcouru, il n'y a plus à marcher.
Dans ce qu'il reste à parcourir, il n'y a pas encore à marcher.
Sans ce qui a été parcouru et ce qui reste à parcourir,
il n'y a pas de marche possible.

Nagarjuna, 2ème chapitre du Thé

23 mars 2007

Vraie bonne idée

Les ambulanciers ont remarqué que très souvent lors d'accidents de la route, les blessés ont un téléphone portable sur eux. Toutefois, lors des interventions, on ne sait pas qui contacter de ces listes interminables de contacts. Les ambulanciers ont donc lancé l'idée que chacun rentre dans sa liste des contacts, la personne à contacter en cas d'urgence sous le même pseudonyme. Le pseudonyme internationalement connu est ICE (= In Case of Emergency). C'est sous ce nom qu'il faudrait entrer le numéro de la personne à contacter utilisable par les ambulanciers, la police, les pompiers ou les premiers secours. Lorsque plusieurs personnes doivent être contactées, on peut utiliser ICE1, ICE2, ICE3, etc. Facile à faire, ne coûte rien et peut apporter beaucoup.

Deux jours

Un couple, la soixantaine, en crise depuis 20 ans, - des hamsters affolés dans la roue du malentendu perpétuel, je t'appelle ici tu me réponds là, je ne te comprends pas, tu me rejettes, je te fuis, et ainsi de suite.

Un autre couple - garder une grossesse inattendue au risque de faire chavirer la fragile barque familiale - mais franchir l'interdit de l'avortement, dans son corps et dans sa tête, quand on a un toit, quand on s'aime, comment cela irait-il de soi ?

Encore un autre couple, perdu dans la recherche des torts de l'un, des torts de l'autre, un couple sans paroles - sans autre langage que l'attaque ou la fuite. Ils sont venus, pourtant - et revenus...

Une fuite en avant dans les grossesses, un premier deuil périnatal, un second, une fausse-couche, en moins de deux ans, et l'intuition qu'arrêter le cycle des malheurs, ne peut passer que par la recherche d'un sens. L'agir - une nouvelle grossesse déjà en cours, un déménagement - et le recours à la parole, dans le même mouvement.

18 ans, une première IVG sous la contrainte, une nouvelle grossesse dans un contexte qui semble effarant - le futur père est incarcéré et refuse cette paternité, la famille est ravagée par l'alcool, la jeune femme n'a ni qualification ni travail - mais elle dit, j'aime cet homme, mais elle dit, je rêve d'un enfant depuis que je suis toute petite, mais elle dit, une seconde IVG m'est impensable, mais elle dit, entre les lignes - c'est la seule voie de salut que je peux non pas imaginer mais mettre en oeuvre, l'espoir fou que ce que je n'ai pas reçu, je puisse me le donner en le donnant à cet enfant, l'idée que sa naissance me donnera l'énergie que je n'ai pas pour moi seule, celle de quitter ma famille, d'inventer une autre vie.

Une autre jeune femme, à nouveau enceinte mais dont la préoccupation est de faire venir son bébé de sept mois né et resté au Mali, lancée dans les dédales administratifs d'une hasardeuse régularisation d'un enfant qui n'est pas né sur le sol français, quand elle même n'a qu'un titre de séjour provisoire...

Une autre encore, dont l'échographie vient de lui apprendre que l'IVG médicamenteuse n'a pas fonctionné, et qui se trouve aujourd'hui à l'extrême limite du délai légal - et dont la situation vient réveiller d'autres drames passés, incluant une très tardive IVG à l'étranger - une jeune femme prise au piège entre deux terreurs, celle de la répétition d'un acte qui se manifeste par l'angoisse de ne pas se réveiller suite à l'anesthésie, celle de se retouver à nouveau en situation d'assumer seule un enfant, ce qu'elle a déjà vécu, et très mal vécu.

Et quelques autres... deux jours de travail.

18 mars 2007

Messages personnels

Sur la page de garde d'un livre qui m'a été prêté cette semaine, une surprise : "Le 11 mars 2007 : Tu pars en vadrouille, tu quittes mon étagère pour une nouvelle découverte. Tu es en bonne compagnie. Je te partage." Le prêteur m'avait invitée auparavant, à ajouter mes propres notes et réflexions sur les pages... l'idée me plaît. D'un partage.

Et, dans ma boîte mail ce matin : "Bon dimanche - oublie pas de prendre du temps de ne rien faire... ce qui augmente et crée du temps."

Et encore : Des fois ça fait du bien au cerveau, aussi, d'oublier qu'on en a un.

11 mars 2007

Shantaram

Ses mots simples, sans beauté, ont été l'expression la plus claire de ce que tous les prisonniers, et quiconque a vécu assez longtems, connaissent bien : la souffrance tient toujours à ce que nous avons perdu. Lorsque nous sommes encore jeunes, nous pensons que la souffrance, c'est quelque chose qu'on nous a fait. En vieillissant - quand la porte de métal se referme en claquant, d'une façon ou d'une autre -, nous comprenons que la mesure de la véritable souffrance tient à ce qui nous a été enlevé. (...)

Qu'est-ce qui caractérise le mieux l'espèce humaine, m'avait un jour demandé Karla, la cruauté ou la capacité d'en éprouver de la honte ? (...) C'est le pardon, qui fait de nous ce que nous sommes. (...) Sans ce rêve, il n'y aurait pas d'amour, car tout acte d'amour est en partie une promesse de pardon. Nous continuons à vivre parce que nous pouvons aimer, et nous aimons parce que nous pouvons pardonner.(...)

Mais je les aimais encore. Je n'avais pas le choix. On ne peut pas tuer l'amour. On ne peut même pas le tuer avec de la haine. On peut tuer le fait d'être amoureux, ce qui est adorable ou aimable. On peut tuer tout ça et le faire disparaître sous le plomb d'un regret intense, mais on ne peut pas tuer l'amour en soi. L'amour est la recherche passionnée d'une vérité autre que la sienne et, une fois qu'on l'a ressenti honnêtement et complètement, l'amour dure toujours. Chaque acte d'amour, chaque moment où le coeur s'ouvre, est une partie de la bonté universelle : c'est une partie de Dieu ou de ce que nous appelons Dieu, et elle ne peut pas mourir.

Gregory David Roberts, Shantaram

Week-end sans la montre

Du temps pour lire. Pour prendre un bain. Pour être seule. A deux. Avec les enfants. Pour voir Léo faire (enfin) du vélo sans petites roues. Pour jouer avec les perles à repasser. A cache-cache. Pour manger des crêpes au soleil dans le parc de Bercy. Pour jouer avec Elsa et Léo à "Ce soir, c'est vous qui nous couchez !" : pipi, j'ai soif, j'veux mon doudou, nan, pas çui-là, j'ai pas eu de câlin, etc, etc... Pour contempler le désordre environnant, sans s'affoler (encore un chapitre, avec le chat sous la couette, plutôt). Organiser un grand bal des princesses et mettre nos robes roses rien que pour danser sur de la disco tous les quatre au milieu du salon (tête du livreur du Casino quand on lui a ouvert avec nos chaussures de soirée et la musique à fond). Pour prendre un petit déjeuner parfait avec des oranges pressées, des oeufs coque et des croissants frais, en écoutant Thierry Titi Robin, Ces vagues que l'amour soulève - surtout la plage (!) 11, celle avec les cris de mouettes et le violoncelle. Le printemps est (presque) là.

06 mars 2007

Le coeur serré

Elle semble si jeune, sans maquillage, les cheveux clairs bien tirés en une irréprochable queue-de-cheval - une petite fille sage qui s'inquiète d'un retard de règles. Elle parle par monosyllabes, sidérée dès avant l'annonce de la grossesse, incapable d'envisager un quelconque après. Quelques fils se tissent qui ne font pas un lien, ses 20 ans, son arrivée en France l'année passée pour un mariage qu'elle n'a pas choisi, la famille là-bas, indifférente.

Et quand la nouvelle tombe, elle disparaît dans son silence - un petit soldat impassible et désespéré, pris dans une armure que je n'ose pas effleurer de peur de la voir se fracasser - un animal pris au piège, qui verrait se refermer la dernière issue. Je sens que tout ce que nous avons évoqué avant le test - les associations de femmes confrontées au mariage forcé, le minuscule espoir d'un groupe d'insertion auquel elle s'est inscrite, se disloque intérieurement - trouver l'énergie colossale de la rupture, du départ, mais pour quoi, quand on n'a nulle part où aller ?

De tout son corps elle est refus - ni mots, ni regard, ni mouvement - ni larmes... à mes propositions, rester ici, seule ou en ma présence, en silence ou avec des mots, sortir, revenir, aujourd'hui ou quand le temps sera venu pour elle, elle acquiesce à la dernière - quand elle passe devant moi elle murmure, "Plus tard..." et je pose ma main sur son épaule - et je la laisse aller. En priant intérieurement pour qu'elle revienne.

Etrangères

Dans une classe de primo-arrivants, une brésilienne, une marocaine, une sénégalaise, une cambodgienne, une thaïlandaise et quatre chinoises parlent - ou ne parlent pas - avec leurs mots, leurs accents, leurs réticences, leurs résistances, d'amour. De ce que leurs familles ont transmis - ou non. De leurs propres choix, pour aujourd'hui ou pour demain. De leurs contradictions, derrière l'adhésion plus ou moins de surface au discours parental, des réserves d'espièglerie et de curiosité - et si je demande, mais qui a senti déjà le trouble, le coeur qui bat, le souffle court, toutes les mains se lèvent, et si l'une ose une question, sur comment faire comprendre à l'autre qu'il nous plaît, les rires et les idées fusent - culture ou pas, exil ou non, des adolescentes commes toutes les autres.

Enfantillages

... ou comment faire passer les derniers 6 kilomètres, 50 minutes, de la route de retour des vacances :

- Quelle est la fée que les enfants détestent ? (La fée C)
- Quelle est la fée qui a le plus d'enfants ? (La fée Condité)
- Quelle est la fée la plus petite ? (La fée Tus)
- Quelle est la fée la plus folle ? (La fée Lée)
- Quelle est la fée qui porte bonheur ? (La fée'r à cheval)
- Quelles sont les fées les plus courtes ? (Les fées mères)
- Etc, etc... quelqu'un veut jouer ?

03 mars 2007

Iconoclaste :-)

Je me suis intéressé de près à la psychanalyse. Et aux psychanalystes. De très près. Franchement, je n'ai réussi à en guérir aucun. (...) Le problème, c'est qu'on ne soigne jamais la personne qu'il faut. Un jour on se retrouve sur le divan, à cause de personnes qu'on a autour de nous, des gens qu'on devrait soigner. Alors, on se soigne pour se protéger de gens qui ne se soignent pas...

Michel Polnareff, interview Télérama.

L'été en hiver



Si jamais j'avais mon concours territorial... j'me demande si je ne demanderais pas une mutation à Montpellier moi ???

23 février 2007

Histoire d'un amour

Tu n'avais aucune place à toi dans le monde des adultes. Tu étais condamnée à être forte parce que ton univers était précaire. J'ai toujours senti ta force en même temps que ta fragilité sous-jacente. J'aimais ta fragilité surmontée, j'admirais ta force fragile. Nous étions l'un et l'autre des enfants de la précarité et du conflit. Nous étions faits pour nous protéger mutuellement contre l'une et l'autre. Nous avions besoin de créer ensemble, l'un par l'autre, la place dans le monde qui nous a été originellement déniée. Mais, pour cela, il fallait que notre amour soit aussi un pacte pour la vie.

André Gorz, Lettre à D.

22 février 2007

Observations

A transcrire depuis quelques temps les rencontres d'un groupe mère-enfant, me sont venues des interrogations sur ce avec quoi j'observais, ce qui de moi (et invisible pour moi) se sur-imprimait dans l'écrit, dans ce que je restitue comme dans ce que je ne restitue pas - parce que je m'attache à la lettre à ce qui est dit (et pourquoi ?), je sais par exemple que je manque une part du non-verbal...

J'observe avec ce que je suis, avec ce que je sais ou crois savoir, que je ne sais pas toujours savoir - une grille de lecture, peut ouvrir le regard ou encore l'enfermer...

Observatrice vagabonde, je focalise sur telle dyade, reviens dans le groupe, laisse résonner en moi une proposition de la thérapeute, reviens à l'enfant que j'étais, à ceux que j'ai eus, finis de noter une phrase alors qu'une nouvelle interaction est entamée, souris à l'enfant intrigué par mon cahier...

"Dans le séminaire, il apparaît évident dès le début qu'il est difficile "d'observer", c'est-à-dire de recueillir des faits libres de toute interprétation. Dès lors que ces faits sont traduits en mots, nous remarquons que chacun d'entre eux est chargé d'un sens sous-jacent. (...) ... car observation et pensée sont inséparables." Esther Bick

Ce que même "l'objectivité" d'une bande son ou video ne saurait prétendre restituer :

"Ainsi, il ne reste plus qu’une trace de ce réel : la bande-son. Soumise à la qualité technique de la machine ainsi qu’à l’écoute et la compréhension du re-transcripteur. Il s’agit de son : de bruits, de paroles parfois mêlées et de tout ce que la voix humaine peut produire. Et ce qu’on va lire ici est un texte. Ecrit. Le travail du comédien est à l’exact opposé lorsqu’en répétition il cherche à prêter sa voix, son corps à l’incarnation du personnage d’un texte dramatique.

Le passage du son au texte est un travail d’écriture. Méthodique, poétique. J’ai choisi de saisir avec exactitude le discours énoncé espérant par là saisir l’exactitude de la pensée. Pourtant, le texte qui suit est davantage fidèle à l’enregistrement du discours qu’à la pensée qui s’y déploie car elle s’y déploie aussi dans les silences, les ruptures, les hésitations. Le pas dit. Ce qu’en écoutant, j’ai trouvé beau."
Stéphane M.

Intraduisible aussi, la façon dont cette pensée, celle de chacun mais aussi celle du groupe, qui ne se réduit pas à la somme des précédentes, est portée, contenue, nourrie, par cet espace partagé - le fil invisible qui circule, entoure, tisse des chemins imperceptibles.

21 février 2007

Oxygène

Y a Juliette qui chante (voir post précédent), et La Môme aussi, y a les Arts Sauts qui s'envolent (J'ai jamais eu les pieds sur terre... j'aimerais mieux être un oiseau), y a l'ex-RDA qui ressuscite le temps d'un redevenir humain (La Vie des autres), y a une Lulu déconcertée devant les collections du MacVal - un tour pour rien, un deuxième pour essayer de comprendre, un troisième pour laisser affleurer l'émotion, assez pour dire, je reviendrai, mais pour une visite guidée. Y a du plaisir dans tout ça, le sentiment d'être nourrie, d'avoir ouvert des fenêtres, emprunté d'autres regards.

Au MacVal il y a une oeuvre, de grands panneaux carrés de couleur évidés ou translucides qui font du musée un écrin, intérieur et extérieur, du visiteur une part intégrante de l'oeuvre, voir et être vu, voir d'un autre oeil la part de réel (?) que découpe le cadre, en couleur ou non, proposer un point de vue sur le monde.

17 février 2007

Perroquet

- Mais pourquoi tu me fais toujours répéter les mêmes choses ? J'en ai MARRE de devoir TOUJOURS te répéter les mêmes choses, Elsa, dit une Lulu passablement exaspérée.

- J'en ai MARRE que tu me répètes TOUJOURS les mêmes choses, Maman, répond la Zaza, avec strictement la même inflexion de voix et un grand sourire mi-moqueur, mi indulgent.

Un petit poisson, un petit oiseau

80 ans ce mois-ci, Juliette Gréco a toujours la même grâce et toutes les libertés - celle d'interpréter un bouleversant J'arrive ( Brel), un malicieux Déshabillez-moi - "Je sais, que je ne devrais pas chanter celle-ci, minaude-t-elle. Mais, c'est une tellement belle chanson...", et de nous offrir en rappel, Ne me quitte pas, et puis, Le temps des cerises... Juliette, une vieille dame ? Une grande dame plutôt, qui donne à voir encore l'enfant, la femme en elle - intacte, vivante.

15 février 2007

Insight

Quarante-cinq petites minutes, pour passer de, "Toi méchant, moi victime" - à "C'est tellement moins douloureux de te mettre ça sur le dos, que d'accepter la colère et la culpabilité de m'être mise encore une fois en situation d'avoir à choisir d'avorter." Pour passer de, "Sans toi je l'aurais gardé" à "Je ne sais pas, si je souhaite réellement faire une place à cet enfant, et je serais en colère contre toi, que tu me laisses en prendre la responsabilité".

Il y a des jours où j'ai vraiment le sentiment, de ne pas perdre mon temps. Et la décision d'IVG ? Elle est suspendue, le temps de (re) prendre l'indispensable temps de la parole.

12 février 2007

Métissages

Je ne connais pas ce soleil Qui brûle les dunes sans fin Je ne connais pas d’autre terre Que celle qui m’a tendu la main Et si un jour je pars d’ici Que je traverse le désert Pour aller voir d’ou vient ma vie Dans quelle rue jouait mon père Moi qui suis né près de Paris Sous tout ce vent, toute cette pluie Je n'oublierai Jamais mon pays Jamais mon pays...

Faudel

Ca, c'est le tube du moment à la maison - ramené par Léo de la cour de récré, su par coeur par nos deux enfants - qui ne connaissent pas non plus ce soleil, qui brûle les dunes sans fin... mais qui nous ont donné une chouette occasion, de parler des rêves et des difficultés de l'exil, quelles qu'en soient les raisons.

11 février 2007

Après-coup

Quand les murailles que nous avions édifiées pour nous défendre, deviennent elles-mêmes cause de souffrance... (identifier les strates ?).

... il suffit d'être là... d'écouter, parce que souvent l'autre n'est pas en capacité de s'écouter lui-même, ou s'écoute dans un ressassement stérile. Donner à l'autre la conviction, qu'il a enfin été entendu, lui permet de passer à autre chose.

...c'est qui moi ? Ce qui me fait unique, bien que tissé de la confrontation avec l'autre, tendresse ou conflit ? C'est qui moi - le coeur de ce qui me fait être ? C'est qui moi, ce qui me fait sentir "en coïncidence avec moi" - et qui ne peut être nulle part ailleurs que dans l'ici et maintenant ? C'est qui moi, définitivement inachevé ? C'est qui moi, habité(e) de cette part inconsciente, inconnue, excitante aussi ?

Où le soin rejoint la spiritualité, parce qu'on ne peut être ouvert à cet inconnu de l'autre, que si l'on a rencontré un peu l'inconnu de soi, et aussi, que l'on a trouvé une posture juste (entre discipline et liberté) qui permet cette ouverture - la sagesse commence et finit avec le confort, dit-il.

Ce n'est pas de faire beaucoup... c'est de faire bien : prendre le temps de fermer (ne pas laisser inachevé) ET d'ouvrir, de ré-ouvrir, vers la vie. Dont acte.

10 février 2007

Nativités

Elle vit à l’hôtel social, vient de retrouver un emploi précaire, pour lequel elle est encore en période d’essai. Il est en prison juqu’en 2008, mais sortira peut-être – peut-être, en juin prochain. Une grossesse s’annonce, inattendue mais qui les touche l’un et l’autre, profondément – que faire ? Le pari de la vie, de la réhabilitation, de lendemains meilleurs ? C’est peut-être, parce qu’ils prennent tellement au sérieux ce devenir parents, qu’ils choisiront de différer ce moment qu’ils attendent néanmoins. C’est peut-être, parce qu’elle peut être une formidable source d’énergie, qu’ils choisiront de garder cette grossesse. Quelque choix qu’ils fassent, dans sa parole à elle ils sont, seront, déjà trois. C’est si rare, cette place faite à l’autre, à cette grossesse quoi qu’elle advienne, à la parole de cet homme – c’est si rare, autant d’amour ici.

Elle a 39 ans, elle sort d’une histoire passionnée, passionnelle, douloureuse, conflictuelle - dangereuse. Et de cet homme qu’elle aime encore, bien qu’elle aie pris la décision de le quitter, et que sa dangerosité la contraigne aujourd’hui à s’en protéger, elle est enceinte. Et cet enfant qu’elle décrit comme l’enfant de l’amour, et comme l’enfant de la dernière chance, elle souhaite le garder. A ce chaos en marche, elle demande aujourd’hui, à donner sens.

04 février 2007

Chat Chou

Les (rares) jours où je ne suis pas levée la première, j'entends des petites pattes sur la moquette dès la porte du couloir ouverte. Trois bonds rapides et gracieux, Chamade vient me chatouiller de ses moustaches, ronronner dans mon cou. Et si je ne me lève pas tout de suite, je me fais admonester en chat-langue - elle ne ronronne ni ne miaule, mais roucoule, un chat qui fait un bruit d'oiseau.

Désordre et mouvement

Trois heures du matin, dans ma tête plus de questions que de réponses, de choix à risquer que de chemins balisés. En écho au post précédent, renoncer sans violence à quelques privilèges de l'enfance, à quelques illusions, pour gagner en responsabilité, et en sérénité. Mais, souffle la voix des petites heures du matin, sans renoncer à la joie, à la légereté possible, au droit d'être aussi imparfaite, tâtonnante, humaine ? A ma gauche, le petit démon des sans foi ni loi, à ma droite celui de l'exigence démesurée, au milieu un chemin à tracer, celui d'une justesse intérieure, aussi respectueuse de moi-même et de l'autre que possible, à ce jour.

A un homme qui disait son besoin de tout contrôler, et les paradoxes qui s'en suivent, aussi dans des choses très quotidiennes "Quand tout est propre et rangé, je me sens bien dans l'endroit où je vis - mais ensuite il faudrait ne plus bouger ???" - j'ai entendu récemment répondre - "Eh oui, dès que je vis un peu, ça fait désordre...".

Dans un croquis illustrant le mouvement décomposé des films d'animation, une personne proche a vu cette semaine une représentation de ce qu'il est convenu d'appeler le travail psychique - pas après pas, un mouvement presque imperceptible, une variation infime à chaque image.

03 février 2007

Démasquée

Jardin du Luxembourg, aire de jeux : et moi, j'ai pas droit au petit tampon poussin (violet, ce jour) sur la main, si je veux revenir dans la journée, je demande au monsieur de l'entrée ? Il sourit : vous avez votre ticket d'entrée, c'est suffisant, mais je crois que ça vous fait plaisir, non ? Oui. Pas de Luxembourg sans poussin, de foire du Trône sans pêche aux canards et sans barbapapa, pas de pochette sans surprise. C'est comme ça !

02 février 2007

Travail social

Je ne vous permets plus de me traiter comme vous le faites. Maintenant quand je rentrerai dans cette pièce je veux autant de considération que n'importe qui d'autre. Je suis comme vous. Je suis une personne et une mère. Sauf qu'on n'est pas du même côté du bureau. Et ça change tout n'est-ce pas ? Si je le retournais ce bureau, de quel côté vous vous retrouveriez ?

Restez assise j'ai dit ! Ma gamine elle a pas seulement besoin de vitamines et de calcium, elle a aussi besoin de vivre le plus beau jour de sa vie. Je ne suis pas venue réclamer. Je suis venue en tant que mère pour que nos gosses gardent un peu d'espoir.

Dominique Bourgon, Un sens à la vie

Inch'Allah

Un petit groupe de jeunes entre 17 et 20 ans, une majorité de filles, quelques-unes déjà mariées dont une de force, une ou deux déjà mères - je présente le centre et ses missions, je prends le temps de re-situer ces combats invraisemblables pour elles, à la fois parce qu'elles sont nées avec ces droits acquis et parce que leur culture leur interdit de les penser, l'accès à la contraception, le droit à l'avortement, ce qu'ils ont changé dans notre société.

Et quand j'ajoute que malgré toutes nos avancées scientifiques, une part des mystères de la fécondité nous échappe et nous échappera toujours, l'une d'elles me dit avec le sourire de l'évidence : bien sûr, ça, c'est la part de Dieu.

31 janvier 2007

Inconditionnel

Parce que nous n’aimons jamais nos enfants, nos conjoints, nos familles d’un amour si inconditionnel, ni si totalement désintéressé, m’est venue l’idée que le seul amour inconditionnel peut-être, est celui que nous accordons, ou tendons à accorder, à nos patients, celui que nous recevons de nos thérapeutes. A ébaucher quelques lignes autour de cette idée – la place du thérapeute, et ce qui m’anime, je retombe sur ceci (2004) :

Ce serait si beau si pour chaque être, il existait quelque part un autre être pour veiller sur lui de loin, une présence constante mais invisible, un souffle d'air, une veilleuse allumée. Un être à qui il ne serait rien qu'on ne puisse dire, vers qui aller quand nous serions ou perdus ou blessés, quelqu'un dont nous puissions dire, il ou elle ne me fera jamais de mal.

Quelqu'un auprès de qui trouver ce que jamais nous n'aurions trouvé ailleurs, quelqu'un auprès de qui reprendre des forces avant de repartir vers la vie, plus légers et plus forts. Quelqu'un pour accueillir nos timides tentatives d'être et de dire, nos retours en arrière et nos avancées maladroites.

Quelqu'un à qui confier le plus fragile et le plus vulnérable en nous, dans une absolue confiance. Quelqu'un auprès de qui abaisser nos armes, déposer nos armures. Quelqu'un auprès de qui trouver, retrouver, la paix profonde d'après les sanglots, le sentiment d'être enfin arrivés - mais pour mieux repartir.

Quelqu'un qui serait porteur d'un respect et d'une tendresse infinie, bien au-delà des liens de l'amitié, de l'amour ou du sang. Quelqu'un vis-à-vis duquel être dans une absolue liberté réciproque. Quelqu'un qui nous prenne par la main et nous ouvre les yeux, qui berce nos chagrins et nous pousse vers la vie.

27 janvier 2007

Avis d'absence

Ai suivi, en direct, les cérémonies pour l'Abbé Pierre ; les compagnons d'Emmaüs, édentés, échevelés, mal fringués, au 1er rang à Notre-Dame, devant les Grands ( petits? ) de ce monde ; beaucoup d'émotion. Sur sa tombe : "j'ai essayé d'aimer" ...le voilà, en "grandes vacances", selon son expression. Copyright : Mum.

Chasseur d'instants


Ce qu'il y a de bien avec Doisneau, c'est la tendresse dans son regard, qui transfigure ceux qu'il photographie - enfants, commerçants, prostituées, simples passants... Ce qu'il y a de bien avec Doisneau, c'est que ses photos évoquent toujours un peu nos albums de famille. Au hasard de l'exposition de l'hôtel de ville, ce sont des mots que j'aurais voulu retenir, des extraits d'interviews radio, perles sonores sur le sens de ce travail, retenir l'éphémère - et aussi, "j'ai photographié la vie telle que j'aurais voulu qu'elle soit, une vie où la tendresse dont j'ai besoin serait présente" (je cite de mémoire !) - et encore, son humilité "J'ai fait peut-être, 300 bonnes photos ? Au 100ème de seconde, ça fait 3 secondes volées à l'éternité - pas de quoi pavoiser...".

23 janvier 2007

N'importe quoi :

Expression d’angoisse professionnelle chez les psychothérapeutes relationnels et psychanalystes, désignant la sortie inopinée de cadre. Cette expression pointe le souci constant de disposer au cours du processus de suffisamment de repères, même en période de confusion et de chamboulement, de stabilité ontologique et de sécurité de base, pour pouvoir poursuivre le travail. Une bonne supervision peut aider à se retrouver quand la situation tend à devenir erratique. L’alliance d’audace et de maintien en conformité avec un modèle de référence est toujours limite, la progression clinique requérant une inventivité constante et une insécurité sûre parfaitement paradoxale.

Invitation à la méditation, sur le Glossaire du Cifp

20 janvier 2007

Formation : miscelléanées

"L'important n'est pas que vous les compreniez (de l'art de renoncer au désir de savoir), mais qu'ils se comprennent..." et puis, sur le ré-examen des supposées "évidences", voir Eliacheff : "C'est quand je comprends que je pose des questions !"

"Le sujet n'a pas d'âge."

Autour de l'IVG - une sage-femme confrontée à ces questions du point de vue du soignant explique qu'elle s'aide de l'idée que l'embryon fait partie intégrante du corps de la mère, qu'il ne survivrait pas sans elle - la formatrice précise, qu'à la différence de la vie animale, la vie humaine ne se soutient que du désir de l'autre... et aussi, cette expression attrapée au vol : la grossesse non désirée, "un désir indésirable".

A une interpellation sur l'ennui au cours de la session, une multitude de pistes proposées, toutes ramenant à l'enfance : désir d'être sollicité, sentiment de n'être pas assez investi, souhait de présence, incapacité à jouer seul, ennui qui viendrait en lieu et place de la colère, temps constructif de la rêverie et du fantasme ou espace mortifère et dévitalisé...

"La tolérance est TOUJOURS secondaire". Apprendre à faire la place de l'autre, ne va pas de soi... la différence heurte, toujours.

Et où je retrouve Prévert - "Soyez heureux, ne serait-ce que pour donner l'exemple" - mais dans une lecture inédite, celle de la place possible des parents, dans leur rôle d'adultes vivants et désirants.

19 janvier 2007

Gare ta g... à la récré

Elsa raconte, ils ont mangé une galette des rois à l'école maternelle cet après-midi. C'est Alicia qui a eu la fève. Ah bon, et qui a-t-elle choisi comme roi ? Elle a choisi Camille, répond Elsa. Et, sur un ton subitement combatif : Moi ze vais lui casser la binette elle a pas le droit parce que Camille c'est MON amoureux et que moi je vais me marier avec lui parce que c'est le plus beau !!!

Et ajoute-t-elle un peu plus tard, je veux me marier avec mon copain Camille parce qu'il est pas de notre famille ! (de l'interdit de l'inceste bien compris...)

... et boule de gomme

Une intervention scolaire ordinaire, un adolescent de 4ème se lance dans un schéma anatomique représentant le sexe féminin. Il nomme les grandes et les petites lèvres, le clitoris, l'urètre... arrivé à l'ouverture du vagin, il inscrit la légende suivante : Mystère.

La phrase du jour

"On ne peut pas être toujours déraisonnable."

18 janvier 2007

Donne-moi ta main

Quand nous partons à l'école, le plus souvent Léo marche devant, genre je les connais pas la dame et la naine derrière. Mais ce matin, moitié nostalgique, moitié taquine, je le prends par la main, et quand il se dégage, je lui fais une scène tragi-comique sur le mode, mais mon bébé chéri, tu n'as que 7 ans, tu es trop petit pour lâcher la main de ta môman, etc, etc... Et là, le Léo hilare me répond d'un ton sans appel : "Maman, tu as trente-quatre ans maintenant !" - i.e t'es quand même ASSEZ grande pour me lâcher la main (et arrêter tes clowneries, je pense).

16 janvier 2007

Free hugs

C'est la tendance qui court tout autour de la planète et se propage à l'aide de vidéos diffusées sur internet. Tout a commencé par un gros coup de blues : il y a deux ans, un jeune Australien, de retour chez lui après un long séjour à Londres, se rend compte qu'il n'y connaît plus personne. En quête d'affection, il lui vient l'idée de se balader dans la rue avec une pancarte où il a écrit en grosses lettres Free Hugs. Au bout de quinze minutes, une dame inconnue vient l'embrasser. La première campagne d'accolades spontanées est née, qui sera suivie de beaucoup d'autres.
(Edito du ELLE de cette semaine.)

Je ne résiste pas au plaisir d'y ajouter la citation du mois sur le site, qui par ailleurs vaut le détour (how to hug, hugstories, and so on).

"Twenty years from now, you will be more disappointed by the things you did not do than by the things you did do. So, throw off the bowlines. Sail away from the safe harbor. Catch the trade winds in your sails. Explore. Dream. Discover."- Mark Twain

Nickname

J'ai appris avec un certain amusement que les jeunes du quartier avaient donné un délicieux petit nom à mon scooter, doté d'une alarme particulièrement sensible : Maggie. Et pourquoi Maggie ? "Parce qu'elle couine dès qu'on la touche." No comment.

11 janvier 2007

La lune et le miroir

Un proverbe local dit : ce n'est pas être patient que de ne pas s'énerver quand vous appelez quelqu'un trois fois et qu'il ne répond pas. Etre vraiment patient c'est quand on vous appelle trois fois et que vous ne répondez pas. Laissons le temps à l'oreille de se tendre. Laissons le temps de mûrir aux mots. (...)

J'avais fait ma devise d'une pensée notée dans mes carnets : "je choisis tout" sans trop insister sur le fait qu'elle était de sainte Thérèse de Lisieux... Parce que choisir bien évidemment c'est renoncer. (...) Je ne savais pas dire non parce que je ne savais pas dire oui. (...) Ma seule excuse est que la première victime de cette façon de fuir la vie en lui courant après était moi-même.

Jean-François Deniau, La lune et le miroir

Confiance

17 ans, à l'extrême limite du délai légal pour l'IVG - et quasi-muette. J'explore piste après piste, tirant parti des moindres indications - mais quelque chose fait barrage - peut-être sa propre impossibilité à penser une situation qui la dépasse. Elle n'est pas hostile, mais dans un repli majeur - jusqu'au moment où elle peut verbaliser ceci - puisque elle a été déçue au-delà de l'imaginable par ses propres parents (placement en foyer, parents déchus de leur autorité parentale), au nom de quoi ferait-elle confiance à quelque travailleur social que ce soit ? Et au-delà je devine - comment accorderais-je à des étrangers la confiance que j'aurais tant aimé donner à ceux qui auraient dû en être les dépositaires ? Comme si demeurait une forme de loyauté, puisque ceux-ci n'ont pas pu m'aider, alors je n'accepterai l'aide de personne - aussi, de peur d'une intolérable nouvelle déception.

10 janvier 2007

Quand la littérature rejoint la clinique

- Mais c'est possible ? demanda Adénar. Il est possible de vivre sans âme ?
- Oui, bien sûr que c'est possible, dit le mage. C'est possible. Mais quand on n'a pas d'âme, la vie se réduit de moitié, les choses perdent de la couleur, l'espérance et l'amour sont substitués par l'ennui et la rancoeur... Quand on vit sans âme, on a l'impression que les choses n'ont pas de sens, et que tout est régi par le hasard. Quand on vit sans âme, on pense que la vie est laborieuse et fatigante, et on attend sans arrêt, on attend que quelque chose de bon arrive, on attend que quelque chose arrive, quoi que ce soit...! Oui, prince aimé, il est possible de vivre sans âme, mais ce n'est vraiment pas un état à souhaiter.

(...) Il y a deux façons de vivre : terrorisé et soumis aux caprices du destin, ou bien en cherchant et en tentant l'impossible. La première vie ne vaut pas la peine d'être vécue, mais la seconde est magnifique.

L'ombre de l'oiseau-lyre, Andrés Ibànes

05 janvier 2007

Mots doux

* Elsa grimpe sur mes genoux : Maman, tu me fais un câlinfourchon ?

* Léo a 7 ans, Mamie 70 ans. Léo, conciliant : - Mais c'est pas grave Mamie, les zéros ça compte pas vraiment...

De fil en aiguille

Il était une fois, une jeune femme venue pour un retard de règles, une inquiétude par rapport à une grossesse pourtant bien hypothétique. Inquiétude qui cachait mal le souhait finalement relativement conscient d’un éventuel bébé, derrière une demande rationnelle autant que raisonnable concernant une possible prescription de contraceptifs.

Une demande elle-même conditionnée par un climat familial conflictuel - prendre le « risque », avec l’ambivalence que l’on a vue, d’être enceinte, ou prendre le risque d’aggraver les tensions si jamais la plaquette de pilules n’échappait pas à la vigilance maternelle ? (D’expérience, les jeunes filles qui VEULENT que leur contraception reste un secret y arrivent parfaitement. Celles qui se font surprendre, ne le sont jamais au hasard…)

Sur le pas de la porte, arrive la demande d’une rencontre aussi avec le compagnon, resté dans la salle d’attente, je propose de le recevoir avec ou sans la jeune femme, mais il apparaît que celui-ci préférerait s’adresser à un médecin homme. Je lui demande alors si elle-même aurait d’autres questions… et nous refermons la porte, pour évoquer l’absence de plaisir pendant les rapports. Et son interrogation concernant une éventuelle excision (elle est d’origine malienne).

Le terrain ainsi libéré, je lui propose de ré-inviter son compagnon à se joindre à nous s’il le souhaite, ce qu’il accepte. Et nous avons alors un premier entretien sur les différentes pistes possibles qui pourraient éclairer ces questions – un entretien relativement bref car je sens combien il est déjà courageux pour ces deux jeunes africains d’évoquer des choses aussi intimes devant une étrangère, dans tous les sens du terme – une personne inconnue, étrangère à leur couple comme à leur culture…

Ils sont étonnamment matures, délicats l’un envers l’autre, attentifs à ne pas être involontairement blessants, et dans une volonté d’avancer ensemble que pourraient leur envier bien des adultes – vraiment émouvants. Je leur ouvre la possibilité d’une nouvelle rencontre, après celle avec la gynécologue, sans imposer de date.

Et je souris intérieurement : dans la recherche de la réponse à la question, « Mais que vient-elle, que vient-il réellement demander ? », il y a toujours quelque chose du jeu de piste, de la chasse au trésor – et quand celle-ci aboutit, ce qui est loin d’être toujours le cas, le trésor est toujours multiple, complexe, et de l’ordre de, plus d’humanité, plus de vérité.

31 décembre 2006

Tout est bien qui finit bien

Un Noël au coin du feu, 70 bougies soufflées dans une atmosphère familiale paisible. Des enfants couverts de cadeaux (Et toi Elsa, c'est quoi ton cadeau préféré ? Celui que le Père Noël a laissé tomber de son traîneau et qu'on a retrouvé dehors...), et des adultes aux attentions délicates.

Trois jours de vie de château, à naviguer entre la piscine intérieure, le jacuzzi et le hammam, les grands crus et les repas raffinés, et le réveillon trio de cordes, cantatrice ET improbables cotillons. Le 1er janvier 2007 après minuit, où étiez-vous ? Dans une piscine couverte, à regarder à travers la verrière les convives s'agiter sur la piste de danse, sans autre son que celui de l'eau.

24 décembre 2006

Oedipe joyeux

David se lève, Léo saute dans notre lit : - J’te remplace Papa !
David, en descendant l’escalier : - Va te faire foutre Œdipe !
Léo : - Toi aussi !
(plus bas, à sa mère et avec un grand sourire :
- Je sais que je ne devrais pas dire ça…)

Juliette des esprits

"Nous sommes deux... au minimum ! D'un côté, il y a Gréco, la statue, et de l'autre, moi, Juliette, toute petite. J'ai quelque chose d'intact à l'intérieur de moi : l'enfance."
"Je suis profondément femme, avec tout ce que cela comporte de jeu."
"Je ne sais pas ce que veut dire nostalgie. Je n'ai jamais su et je ne pense pas que je vais apprendre. J'espère ne pas en avoir le temps."

Juliette Gréco, qui à presque 80 ans vient de sortir un album de reprises sensuelles et malicieuses, une leçon de féminité et d'intelligence intactes.

23 décembre 2006

Un pas après l'autre

"Mes premières chaussures de tango achetées... la semaine dernière. Enfant, je rêvais beaucoup et j'avais peur de rien. Ado, j'ai découvert que ça allait être beaucoup plus court et beaucoup plus dur que prévu et j'ai lâché beaucoup de rêves. Et puis un jour, adulte (ah ah ah ah... enfin bref) j'ai regardé derrière moi et j'ai vu ces choses si précieuses si loin. J'ai vu comme il était facile de passer à côté de soi-même. Je suis en train de réapprendre à marcher, c'est si bon !!!"

20 décembre 2006

Rats de bibliothèque

Ce matin, nous lisons l'histoire de Ferdinand l'attrapeur d'histoires - dans ce pays, on lit des histoires pour se réveiller, des histoires pour s'endormir, Léo dit, "C'est comme chez nous !". Dans la même fournée de livres de la bibliothèque, l'excellent Château d'Anne Hiversère, et le plaisir de constater que les enfants connaissent une large majorité des personnages de la littérature enfantine représentés dans l'hilarante page des invités.

18 décembre 2006

Petites phrases

"- Maman toi t'es pas vraiment une adulte !
- ???
- Parce que, tu as des parents."
Elsa, psychanalyste en herbe

"- Nous sommes issus de la haute bourgeoisie. Nous excellons dans l'art d'ignorer l'éléphant qui se trouve dans la pièce."
Bree van der Kamp, philosophe du XXIème siècle

16 décembre 2006

Juste une illusion

La nuit, Greenson retrouva un souvenir mêlé d'angoisse. C'était il y a longtemps. Un soir qu'il avait réuni quelques disciples, le maître avait abordé la question de la fin du transfert. Il employait un mot étrange : dissolution et expliquait qu'on ne se détache d'un patient, comme dans la vie on ne se détache d'une personne, qu'en s'attachant ailleurs, à un autre être ou à une partie du même être. "Aussi longtemps qu'on vit et qu'on désire, disait Freud, on ne fait que troquer une prise contre l'autre, changer d'emprise." Et il avait ajouté, pour ôter aux disciples recueillis leurs dernières illusions : "Se dire qu'il s'agit de méprises ne sert qu'à en commettre de nouvelles."
Michel Schneider, Marilyn dernières séances

15 décembre 2006

Variation

Nougaro sauce Elsa : "Ah tu verras tu verras tout recommencera tu verras tu verras La vie c'est fait pour TOI tu verras tu verras..."
Et voilà - c'est tout elle.

13 décembre 2006

Durs et tendres

Ils ont entre 16 et 18 ans, élèves de lycée professionnel - déjà hors des rails scolaires officiels. Ils ont une tête ou deux de plus que moi, et possiblement plus d'expérience - en tous cas un vécu qui m'est étranger. Mais - à la différence des petits garçons ricaneurs des beaux collèges parisiens, ils abandonnent très vite les provocations d'usage dans ces interventions sur la sexualité pour aborder des questions de fond : moi, ce que je voudrais savoir, c'est comment on peut être vraiment sûr qu'on aime quelqu'un... (Ben mon p'tit gars, si t'as la réponse un jour, fais-moi signe...)

Est-ce que ça nous fait pareil si c'est une fille qu'on n'aime pas ou un garçon qui nous dit je t'aime ? (Il est rare que le débat sur l'homosexualité soit lancé avec autant de douceur.) Est-ce que (quand je baratine une fille pour coucher avec elle) ma parole m'engage vraiment, et jusqu'où ? Mais de toute façon, on ne sait jamais, jusqu'à quand on va aimer quelqu'un ? Est-ce que c'est grave de sortir avec plein de filles sans jamais tomber amoureux (un beau gosse hâbleur mais sincèrement inquiet) ?

Un autre confie, la blessure laissée par la réflexion désobligeante d'une demoiselle sur son anatomie (il en faut, de la confiance dans le groupe, pour oser aborder cela). Un troisième nous fait éclater de rire avec son couplet bien senti sur le porno : d'abord les hommes c'est pas des hommes, c'est du bétail à concours, les acteurs, c'est pas des humains, c'est des Playmobils - et on dit toujours que le porno, ça rabaisse les femmes, mais c'est aussi humiliant pour les hommes, en fait. Eh bien !

Et dans un groupe comme dans l'autre tout le le temps d'aborder de vraies questions autour du plaisir donné, reçu dans ses composantes physiques ET relationnelles - les deux aspects étant amenés par le groupe, ce qui a donné lieu à des discussions riches et souvent émouvantes...

Alors... alors le couplet prévention classique a été peu abordé, hormis la page non pas sur le préservatif, mais sur les freins réels à son usage. Mais j'ai rarement eu autant l'impression d'être au coeur de ma mission : "N'essayons pas de convaincre, contentons-nous de faire réfléchir" (Georges Braque)

11 décembre 2006

Voix off

Quel jour on est c’est quoi aujourd’hui ah oui préparer les babous lait signer le carnet de correspondance faire le chèque de la cantine débarbouiller les frimousses racheter du dentifrice penser à faire le plein du scooter tout à l’heure y plus rien dans l’frigo emmener le sac de docs pour les interventions en lycée quelqu’un a donné à manger au chat ? finir le compte-rendu de séance et tous ces livres inachevés appeler ma grand-mère qu’est-ce qu’on fait pour Noël j’voudrais aller chez le coiffeur attention la route est glissante j’ai froid fais-moi un thé s'il te plaît accueillir cette femme qui porte un enfant ce couple qui ne sait plus cette adolescente qui ne sait pas encore rédiger le rapport de stage une lettre de motivation un billet pour la Care Box vérifier où sont mes priorités qu’est-ce qu’on fait pour les vacances repartir vers l’hôpital le collège l’association du jour accueillir sans déborder l’individu l’équipe la classe c'est à quelle heure qu'on peut rêver ? travailler sur le divan en groupe en supervision ce n’est pas toujours reposant répondre à un mail caler des agendas organiser un dîner se dire ça fait longtemps que je ne l’ai pas vu(e) s’appeler se promettre bientôt ne pas tenir est-ce que c'est bien cette vie-là que je voulais ? chercher un moment pour soi un moment pour l’autre un temps à deux un autre pour les enfants as-tu fait tes devoirs si on faisait un memory un coloriage un collier de perles je n’ai pas le temps viens prendre ton bain pas maintenant finis ton assiette non j’avais dit une histoire pas deux maintenant c’est le temps des adultes lire quelques pages tomber de sommeil sans le trouver – quel jour on est demain ?

Bande originale

Après Marie Cherrier et Claire Diterzi, dans la famille grandes filles impertinentes, je demande, Adrienne Pauly - pas seulement pour le réjouissant et médiatique J'veux un mec, mais aussi pour le grinçant Méchant cafard, le nostalgique L'herbe tendre. Et puis le toujours lyrique, poétique, magnifique, Higelin d'Amor doloroso, avec mention spéciale à J't'aime tel et Se revoir et s'émouvoir, encore que le choix soit difficile aussi entre Prise de Bec, Queue de paon et Crocodaïl - bon, tout l'album en fait, aussi réjouissant et voyageur que Tombé du ciel ou Illicite.

05 décembre 2006

Jardinage

"Si on veut avoir de jolies roses, il faut tailler le rosier ; sélectionner les meilleures branches, se séparer des autres. Faire un choix, exercer sa liberté ... Renoncer c'est grandir. S'il n'y a pas la liberté, on ne renonce pas, on arrache. C'est différent et très douloureux.

Le travail sur la liberté prend du temps. Mais après tout, est-ce très important ? Je crois qu'un bon renoncement est un renoncement qui, finalement, ne coûte rien. C'est pour ça qu'il faut attendre qu'il sonne juste. On le sait, on le sent. On accepte de laisser mourir quelque chose pour laisser grandir autre chose. Et de choisir, librement, d'aller vers un mieux."
Gonzague Masquelier

04 décembre 2006

Portrait craché

18h, je cherche du regard mon Elsa dans la cour de récréation. Un mouflet à lunettes rigolard que je connais pas s'approche : Elle est là ! Ben, comment tu sais que c'est cette petite fille-là que je cherche ? Bah c'est facile rétorque-t-il, elle a presque la même tête que toi !

Aller à l'essentiel

"J'ai découvert que quatre données sont particulièrement pertinentes en matière de psychothérapie : l'aspect inéluctable de la mort, pour chacun de nous et ceux que nous aimons ; la liberté de diriger notre vie comme nous l'entendons ; notre solitude fondamentale ; et enfin, l'absence d'une signification ou d'un sens évident de l'existence. Pour oppressantes que soient ces données, elles contiennent les germes de la sagesse et de la rédemption. (...)
Nous ne pouvons leur dire : il s'agit de vous et de vos problèmes. Nous devons au contraire parler de nous et de nos problèmes, car notre vie, notre existence, sera toujours rivée à la mort, l'amour à la perte, la liberté à la peur, et la maturité à la séparation. Nous sommes tous engagés dans la même épreuve."

Irvin D. Yalom, Le bourreau de l'amour, histoires de psychothérapies

30 novembre 2006

Trop polie

- C'est quoi un gros mot Elsa ?
- Un gros mot c'est quelque chose qu'on dit pas !

L'oeuvre de l'un, la part de l'autre

Convergence - une journée de psychodrame, une semaine de formation autour de l'entretien de couple, et des interrogations personnelles en avalanche sur la place de l'un, la place de l'autre, la place professionnelle, la place dans le couple - une vraie semaine de chaises musicales : un petit air et hop, changer de chaise, encore et encore, tous ces jours.
Des notes au vol - psychodrame, formation, échanges de groupe.
Dans ce que j'adresse à l'autre, en particulier à l'autre amoureux, le risque toujours d'une demande de ce que je ne peux trouver qu'en moi - une demande qui peut être si avide qu'elle pousserait l'autre au désespoir de ne pas pouvoir y répondre, ne laisserait pas la place à l'avènement d'une relation.
"Ce n'est pas un choix, c'est une liberté illusoire. C'est la réponse à une question trop ancienne, la trace lumineuse d'une étoile qui n'est plus, ne sera plus. Des blessures gigognes, dont la guérison ne peut être qu'intérieure..."
"Ils repartent avec ça" - mais ils sont venus avec, aussi... relativiser !
Ce que nous pensons, jugeons inacceptable, l'autre sera empêché de le formuler. Et l'inacceptable, ne se confond pas avec l'inhumain - peut-être avec, le trop humain - celui que nous ne saurions, reconnaître en nous..
"L'authenticité" serait-elle parfois prétexte à faire à l'autre ce que nous aurions aimé - ou non... - qu'on nous fasse - sans nécessairement nous être souciés de son désir à lui ?
Une question intérieure toujours - à qui est-ce que je m'identifie ? A l'un, à l'autre, à l'absent(e) - suis-je encore avec celui, celle, que j'accueille ?
"Quand on me dit - j'y arriverai pas - je demande toujours : où ça ?"

25 novembre 2006

24 novembre 2006

Demandez l'programme

Les 10 commandements du Clown

I. Tout va bien.
II. Pour trouver la liberté, tu chercheras la contrainte.
III. Tu seras toujours dans le présent et tu arriveras toujours à l'heure.
IV. Tu ne seras sûr de rien, mais tu ne douteras jamais.
V. Tu diras toujours oui, même quand tu diras non.
VI. Tu vivras sans protections, avec tes résistances.
VII. Tu seras toujours détendu, vif et élégant.
VIII. Tu chercheras le petit pour trouver le grand.
IX. Tu iras toujours jusqu'au bout.
X. Tu jubileras de tout.

Célébration

Avant - pour la première année, pas l'énergie d'organiser quoi sur ce soit - un temps de novembre un peu, pas forcément gris mais une humeur plutôt à se tapir au chaud sous la couette...

Le jour J, une longue tablée inattendue et chaleureuse, avec les rencontres improbables et les retrouvailles qui font partie de l'indéniable charme de ces moments, des cadeaux à vivre qui allument des petites étoiles dans les yeux, avant d'aller les contempler sur la mer ou... sur la piste... ;-)

Aujourd'hui, malgré la fatigue, une énergie radieuse, un deuxième temps cadeau, celui de savourer - la tendresse reçue, les petites attentions sur mesure, et la joie de me sentir en lien - en liens. Aujourd'hui il y a de la lumière douce, Marilyn qui fredonne, le chat en rond sur mes genoux tandis que j'écris - et une réserve de bonheur dans laquelle puiser.

18 novembre 2006

Permanence de l'objet

Zaza dit, "C'est pas grave que je m'en vais parce que tu sais que je suis là." Si seulement on m'avait dit ça avant, j'aurais peut-être gagné quelques années de divan ?!? :-))))

13 novembre 2006

Copyright

Elle dit Samia, une rencontre, une vraie rencontre, c’est celle qui ne se laisse pas définir, arrêter dans une case, mais celle dont nous pourrons dire un jour, qu’elle nous a redéfinis.

Elle dit Samia, un miracle, c’est être là où nous n’avions jamais été capables d’être – faire ce que nous ne nous imaginions pas capables de faire.

Elle dit Samia, un miracle, c’est cesser d’anticiper pour laisser advenir, se laisser surprendre – cesser d’aller là où nous sommes censés nous trouver, dans les émotions que nous sommes censés éprouver, là où l’on s’attend soi-même et se précède sans cesse. Peut-être les occasions de miracles sont-elles bien plus nombreuses que nous le croyons, mais que nous n’en finissons pas de passer à côté.

Elle a dit d'autres choses encore, toujours dans cette parole aimante, inspirée qui la caractérise - et moi je me réjouis, de cette rencontre - un fil qui s'étire et puis rassemble, un lien qui ne se perd pas.

12 novembre 2006

Poésie pure

10 novembre 2006

A suivre

Elle a seize ans – il y a trois mois elle était déçue de n’être pas enceinte, aujourd’hui elle l’est – pas de son amoureux actuel, mais la valse est rapide - et elle est heureuse. Elle dit, personne n’a jamais pris soin de moi, et moi j’ai envie de prendre soin de quelqu’un, pour qui je serai importante en retour… Compter enfin sur cet autre-là (voir : Si près), sur cet autre soi (voir : Vanessa) – à une question sur le père de l’enfant, elle répond rêveusement, «Je me demande ce que ça fait, de dire Papa…».

Comme la plupart des jeunes filles que je rencontre, elle est vaguement inscrite dans un cursus scolaire sans issue, dans une famille désarticulée, dans des malentendus amoureux perpétuels – et certainement inscrite, dans une infinie solitude. Son besoin est légitime, d’un peu de chaleur et de vie, de compter enfin pour et sur quelqu’un – et qui suis-je pour juger du moyen ? Parce que le délai nous le permettait encore, j’ai décrété l’urgence d’attendre – de se donner le temps de penser, et de rêver, avant d’entrer dans quelque réel que ce soit.

Ce qui me touche en elle – peut-être la lucidité impuissante avec laquelle elle peut nommer ce qui lui advient – peut-être le fait que nous la suivions depuis deux ans, avec la sensation de ce passage inéluctable à venir – comme si ce passage par le corps était nécessaire, quoi qu’elle décide – peut-être parce que j'ai rarement senti aussi fort l’enjeu vital pour l’enfant en elle, celui qu’elle porte et celui qu’elle est encore.

Qu’elle interrompe sa grossesse ou la poursuive, j’ai le sentiment que l’enjeu est identique : que l’événement à venir ne soit pas une nouvelle blessure, mais l’occasion de traverser quelque chose, un chemin d’où sortir grandie.

08 novembre 2006

Si près

Elle a dix-huit ans, un treillis, un t-shirt moulant, et un visage d’ange. Elle est la deuxième d’une fratrie de sept, bien connue des services sociaux et judiciaires… L’année passée, son premier amour est parti en prison, lui laissant en cadeau d’adieu une grossesse qui s’est soldée par une première IVG. Aujourd’hui, elle revient pour un retard de règles.

La routine, au Centre. Mais ce qui est plus rare, c’est la possibilité de pouvoir passer ensemble progressivement des résultats du test – provisoirement négatif – aux raisons de la contraception hasardeuse, et de la contraception hasardeuse à sa vie relationnelle – l’impossibilité pour elle de vivre sans un autre qui l’étaye, quand bien même elle le maltraite et le rembarre – sa façon de sauter de chagrin en chagrin, l’un consolant de l’autre jusqu’à ce qu’elle s’attache (classiquement, quand l’autre se lasse d’être malmené) et souffre à son tour…

Dans l’entretien, nous passons des freins à la contraception aux traces de la première IVG, de l’envie affleurant d’avoir un enfant qui serait peut-être cet autre étayant - plus maîtrisable que ces garçons toujours décevants - à son incapacité de s'imaginer seule. En fil rouge, et malgré le côté volubile et rieur de la demoiselle, un parcours dans lequel elle s’expose et se malmène toujours elle-même, en fin de compte...
Ce qui me touche, c'est de la sentir si près de la possibilité d'entendre quelque chose à ce qu'elle vit néanmoins comme une fatalité - si près de l'ouverture d'une possibilité de décider d'une autre vie pour elle-même - et de n'avoir que les moyens de ce cadre. Un unique entretien peut-être, un autre encore, à la prochaine inquiétude, peut-être quelques rencontres - presque rien, ou déjà beaucoup - comment savoir ?

06 novembre 2006

Fêlés

Dans ma boîte mail ce jour ;-) :

Une vieille dame chinoise possédait deux grands pots, chacun suspendu au bout d'une perche qu'elle transportait, appuyée derrière son cou. Un des pots était fêlé, alors que l'autre pot était en parfait état et rapportait toujours sa pleine ration d'eau. À la fin de la longue marche du ruisseau vers la maison, le pot fêlé lui n'était plus qu'à moitié rempli d'eau.

Tout ceci se déroula quotidiennement pendant deux années complètes, alors que la vieille dame ne rapportait chez elle qu'un pot et demi d'eau. Bien sûr, le pot intact était très fier de ses accomplissements. Mais le pauvre pot fêlé lui avait honte de ses propres imperfections, et se sentait triste, car il ne pouvait faire que la moitié du travail pour lequel il avait été créé.

Après deux années de ce qu'il percevait comme un échec, il s'adressa un jour à la vieille dame, alors qu'ils étaient près du ruisseau. « J'ai honte de moi-même, parce que la fêlure sur mon côté laisse l'eau s'échapper tout le long du chemin lors du retour vers la maison ». La vieille dame sourit : « As-tu remarqué qu'il y a des fleurs sur ton côté du chemin, et qu'il n'y en a pas de l'autre côté ? J'ai toujours su à propos de ta fêlure, donc j'ai semé des graines de fleurs de ton côté du chemin, et chaque jour, lors du retour à la maison, tu les arrosais. Pendant deux ans, j'ai pu ainsi cueillir de superbes fleurs pour décorer la table. Sans toi, étant simplement tel que tu es, il n'aurait pu y avoir cette beauté pour agrémenter la nature et la maison. »

Chacun de nous, avons nos propres manques, nos propres fêlures. Mais ce sont chacune de ces craquelures et chacun de ces manques qui rendent nos vies ensemble si intéressantes et enrichissantes à trouver ce qu'ils ont de bon en eux. Rappelez-vous de prendre le temps de sentir les fleurs qui poussent sur votre côté du chemin !

Dans le même ordre d'idées, sur une ardoise de bistrot, il y a quelques années : Bienheureux les fêlés, car ils laissent passer la lumière.

03 novembre 2006

Luxe, calme et volupté

Une journée entière, dans la maison sans autre présence que le chat qui vient ronronner sous la couette et mordiller les pages du gros pavé que j'ai enfin le temps de lire d'une traite, une journée entière à rêvasser, prendre un long bain, faire la sieste, travailler un peu mais sans la pression des devoirs-douches-dîners, une journée entière à contempler le désordre avec un sourire et l'idée que ce n'est pas encore aujourd'hui que l'appartement sera rangé, une journée entière avec un beau soleil aux fenêtres et la chaleur douillette qui règne ici, une journée entière à papoter un peu au téléphone, répondre à des mails en souffrance depuis longtemps, et le soir sur un coup de tête partir au théâtre dans un univers loufoque et tendre, celui de Jean-Claude Vanier dans L'envol du Pingouin. Hier le somptueux Lady Chatterley de Pascale Ferran, ce matin la voix cristalline de Michèle Bernard - tout à l'heure retrouver, ressourcée, le Chaboudo et la Feu-Follette.
...quelques heures plus tard, Elsa me saute dans les bras : "Tu sais que je t'ai manqué ?!?"

30 octobre 2006

Orient Express

Moi qui ne sais pas reconnaître ma main droite de mon pied gauche, moi qui qui ai essayé des dizaines de cours de danse et découragé je ne sais combien de professeurs, moi qui attrape de l'urticaire dès que je rentre dans une salle avec un parquet ciré et un miroir mural (celui-là même qui souligne élégamment rondeurs hivernales et tentatives de mouvement plus ou moins gracieuses)... je me suis amusée comme une petite folle - non que je sois subitement devenue moins maladroite, mais parce que la maladresse n'empêchait ni l'énergie ni le plaisir - la prochaine fois, c'est juré, je m'achète un foulard qui fait bling-bling-bling sur les hanches - à peine besoin de plus pour me sentir princesse des Mille et une nuits.

25 octobre 2006

Intégration

"Quelle vie doit-on vivre ? Celle qu'on choisit pour soi, ou celle qu'ils ont choisie pour vous ? Ou quelque chose d'intermédiaire ? Cette personne devra découvrir que, parmi les différents rôles qu'elle joue, il n'y en a pas un qui "représente le véritable moi." Au contraire, une partie d'elle-même est investie et trouve son expression dans chaque rôle. Le problème est de les intégrer de telle sorte que les différentes parties de son moi s'agencent pour vivre simultanément."
Fritz Perls, Gestalt Thérapie

23 octobre 2006

La famille s'agrandit


21 octobre 2006

L'amour en plus

...l'amour maternel serait quelque chose entre le mythe et la construction sociale, dit à peu près Badinter. Mais quand même - je ne connais pas beaucoup de mythes capables de me faire prévoir des achats de ballons, bougies, assiettes et verres multicolores, de bonbons au kilo et de tous les ingrédients nécessaires à la réalisation d'un brownie géant et d'un maxi saladier de pop corn. Ni de représentations sociales susceptibles de me faire traverser Paris pour un T-shirt spécial 7 ans, Léo depuis le 23 Octobre 1999, de me faire accueillir neuf gnomes en folie le temps d'un après-midi, ou de me faire passer deux heures à monter successivement un dragon Méga-Blocks, un robot Nika, et un super vaisseau Star Wars (de loin le pire !). Et tout ça - avec un indéniable plaisir.

19 octobre 2006

Une semaine par mois

Une semaine par mois, dix-huit mois durant, pour revisiter les thèmes de l'enfance et de l'adolescence, du couple et de la famille : en écho à une collègue qui fait le lien entre ce que la formation brasse de personnel, de pratique, et de théorique, je note avec un sourire, "On est dans le pétrin..."
En cadeau (et bien que nous n'ayons pas été sages !), une image, celle d'un violon dont la sensibilité, la subtilité seraient à la mesure de sa fragilité.
Et un fil qui a couru tout au long de la session, celui de la parole - qui ne peut se déployer qu'inscrite dans le cadre qui la porte et lui donne sens - mais qui peut aussi se retenir - est-ce que tout se dit, est-ce que tout est à dire - qu'est-ce qui est de soi, et qu'est-ce qui est de l'autre - et qu'est-ce qui nous échappe ?

13 octobre 2006

C'est extra

Vendredi soir, 20h, toute la petite famille s'installe sur le canapé pour une séance de ciné grand écran grâce au vidéoprojecteur fraîchement acquis pour raisons professionnelles - Léo dit, c'est la première fois, on peut la mettre dans la Boîte à Bonheur ! (Ronronnement approbateur de la Lu)
Nous regardons E.T (pourquoi faire les choses à moitié ?), et quand le chien aboie à l'adresse de la mystérieuse créature encore tapie dans l'obscurité, je me crois obligée de rassurer Elsa - "Il aboie parce qu'il ne sait pas ce que c'est." - "Ben, un esstra-terrestre", me réplique-t-elle du ton de l'évidence... No comment.

09 octobre 2006

Trop-plein

En réponse à mon invitation à écrire sur des feuilles de couleur les "valises" symboliques avec lesquelles elles arrivent en formation, une stagiaire, infirmière scolaire de 58 ans à la tendresse intacte mais à l'émotion à fleur de peau, note : "Avec le statut, la profession, l'âge, le coeur écoute beaucoup - que faire de toutes ces douleurs qui s'y déversent, constamment ?".

06 octobre 2006

Bis repetita

Posologie : à consommer sans modération jusqu'à disparition complète des signes de grisaille.

"Il fait si beau mon amour si beau ce matin
Que je pourrais faire la cour à Christine Boutin
Il fait si beau sur la ville si beau sur les toits
Envie d’ouvrir la grille aux témoins de Jéovah
Aux terrasses des restos grecs tellement il fait beau
On pourrait trinquer avec les anciens proprios
Il fait si beau sur le train de banlieue qui retarde
Envie d’faire un câlin avec une chienne de garde
Sur les pervenches les PV – (choeurs) il fait si beau
Sur les affiches UMP – (choeurs) il fait si chaud
Les caméras d’surveillance – il y a du soleil sur la France…"

Vincent Delerm, Il fait si beau.
(Et si les symptômes persistent : Scissors Sisters - touche replay)

Ne cherchez plus l'amour

Yahoo Rencontres : Ne cherchez plus l'amour, ça dit. Comme si une fois l'amour choisi sur catalogue (âge sexe ville mensurations) les humains cessaient de chercher l'amour... Comme si l'amour n'était pas, quels que soient notre situation de famille, notre âge, nos orientations sexuelles, à la fois ce qui nous meut et ce à quoi nous aspirons. Comme si nous n'étions pas, tous sans exception, des êtres d'amour : en consultation je n'entends pas autre chose - l'amour dans tout ses états - douleur, joie, manque, enfants, parents, grands-parents, couples durables ou éphémères...
Cette semaine j'ai vu l'amour fraternel mis à mal par la maternité, l'amour conjugal qui devant l'évidence d'une intolérable violence espère encore, l'amour filial trop malmené pour permettre un accès serein à l'amour maternel - et toutes les larmes versées pour ces enfants qui furent conçus et ne naîtront pas. Cette semaine j'ai entendu un homme de 47 ans dire, tant que je ne serai pas délivré de (ce que je porte en) moi-même, je serai incapable d'aimer - et je l'ai vu pleurer - et puis sourire enfin, comme pour la première fois. Et ainsi de suite...
"C'est toujours l'amour en nous qui est blessé, c'est toujours de l'amour dont nous souffrons, même lorsque nous croyons ne souffrir de rien", écrit Bobin. Quand je me présente aux adolescents dans les interventions scolaires - j'ai coutume de dire - mon métier, c'est de m'occuper des histoires d'amour.

Une fois n'est pas coutume

Je sens une colère sans nom qui affleure sous ma peau - une tristesse anonyme qui me serre la gorge. Depuis quelques jours. Et je ne sais pas à quel temps ni à quel lieu elles appartiennent - ni même si elles m'appartiennent vraiment.
...c'est l'autre nom de nos absences, des heures sombres du chien-loup. C'est un éclat de lumière aiguë, celui-là même qui raye nos certitudes de surface, traçant une imperceptible mais profonde ligne de coupe entre nous et nous-mêmes, entre nous et le monde.

05 octobre 2006

D'un bout à l'autre

Au réveil, je me glisse sous la couette d'Elsa avec Léo - une minute de tendresse ensommeillée. A la nuit tombée, chacun un enfant sur les épaules, des éclats de rire en cascade devant les grilles fermées du Parc Montsouris.